Un conseil de l'ordre pour les journalistes ? Le secrétaire d'État Cédric O fait machine arrière

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Un conseil de l'ordre pour les journalistes ? Le secrétaire d'État Cédric O fait machine arrière

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Le secrétaire d'Etat au numérique Cédric O est revenu sur son appel à créer un conseil de l'ordre des journalistes : "Ces propos n'engageaient que moi et ne sont en aucun cas la position du gouvernement".
Le secrétaire d'Etat au numérique Cédric O est revenu sur son appel à créer un conseil de l'ordre des journalistes : "Ces propos n'engageaient que moi et ne sont en aucun cas la position du gouvernement".
© AFP - Alain Jocard

Le secrétaire d'État au numérique, Cédric O, a corrigé le tir ce jeudi sur France Culture après ses déclarations polémiques appelant à la création d'un "conseil de l'ordre des journalistes" : "Des paroles un peu malheureuses qui ne reflètent pas la position du gouvernement".

Il fallait éteindre le début d'incendie et Cédric O l'a fait ce jeudi : invité du journal de 12h30 de France Culture, le secrétaire d'État chargé du numérique - ex conseiller conjoint d'Emmanuel Macron et d'Edouard Philippe de 2017 à 2019 - a corrigé ce qu'il avait déclaré à l'agence Reuters mardi, prônant la création d'un "conseil de l'ordre des journalistes" doté d'un pouvoir de sanction, et lançant même un ultimatum : "C'est aux journalistes de le faire, ce n'est pas à l'Etat de le faire. S'ils ne le font pas, ce sera l'Etat qui le fera, au bout du bout."

Cédric O regrette la formulation mais appelle les journalistes à s'organiser face aux ingérences

"J'ai tenu des propos qui n'engageaient que moi et qui ne sont en aucun cas la position du gouvernement", a corrigé d'emblée le secrétaire d'État sur France Culture. "Lorsque j'ai dit : 'Si les journalistes ne le font pas, l'État le fera', ça n'était pas une menace, ni même un souhait. C'était une appréciation de la dynamique (...) en cours avec une ingérence étrangère dans les processus démocratiques. J'ai la crainte que si les journalistes ne règlent pas le problème (...), les gouvernements soient tentés de s'en saisir, même dans les pays démocratiques. Ce qui est un gros problème parce que je pense que l'Etat ne doit pas intervenir dans ce qui touche à la liberté de la presse".

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Ecoutez l'intégralité de l'entretien, mené par Maxime Tellier, dans le journal de Thomas Cluzel :

Cédric O : "J'ai tenu des propos qui n'engageaient que moi et qui ne sont en aucun cas la position du gouvernement"

8 min

Cédric O faisait référence à des médias comme Russia Today (RT) ou Sputnik, sous influence russe, qu'il avait mentionnés dans son interview à Reuters : "[Ils] fragilisent volontairement la démocratie pour aboutir à l'arrivée au pouvoir de tel ou tel parti politique", affirmait Cédric O. "Moi ,je considère qu'il y a un risque monstrueux. Et donc il y a une obligation de résultats de la société."

Ces propos, et l'utilisation du terme "conseil de l'ordre" ( qualifié de fasciste par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017), avaient déclenché une vague d'indignation au sein de la presse. 

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Ils avaient aussi jeté le trouble sur les intentions du gouvernement. Car un projet de conseil de déontologie est bel et bien sur les rails : en mars, l'ancien PDG de l'AFP Emmanuel Hoog a remis un rapport au ministre de la Culture dans lequel il propose la création d'un Conseil de déontologie journalistique.

Un conseil de déontologie journalistique en projet pour la fin d'année

Cette instance, indépendante de l'État et sans pouvoir de sanction, pourrait voir le jour avant la fin de l'année 2019 sur le modèle de conseils de presse qui existent déjà dans d'autres pays (Belgique, Royaume-Uni, Canada...). Elle vise à répondre à la crise de confiance du public envers les médias, aggravée par la diffusion de fausses informations sur internet. "Une telle instance existe déjà chez un certain nombre de nos voisins européens", avait déclaré le ministre de la Culture Franck Riester en mars aux assises du journalisme de Tours, "elle est recommandée par des organisations internationales comme l'Unesco et l'OSCE, et nos compatriotes sont majoritairement pour", avait fait valoir le ministre, citant un sondage réalisé par Viavoice montrant que 74% sont favorable à un conseil de la presse. 

Cette nouvelle instance de médiation est censée offrir un nouveau recours au public, en plus de la justice qui intervient dans les cas d'injures ou de diffamation. Plusieurs médias y travaillent aux côtés de l'ODI ( Observatoire de la déontologie de l'information) présidé par l'historien Patrick Eveno, très en colère après les premières déclarations de Cédric O : 

Je ne sais pas si c'est de l'incompétence, de l'inconscience ou de la provocation, mais [Cédric O] parle d'un conseil qui aurait des capacités de sanction, qui sont absolument inadmissibles. Ce n'est pas du tout ce que veut faire le groupe qui s'occupe de faire un conseil de déontologie journalistique. Nous, nous voulons que le public puisse saisir un conseil pour qu'on lui dise s'il y a eu des dérives [déontologiques], s'il y a eu des problèmes. Mais c'est dans un dialogue, et c'est surtout pas dans un système d'interdictions et de censure. Si on considère que le pape est maltraité dans Charlie Hebdo ou au contraire qu'il est trop bien traité dans La Croix, ce n'est pas un problème [déontologique], c'est une ligne éditoriale. Un choix éditorial doit rester complètement libre parce qu'on est dans une société démocratique où le droit à l'information prime avant tout.          
Patrick Eveno, historien des médias et président de l'ODI (Observatoire de la déontologie de l'information) sur France Inter le 26 juin.