"Strange Fruit", hymne anti-racisme, à l'investiture de Donald Trump ?

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"Strange Fruit", hymne anti-racisme, à l'investiture de Donald Trump ?

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Billie Holyday, au Downbeat Club, à New York.
Billie Holyday, au Downbeat Club, à New York.
- William P. Gottlieb - Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis

La chanteuse Rebecca Ferguson a accepté de chanter à l'investiture du président Donald Trump à la condition de pouvoir interpréter la chanson "Strange Fruit". Cet hymne contre le lynchage des noirs, interprété par Billie Holiday, a fait date dans l'histoire de la ségrégation.

Le président élu Donald Trump cherche, depuis plusieurs semaines, un artiste susceptible de chanter lors de son investiture, comme le veut la tradition aux Etats-Unis. Après les refus de nombreuses stars, parmi lesquelles Céline Dion ou Elton John, la chanteuse Rebecca Ferguson a accepté de chanter le 20 janvier prochain, à condition que le futur président la laisse interpréter "Strange Fruit", l'hymne anti-raciste de Billie Holiday. L'artiste, révélée dans l'émission américaine X Factor, s'était déjà fait connaître en interprétant "A change is gonna come" de Sam Cooke, un autre hymne du mouvement des droits civiques.

Dans les années 40, la chanson "Strange Fruit" avait eu un impact assez important pour qu'on puisse le comparer à celui du refus de Rosa Parks, en 1955, de descendre d'un bus. Pourtant, son interprète, la chanteuse Eleanora Fagan, de son nom de scène Billie Holiday, n'était pas une activiste de la cause noire. Mais comme tout Afro-américain de son époque, elle avait vécu la ségrégation raciale dès son enfance à Baltimore, jusqu'aux clubs de jazz, où les noirs n'étaient acceptés que sur scène. En 1939, dans sa chanson "Strange Fruit", elle dénonce pour la première fois de manière frontale dans l'histoire du jazz, les lynchages des noirs aux Etats-Unis, alors tristement courants.

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Dans cette chanson, le fruit étrange ("Strange Fruit"), renvoie aux pendus, qui se balancent aux branches des arbres. Les paroles sont celles d'un poème composé par Abel Meeropol, un jeune enseignant juif qui, en 1939, propose à Billie Holiday d'interpréter son oeuvre, qu'il a écrite après qu'il a vu des photos du lynchage de Thomas Shipp et d'Abram Smith, deux Afro-américains pendus aux branches d'un peuplier dans l'Indiana.

"Southern trees bear strange fruit " (Les arbres du Sud portent un fruit étrange)
"Blood on the leaves and blood on the root" (Du sang sur leurs feuilles et du sang sur leurs racines)
"Black bodies swinging in the southern breeze" (Des corps noirs qui se balancent dans la brise du Sud)
"Strange fruit hanging from poplar trees" (Un fruit étrange suspendu aux peupliers)

En juillet 2015, dans une série consacrée à Billie Holiday dans Continent Musiques d’Été, Julie Gacon revenait sur cet épisode de la vie de la chanteuse, où l'on pouvait par ailleurs écouter plusieurs versions de "Strange Fruit" :

Billie Holiday : Black Lady

59 min