The Boys in the Band : la pièce qui a changé la vie des LGBT+
Par Derwell QueffelecUn huis clos entre amis homosexuels, c'est le pitch de "The Boys in the Band", nouveau film diffusé sur Netflix. Adaptée d'une pièce de théâtre sortie en 1968, cette fiction fait date dans la représentation de la communauté LGBT+.
1968. Être homosexuel à New York est illégal et l’homophobie est omniprésente. Se réunir, faire la fête, parler de son homosexualité, l’inclure dans des films, rien de tout ça n’est facile.
Mart Crowley, jeune scénariste homosexuel dépressif, décide d’écrire une pièce en s’inspirant de sa vie et de celles de ses amis. The Boys in the Band est née.
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Une pièce novatrice
On suit la soirée d’anniversaire d’une bande de copains gays à New York. Au cœur de ce huis clos : un jeu d’alcool et de vérités qui fait basculer la soirée. On y parle sexe, alcool, solitude, mal-être, relations toxiques et homophobie.
Le succès de la pièce est immédiat et on voit s’y presser Marlene Dietrich et Jackie Kennedy. C’est un tournant dans la représentation des communautés LGBT+. Deux ans plus tard, la pièce est adaptée au cinéma, par William Friedkin.
“On n’avait jamais vu un film dont tous les personnages étaient homosexuels, ça n’existait pas. Et on a surtout une palette de représentations comme en a jamais vues. On a des personnages en couple, on a des personnages qui sont dans une grande liberté sexuelle, on a un noir, c’est ultra peu fréquent. On a quand même très rarement dans le cinéma américain de l’époque un brassage social et un brassage racial à l’écran, ça n’existe quasiment jamais", raconte Didier Roth-Bettoni, historien du cinéma LGBT+.
Le code Hays
Aux débuts du cinéma ainsi que dans le milieu underground, on représente assez librement l’homosexualité.
Mais à partir de 1934, les majors américaines et les maisons de production décident d’imposer un code d’honneur, le code Hays, interdisant : la violence, la nudité, les perversions sexuelles (dont l’homosexualité).
Commence alors une période de plus de vingt ans durant laquelle les personnages homosexuels vont exister sous la seule forme de sous-entendus. Avec le temps, les conservateurs boycottant ces thématiques se font moins nombreux, les réalisateurs prennent peu à peu leurs distances vis-à-vis du code Hays.
"Les choses commencent à se relâcher donc on commence à trouver des personnages, plus régulièrement, de gays ou de lesbiennes. Mais, la plupart du temps, c’est sous des axes, des représentations qui sont de trois types. Soit des personnages comiques, des personnages qui font rire, tournés en ridicule. Soit des personnages tragiques dont le sort est d’être une victime et qui vont finir mal, un suicide, une maladie, un accident, ça ne se finit jamais bien. Soit des criminels ou des prédateurs. C’est les trois seules représentations possibles ou envisageables dans 90% de la production américaine des années 1960", continue Didier Roth-Bettoni.
Les émeutes de Stonewall
The Boys in the Band met fin à tous ces clichés. La pièce et le film deviennent des références dans la représentation des LGBT+.
Mais au même moment, un événement bouleverse la réception du film : les émeutes de Stonewall. Le 28 juin 1969, la police fait une descente dans un bar gay à New York : le Stonewall Inn.
Les fêtards résistent toute la nuit aux forces de l’ordre. Les jours suivants voient naître une nouvelle forme de lutte pour les droits LGBT. Le message est “gay and proud”.
Le cinéma suit le mouvement et s’essaye à un nouveau genre : plus politique, plus militant. The Boys in the Band devient alors rapidement daté. Le film est vu comme trop triste, montrant la déprime de gays qui se cachent.
“Les personnages de 'Boys in the Band' ne sont pas du tout politiques, c’est ça la grosse différence entre ceux de ce moment-là et ceux d’après. Ce ne sont pas du tout des gays et des lesbiennes qui vont aller dans la rue, ils vivent tous leur homosexualité plus ou moins ouvertement, plus ou moins bien mais ce sont des façons de vivre individuelles, ce qui va changer, après 1969, c’est que ça va devenir un combat collectif", développe Didier Roth-Bettoni.
“Ce fut la première pièce qui traitait du mode de vie des gays, et elle était à la fois extrêmement drôle et émouvante. Elle resta gravée à jamais dans la mémoire de ceux qui la virent.” William Friedkin__.
Une source d'inspiration
The Boys in the Band reste un tournant. La pièce, puis le film, ont directement inspiré la manière de raconter les histoires d’hommes gays comme dans Making Love d’Arthur Hiller sorti en 1982, Mala Noche (1986) et My Own Private Idaho (1991) de Gus Van Sant et plus tard Le Secret de Brokeback Moutain (2006) d’Ang Lee.
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