En 2017, le nombre de touristes à travers le monde a atteint 1,323 milliard. Et il est question d'1,8 milliard en 2030, avec un trafic aérien et des locations à domicile qui ne cessent de se développer. Victimes de leur succès, de plus en plus de "grandes" destinations renforcent leur législation.
Les arrivées de touristes internationaux ont totalisé 1 323 millions en 2017, soit quelque 84 millions de plus que l'année précédente. Un nouveau record, expliquait il y a peu l'Organisation mondiale du tourisme. L'OMT de préciser que "le secteur connaît une croissance ininterrompue des arrivées depuis huit années consécutives. La progression de 2017 a été la plus forte depuis 2010, avec les régions d'Europe et d'Afrique arrivant en tête du tableau, soit respectivement 8 % et 9 %, d’augmentation des arrivées." Un paysage marqué ces dernières années par le développement d'un tourisme à bas prix "uberisé", en particulier par le phénomène Airbnb. Les projections indiquent par ailleurs que le trafic aérien mondial est censé doubler à 7,8 milliards de passagers à l'horizon 2036.
En cette journée mondiale du tourisme, partons pour six hauts lieux victimes de surfréquentation, qui ont dû légiférer pour tenter de freiner leurs visiteurs et se protéger : Venise, Barcelone, Amsterdam, le Mont-Blanc, Santorin et l'Île de Pâques Rapa Nui. Alors que l'OMT vient de publier un rapport sur l'"overtourisme", basé sur 68 villes.
Venise : au large les paquebots à partir de 2019
La cité des Doges compte aujourd'hui 545 touristes par habitant : 30 millions de touristes par an pour seulement 55 000 habitants ! Ces Vénitiens sont à bout. Face à cet enfer au quotidien, à la spéculation immobilière, aux prix qui s'envolent, à l'industrie du souvenir et aux incivilités, ils fuient : ils étaient 100 000 il y a 40 ans et 1 000 habitants quittent le centre chaque année. Certains manifestent contre un "Veniseland", comme en juin dernier - ils étaient un millier. Et l'on va jusqu'à dire que Venise pourrait être la première ville tuée par le tourisme de masse. A l'été 2016, l 'Unesco avait donné six mois à la ville et à l'Etat italien pour proposer des solutions concrètes, faute de quoi Venise serait inscrite sur la liste des sites du Patrimoine mondial en péril.
Classée Patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1987, la Sérénissime a déjà fixé un numerus clausus pour le Carnaval : 20 000 personnes sur la Place Saint Marc, sans problème cette année. Et surtout, en novembre 2017, après des années de lutte et de photos insensées, il a été décidé de mettre à l'écart les paquebots géants du canal de la Giudecca. Ces monstres de plus de 100 000 tonnes ne devraient plus générer de remous particulièrement préjudiciables à la cité et ses palais bâtis sur pilotis. A partir de 2019, ils devraient accoster à Marghera, de l'autre côté de la lagune, dans le cadre d'un plan de développement qui continue à miser sur ce tourisme de masse.
Des portiques pour contenir le flux des touristes ont aussi été testés à l'occasion du pont du 1er mai dernier. A l'initiative du maire, Luigi Brugnaro, ils ont été installés en urgence au pied de deux ponts du centre historique. À charge pour les policiers municipaux de distinguer les badauds des Vénitiens, ces derniers disposant d'un permis de circuler permanent. Mais quelques dizaines d'activistes ont déplacé ces tourniquets, pour dénoncer une mesure qui, selon eux, ne règle pas le problème de fond de ces millions de visiteurs.
Il y a un an a aussi été lancée une campagne pour respecter la ville.
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Reportage d'Envoyé Spécial diffusé il y a quelques jours
Barcelone : des groupes limités à 25 touristes
Environ 500 personnes ont encore manifesté dans le quartier côtier de la Barceloneta fin août. "Tourist Go Home!", peut-on lire sur certains murs de la capitale de la Catalogne, où 60% de l'offre d'hébergements touristiques est concentré entre les Ramblas et le "barrio gotico". Depuis plusieurs années, les Barcelonais (1,6 million) sont fatigués de la surfréquentation touristique (32 millions) et de ses conséquences : dégradations, incivilités, insécurité. Les mobilisations anti tourisme se sont multipliées, y compris violentes, avec notamment l'attaque d'un bus en août 2017 par un groupe anarchiste.
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La mairie, gouvernée par l’ancienne militante du droit au logement Ada Colau, a interdit l’ouverture de nouveaux hôtels dans le centre-ville il y a déjà trois ans. Avec l'obligation pour les établissements qui souhaitent réaliser des travaux de rénovation de diminuer leur nombre de chambres.
Les plateformes Airbnb et HomeAway ont dû payer des amendes de 600 000 euros pour avoir accepté des annonces d’appartements qui n’avaient pas la licence nécessaire. Proche de Podemos, l'élue a aussi lancé un vaste plan d'urbanisme pour logements touristiques (Peuat) qui découpe la ville en trois cercles concentriques et a décrété un moratoire d'un an sur toutes les attributions de licence touristique pour les appartements de particulier et les hôtels.
