Reportages au coeur des débats locaux, à Sèvres, Paris, Toulouse, Amiens, Erquy ou à Tunis
Par Éric Chaverou, Rosalie Lafarge, Lise Verbeke, Stéphane Iglesis, Margaux Stive, Maurine Mercier, Steven Gouaillier
Le grand débat national lancé mi janvier par Emmanuel Macron se poursuit. "Succès incontestable" d'après le gouvernement, "campagne électorale déguisée" selon les oppositions, il se traduit par des milliers de discussions en France. Reportages sur plusieurs de ces échanges citoyens.
Le grand débat national va bien au-delà des prises de parole d'Emmanuel Macron. Près de 6 500 réunions, dont plus la moitié a déjà eu lieu, ont été programmées dans toute la France et au 15 février, 210 000 personnes avaient déposé un total de 900 000 contributions en ligne, selon les chiffres du collège des "garants". Les débats ont jusqu'à présent surtout eu lieu en milieu rural, avec un public souvent composé de retraités et de gens déjà engagés dans la vie publique, malgré les tentatives de rajeunir l'audience. Ces réunions se poursuivront jusqu'à mi-mars et 18 Conférences citoyennes régionales se tiendront ensuite en métropole et outremer avec la participation de citoyens tirés au sort. Les données recueillies seront alors analysées jusqu'à mi-avril. Après une analyse des contributions en ligne par l'institut OpinionWay, Emmanuel Macron a assuré vouloir tirer "des conséquences profondes" de cette réponse au mouvement des "gilets jaunes".
Nos journalistes ont suivi plusieurs de ces débats, avec des reportages diffusés dans nos journaux et que voici.
Des collégiens face au maire de Sèvres
Direction d'abord Sèvres, en banlieue parisienne. Tous collégiens, les membres du "Conseil communal des jeunes" se sont retrouvés le weekend dernier autour du maire "divers-droite" de la commune. Avec trois ateliers : deux pour évoquer la démocratie et la citoyenneté et un autour de la transition écologique. Sur les tables, stylos, feuilles, et petits livrets contenant des pistes de réflexions autour des thèmes abordés. Objectif : faire émerger six idées ou six questionnements par atelier. Sur celui réservé à la transition écologique, on parle survie des abeilles, tri sélectif, énergies renouvelables, le tout orchestré par deux encadrantes. Chacun explique ses priorités, avant de laisser la place au débat et pour chaque atelier, un.e porte-parole est nommé.e qui aura la charge de présenter les réflexions retenues à la salle et au premier édile de la commune :
Compte-rendu d'un débat à Sèvres, signé Steven Gouaillier
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Un stand "de proximité" en gare d'Amiens
A Amiens, deux étudiants se sont eux installés dans la gare de la ville, dans le département de la Somme où les "grands débats" ne sont pas très nombreux. Ces étudiants ont reçu une formation par la commission du grand débat, quelques jours avant d'animer ce stand, et ils sont rémunérés au SMIC. Le thème de la fiscalité revient le plus souvent, mais les voyageurs s’arrêtent peu devant l'espace qui leur est réservé.
Ces stands "de proximité" ont été mis en place un peu partout en France, dans les gares et les bureaux de Poste. Il s'agit de toucher davantage de jeunes et de personnes qui ne sont pas à l’aise avec le numérique pour répondre en ligne au grand débat. 150 étudiants ont ainsi été recrutés dans 100 villes en France.
Reportage en gare d'Amiens de Lise Verbeke
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Un grand débat des entrepreneurs
A Toulouse, la Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers de Haute-Garonne ont organisé lundi soir un débat qui a réuni 175 entreprises. Le thème de la fiscalité, dépenses et action publique, a mobilisé 80% des PME et PMI présentes, contre 10% seulement pour la transition écologique. Les chefs d'entreprise présents n'ont pas économisé leur salive pendant plus de deux heures, comme Corinne. Cette dirigeante d'une entreprise d'informatique se demande pourquoi les Google, Microsoft et Amazon ne sont pas taxées au même niveau qu'elle. Elle souhaite aussi pouvoir embaucher et débaucher plus facilement.
Reportage de table en table de Stéphane Iglesis
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Toutes ces réflexions et questions ont été compilées dans des cahiers et la synthèse de ce débat sera envoyée dans les prochains jours au président de la République.
