
Le 11 janvier 2023, Lviv accueillait un rendez-vous important. Dans la grande ville de Galicie se réunissait, au plus haut niveau, le "Triangle de Lublin". Au menu des chefs d'États polonais, lituanien et ukrainien, un mets de choix : l’intégration de l'Ukraine à l’Union européenne et à l’Otan.
Loin de la ligne de front, au cœur de la Galicie, la région polono-ukrainienne, s’est tenue début janvier une réunion du "Triangle de Lublin". Une réunion au sommet, puisqu’elle rassemblait les trois chefs d’État du trio, le Polonais Andrzej Duda, l’Ukrainien Volodymir Zelensky et le Lituanien Gitanas Nauseda. Une fois encore, cette plateforme de coopération politique, économique, culturelle et sociale a manifesté un engagement fort à l’égard de l’Ukraine et de la "nouvelle" Europe centrale. Sa raison d’être, en fait.
Le 1er juillet 1596 naissait l’Union de Lublin, du nom d’une ville historique de l’est de la Pologne, proche des frontières de l’Ukraine et du Bélarus. Le Royaume de Pologne (et donc aussi l’ex-Royaume de Galicie, en Ukraine) et le Grand-Duché de Lituanie (qui a intégré les ex-principautés du Bélarus) se réunissaient dans un seul pays : la République des Deux-Nations, dirigée par une monarchie élective sous le contrôle de deux Chambres : la Diète polonaise (Sejm) et la Diète lituanienne (Seimas).
Lorsque les Polonais du XXIe siècle ont cherché un symbole de l’amitié entre la Pologne, la Lituanie et l'Ukraine (en attendant, un jour, le Bélarus, quatrième membre de la République des Deux-Nations), la ville de Lublin s’est donc naturellement imposée. Le 28 juillet 2020, les trois ministres des Affaires étrangères, le Polonais Jacek Czaputowicz, le Lituanien Linas Linkevicius et l’Ukrainien Dmytro Kouleba ont ainsi créé le "Triangle de Lublin".
Union historique
Cette organisation informelle a plusieurs objectifs. Tout d’abord, depuis le 24 février 2022, et l’invasion russe de l’Ukraine, elle œuvre à la restauration de l’intégrité territoriale de l'Ukraine dans les frontières internationales reconnues. Le président polonais a, dans ce cadre, annoncé le 11 janvier 2023 à Lviv la livraison à Kiev de chars d’assauts Leopard polonais.
Le "Triangle de Lublin" lutte depuis 2014 contre l'occupation de la Crimée par la Russie. Il se place aux côtés des Tatars de Crimée, qui sous l’Union soviétique, luttaient pour la démocratie en compagnie des dissidents ukrainiens. C’est le cas de Moustafa Djemilev, d’une famille tarare déportée sous Staline en 1944, ancien dissident, député ukrainien et membre de l’Assemblée parlementaire de Conseil de l’Europe.

Le "Triangle de Lublin" soutient ensuite la volonté de l’Ukraine de rejoindre l’Otan. Il réclame pour Kiev un statut de partenaire renforcé à l’Alliance atlantique, dont la Pologne et la Lituanie sont membres, depuis 1995 et 2004 respectivement. A plus long terme, le groupe voudrait voir l’Ukraine intégrer pleinement l’Alliance.
Soutien actif
Enfin, Varsovie, Vilnius et Kiev veulent accélérer l'adhésion de l’Ukraine, pays officiellement candidat depuis le 23 juin 2022, à l’Union européenne. Pour faire avancer son dossier, il lui faut trouver du soutien pour développer son économie, ses transports, son approvisionnement en énergie ses libertés publiques. Il faut donc que l'Ukraine puisse s'ouvrir vers l'économie européenne. Et pour y parvenir, elle pourra compter sur ses voisins, à commencer par la Pologne.
Le 11 janvier 2023, en marge de la réunion du Triangle à Lviv, Volodymir Zelensky a donné sa première interview à un média polonais depuis le début de la guerre. L’occasion d’exprimer sa gratitude à l’égard de la Pologne, pour son soutien et l’accueil des réfugiés ukrainiens sur son sol.
L’occasion, aussi, de souligner le potentiel de son grand voisin, qui peut être « une force motrice et un lobby », dans le cadre d’un futur plan de paix notamment. Car le Triangle de Lublin, ont rappelé ses membres, c’est une vision commune sur l’avenir non seulement de l’Ukraine mais de toute l’Europe centrale.