Un sommeil d’hiver qui nous réveille

Publicité

Un sommeil d’hiver qui nous réveille

.

Écouter

2 min

Très attendu, le premier film français en compétition. D'abord parce qu'après le sage et presque complaisant Yves Saint Laurent de Jalil Lespert, sorti au début de l'année, voici le portrait non autorisé, et même violemment attaqué par Pierre Bergé, du célèbre couturier. Mais aussi parce que Bertrand Bonello est un des cinéastes français les plus passionnants, et il y a dans chacun de ses plans mille fois plus de cinéma que chez son concurrent. Mais force est de reconnaître qu'on est sorti assez partagé, voire franchement déçu, de ce SAINT LAURENT qui se concentre sur la période 1967-1976. Bonello remplit le cahier des charges de ses producteurs, avec ce qu'il faut de robes et de représentation du travail de création, mais il ne le rend pas très passionnant. Quant à filmer une décennie de liberté et d'excès et le monde de la nuit, il l'a déjà fait, finalement, et en mieux, avec son précédent film, le formidable L'Apollonide .
Pas plus convaincus par le second film de la compétition, d'un des très rares inconnus de la sélection, l'Argentin Damian Szifron, qui avec ses Histoires sauvages raconte six cas de "pétage de plombs", pour reprendre ses mots, ou quand la civilisation cède à la barbarie dans la vie de tous les jours. Souvent très drôle, c'est déjà ça, le film souffre cependant d'une réalisation trop tape-à-l'oeil et de baisses de rythme qui l'empêchent d'être plus qu'un aimable divertissement.

On a adoré en revanche Winter Sleep . C'est vrai qu'un film de 3h16 en turc, ça peut faire peur à certains. Mais ceux qui connaissent et aiment le cinéma de Nuri Bilge Ceylan, un des plus grands cinéastes d'aujourd'hui, attendaient impatiemment ce film, et ils n'ont pas été déçus. Dans les paysages superbes et enneigés de l'Anatolie centrale, avec cette histoire d'un comédien à la retraite qui tient un hôtel, entouré de sa jeune femme et de sa soeur, Nuri Bilge Ceylan, en digne héritier de Bergman et d'Antonioni, sonde les tréfonds de l'âme humaine pour nous parler d'amour, du mal, d'humiliation et de dignité. Le tout avec une puissance de mise en scène qui fait passer ces 196 minutes en un clin d'œil, on en redemande !, et espérer très fortement que le film figure samedi prochain au palmarès.

Publicité