Enfin, depuis 2015, le célèbre marché de la Boqueria a été interdit à des groupes de plus de quinze personnes les vendredis et samedis matins. Avant que les groupes touristiques de plus de 25 personnes ne soient interdits dans l'ensemble de la ville, les guides ne pouvant plus donner d'explications dans les bus, les métros ou les tramways du réseau métropolitain.
D'après le conseiller municipal chargé du tourisme : "Barcelone a une marque de qualité. Les touristes eux-mêmes disent que l'espace est saturé et qu'il est nécessaire de parvenir à des accords avec le secteur."
Amsterdam : hôtels flottants interdits
Ici encore, le nouvel exécutif local veut privilégier les habitants et en finir avec la "disneyisation" de la capitale néerlandaise. 18 millions de personnes visitent en effet chaque année la ville des canaux et des vélos, soit davantage que les 17 millions d'habitants du pays. Une série de mesures a donc a été annoncée en mai dernier.
Les taxes touristiques vont augmenter, jusqu’à dix euros par nuit pour la taxe de séjour, les hôtels flottants seront interdits et les locations Airbnb seront limitées à 30 jours dans le centre-ville, et pourraient même être interdites dans certains quartiers si elles sont de courte durée. Il sera aussi, entre autres, bien plus compliqué pour les nouvelles chaînes de boutiques ou de restaurants de s'installer.
Enfin, certains moyens de transports de plaisance seront supprimés, comme des taxis-bateaux qui circulent sur les canaux, des calèches attelées, et des gyropodes Segway, qui ne seront plus disponibles à la location.
Le Mont-Blanc : pas plus de 214 alpinistes par jour l'été prochain
Avec plus de six millions de visiteurs dans le massif dans son ensemble, le Mont-Blanc est le troisième site naturel le plus visité au monde. Le maire de Saint-Gervais, Jean-Marc Peillex, exigeait une régulation touristique de la voie royale à ce sommet depuis quinze ans. Elle vient de se concrétiser.
À partir de l’été 2019, le nombre d’alpinistes sur le Mont-Blanc sera limité à 214 par jour. Ils auront l’obligation de réserver une place dans un des trois refuges qui se situent sur le trajet. Avec une sorte de "permis" d'accès et une brigade de gendarmerie chargée de veiller au respect de la limitation et de donner des contraventions.
Santorin : haro sur les croisiéristes
Cette île grecque de carte postale est archi saturée. L'an dernier, près de 409 paquebots ont déversé jusqu'à 12 000 passagers chaque jour, avec même l'aide d'un téléphérique ! Sans oublier les 2 000 touristes en provenance de Crète, grâce aux deux ferrys quotidiens.
Un responsable municipal a donc fixé un numerus clausus : pas plus de 8 000 touristes par jour. Des caméras contrôlent le flux des arrivées et les autorités envisagent pourquoi pas un ticket d'entrée de 15 euros. Cela limiterait, selon elles, la quantité, et améliorerait la "qualité" de personnes au plus fort pouvoir d'achat.
L'Île de Pâques, Rapa Nui : 30 jours au plus sur place
Les mystères de ce lieu habité le plus isolé au monde et de ses célèbres moai (géants de pierre) attirent toujours plus de touristes du monde entier : 116 000 par an aujourd'hui. Et les habitants sont désormais 7 750, contre 3 700 habitants en 2002. Le rêve commence à se transformer en cauchemar pour le traitement des déchets, notamment, comme le montre très bien le reportage vidéo ci-dessous de la chaîne T13. En dix ans, la production annuelle de déchets a ainsi presque doublé, passant à 2,5 tonnes. Sans vraiment de recyclage et avec une décharge à ciel ouvert qui ne cesse de s'étendre, en bord de mer...
Face à cette situation jugée grave pour l'écosystème, sans être encore critique, les autorités chiliennes ont pris une série de mesures, redonnant au passage au site son nom de Rapa Nui (le nombril du monde). La loi pour protéger ce joyau naturel, culturel et archéologique de 168 km2 perdu au milieu du Pacifique est entrée en vigueur le 1er août dernier, avec :
- Interdiction pour les touristes de passer plus de trente jours sur place, soit trois fois moins qu'auparavant.
- Obligation de remplir un formulaire, d'avoir une réservation dans un hôtel ou d'avoir été invité par un insulaire et de présenter des billets d'avion aller - retour. Mesure valable pour les étrangers comme pour les Chiliens.
- Obligation pour s'installer durablement d'être le père, la mère, le conjoint ou le fils d'un membre de la communauté autochtone des Rapa Nui.
- Seuls les fonctionnaires, les salariés d’organisations travaillant pour le compte de l’Etat et ceux qui développent une activité économique indépendante pourront y résider avec leurs familles.
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