Qui est ce Zouave, vigie des crues de Paris ?

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Qui est ce Zouave, vigie des crues de Paris ?

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Le pont de l'Alma et la statue du zouave, lors de la crue de 2016 à Paris.
Le pont de l'Alma et la statue du zouave, lors de la crue de 2016 à Paris.
© AFP - Bravo Ana

Quand l’eau de la Seine monte, les yeux des Parisiens se tournent vers le Zouave. Cette statue du Pont de l’Alma sert, depuis 1910, de mesure populaire lors des crues du fleuve. La montée des eaux de ces derniers jours ne fait pas exception. Retour sur l'histoire d'un Zouave qui devint populaire.

Depuis plusieurs jours, les Parisiens scrutent la Seine, dont le lit monte chaque heure un peu plus. Des berges sont inondées, l’accès aux péniches rendu difficile, les musées longeant le fleuve sont en alerte, face à une crue qui perturbe la capitale, et dont le pic devrait être atteint ce samedi, selon le réseau Vigicrues, avec une hauteur allant de 5,80 mètres à 6 mètres. Le pays a vécu le deuxième bimestre (décembre-janvier) le plus pluvieux depuis le début des relevés en 1900, d’après Météo France. 

A Paris, le cumul pluviométrique a doublé sur la période par rapport aux normales saisonnières. Sur les réseaux sociaux, les photos montrant la crue à divers endroits de la capitale prolifèrent. Notamment des photos du Zouave du Pont de l’Alma, l’eau lui arrivant jusqu’aux genoux. Cette statue est dans l’imaginaire collectif parisien un moyen de mesurer l’importance du phénomène. 

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A l’origine, le Zouave n’était pas seul

Lorsque l’on se penche sur l’histoire du Zouave, il faut d’abord s’intéresser à l’histoire du pont de l’Alma. Construit sous le Second Empire, inauguré par Napoléon III, le pont tient son nom de la bataille de l’Alma, en Crimée, remportée en 1854 par les Français, les Anglais, les Turcs Ottomans, et un corps expéditionnaire piémontais contre les Russes. "Il a été créé pour relier deux quartiers, celui de Chaillot et celui de Grenelle, qui étaient en plein développement, explique Daniel Imbert, spécialiste du patrimoine parisien, et secrétaire général de la commission du vieux Paris. Il est aussi construit dans la perspective de l’exposition universelle de 1855."

Adossées à chaque pile du pont, il y avait au départ quatre statues, "qui représentent chacune un corps de l’armée française ayant servi pendant la guerre de Crimée, poursuit Daniel Imbert. Un zouave (nom donné aux soldats des régiments français d'Afrique du Nord, ndlr), un grenadier, un artilleur et un chasseur à pied." Deux sculpteurs ont réalisé les statues, Georges Diebolt se charge du zouave et du grenadier en amont, et côté aval, Auguste Arnaud pour l’artilleur et le chasseur. 

Dans l’imaginaire parisien

Le Zouave est devenu lors de la grande crue de 1910 un moyen pour la population de mesurer le niveau de la Seine. "Il est alors une œuvre de référence, attirant la curiosité du public, par rapport à la montée des eaux. En 1910, il avait l'eau jusqu'aux épaules", selon le spécialiste du patrimoine parisien. 

Le zouave lors de la crue historique de 1910 à Paris.
Le zouave lors de la crue historique de 1910 à Paris.
© AFP - Leemage

A partir de ce moment-là, c'est devenu une tradition dans l’imaginaire collectif des Parisiens : si la statue a les pieds dans l’eau, c’est synonyme d’inquiétude. Pourquoi lui et pas les autres statues ? "Certainement parce que le Zouave a la particularité d’avoir un vêtement extrêmement détaillé, explique Daniel Imbert, des jambières, des guêtres, une culotte bouffante, une large ceinture et une veste."

Au début des années 1960, la mairie décide de rénover le pont de l’Alma, désormais trop étroit et mal adapté au développement de la circulation. Les travaux démarrent au début des années 1970, l’ancien pont est démoli, un nouveau est construit. Pour Daniel Imbert : 

Quand on construit un pont dans les années 1970, on se préoccupe guère de le décorer de figure sculptée. Mais étant donné la place qu’a pris le Zouave dans l’imaginaire collectif, il a été malgré tout décidé de le garder, mais de le déplacer de l’autre côté. 

Le grenadier sera installé à Dijon, près du lac Kir. Le chasseur, au bord de l’autoroute A4, en arrivant à Paris. Enfin, l’artilleur est lui dans l’Aisne, dans la commune de La Fère, sur la place principale, car la ville accueillait auparavant la première école militaire d’artillerie de France. 

Unité de mesure pas fiable 

Depuis 1910, le Zouave du pont de l’Alma reste donc une unité de mesure populaire pour les crues de la Seine. Chaque partie de son corps est un repère. La statue mesure 5,2 mètres, et pèse environ huit tonnes. Lors de la crue historique de 1910, l’eau lui montait jusqu’aux épaules, le niveau de la Seine s’est élevé jusqu’à 8,62 mètres. A partir de là, quand le Zouave avait les pieds dans l’eau, les berges étaient fermées. Quand l’eau arrivait aux genoux, la navigation était coupée. 

La statue du zouave mesure 5 ,2 mètres, et pèse environ huit tonnes.
La statue du zouave mesure 5 ,2 mètres, et pèse environ huit tonnes.
© AFP - Martin Bureau

Mais l’indicateur n’est plus totalement fiable aujourd’hui, car lors de la reconstruction du pont, la statue aurait été surélevée ou abaissé d’une dizaine de centimètres. Aurait, car même l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région Ile-de-France et la direction interdépartementale de l’environnement et de l’énergie ne savent pas répondre (selon Le Monde qui les avait contactés en 2016). Sur Twitter, des Parisiens ont imaginé un schéma avec les mesures des crues selon les années par rapport à la taille de la statue. 

Un phénomène culturel

Toujours est-il que le Zouave a beaucoup de succès quand l’eau de la Seine monte. Les badauds se pressent pour le prendre en photo, et sur le réseau social Twitter, il a même un compte à son nom. Le Parisien qui se cache derrière l'a créé lors de la crue de 2016, et dit ne pas connaître "plus que ça" l’histoire de la statue, le compte "étant purement humoristique".

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Autre preuve de l’imprégnation de la statue dans l’imaginaire collectif, le Zouave est chanté par Serge Reggiani, dans le Zouave du pont de l’Alma, Georges Brassens dans les Ricochets, Thomas Fersen le cite également dans sa chanson Ne pleure plus. Le Zouave est aussi le titre d’un roman écrit par Roger Bordier, Le Zouave du pont de l’Alma, en 2001.