Un grand débat organisé par des citoyens à Erquy, en Bretagne
A Erquy, ville d'un peu moins de 4 000 habitants dans les Côtes d'Armor, quatre citoyens ont décidé de prendre les choses en main et d'organiser quatre séances de débat : une pour chaque thème retenu par le gouvernement. Ce vendredi, on y parlait fiscalité et dépenses publiques dans une salle municipale réagencée par les organisateurs qui ont regroupé des tables pour pouvoir faire travailler la vingtaine de participants par petits groupes. Ainsi, "tout le monde a la parole" souligne Yves Tombette, l'un des quatre organisateurs de la soirée.

"On n'est pas là pour essayer de convaincre, mais simplement pour faire en sorte que les gens puissent débattre" souligne ce retraité, animateur local de La République En Marche, qui assure avoir laissé sa casquette politique au vestiaire pour la soirée. Ici, les participants armés du "diagnostic" ainsi que du "questionnaire" disponibles sur le site du grand débat, commencent par une heure de débat en petit groupe avant de mettre en commun leurs propositions. Les organisateurs listent alors scrupuleusement les idées et s'engagent à en faire la restitution sur internet.
A l'issue de cette réunion locale, les participants semblent plutôt satisfaits. Même Sébastien, chauffeur de poids lourds de 43 ans, ancien "gilet jaune" qui souhaite, en se joignant au débat, "essayer de faire avancer les choses, parce que les 'gilets jaunes' c'est bien mais il faut aussi aller dire ce qu'on a à dire, pourquoi ça ne va pas". Cet habitant de Matignon, près d'Erquy, veut croire que c'est "par le dialogue qu'on y arrivera".
Soirée débat à Erquy. Reportage de Rosalie Lafarge
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Des personnes atteintes de handicap mental prennent la parole
L'association l'Arche, avec le soutien du Cercle Vulnérabilités & Société, a voulu prendre l'appel du président de la République au pied de la lettre en organisant un grand débat ouvert aux personnes atteintes de handicap mental. Cela s'est passé lundi 25 février, dans le XVe arrondissement de Paris. Une petite centaine de participants de tous âges a planché sur les questions de citoyenneté et d'écologie. Avec un enjeu : inclure ces personnes comme des citoyens à part entière.
Reportage de Margaux Stive auprès invisibles parmi les invisibles, ceux dont le handicap ne se voit pas, souvent oubliés
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Ici, pas de grandes discussions enflammées mais des échanges en petits groupes d'une dizaine de personnes. Sur la table des images, des dessins, des photos et des animateurs pour aider chacun à formuler ses idées. Ce n'est pas toujours facile mais ce n'est pas une raison pour oublier la parole des personnes handicapées explique Samuel. A 37 ans, il lit les journaux et vote à chaque élection :
C'est important que les personnes handicapées soient pleinement conviées au débat qu'a initié M. le président de la République. Que l'on soit plus reconnu dans la société malgré notre handicap, comme des citoyens à part entière.

Car cette question de la citoyenneté se pose pour les personnes en situation de handicap comme pour les autres souligne Anne Delaval, la directrice de l'Arche à Paris :
Comment je contribue, comment moi aussi porteur d'un handicap je participe quand même à la vie de la société ? Je suis également un consommateur, un être qui pense, qui existe, qui a des aspirations, des inquiétudes, qui a envie d'améliorer le monde, de construire une société meilleure.
Après une heure de débat, chaque groupe résume ses constats et ses propositions. Ces idées seront ensuite synthétisées et partagées sur le site officiel du grand débat national et un site de débat spécifique pour les personnes atteinte de handicap a aussi été mis en place par l'APF France handicap, avec des thèmes spécifiques comme l'accessibilité ou l'accès à la vie professionnelle.
Débat aussi en Tunisie pour des Français de l'étranger
Des séances ont démarré à Tunis. La communauté française de Tunisie est estimée à 30 000 personnes. Avec 67 % de double nationaux.
Les Français de l’étranger ne sont que très peu pris en compte dans le grand débat. Voilà pourquoi ils sont ravis et nombreux à s’inviter dans cet événement national.
Notre correspondante en Tunisie, Maurine Mercier, a suivi la toute première soirée, dans un des hôtels les plus chics de la capitale.
Maurine Mercier a écouté la petite centaine de personnes présentes
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Au total, au moins 5 débats auront ainsi lieu en Tunisie.