Découvrez ci-dessous de nombreux entretiens sur le photojournalisme (notamment avec Göksin Sipahioglu) et le Festival de Perpignan. Des photographes, des patrons de presse ou d'autres acteurs du secteur.
En guise d'introduction, voilà le reportage de dix minutes, réalisé en direct et en duplex de Perpignan vendredi 5 septembre. Reportage de la rédaction signé Eric Chaverou, interrogé par Florence Sturm :
Une crise du journalisme et du photojournalisme qui vivent un profond bouleversement
10 min
Visa, pour et par qui, pour quoi ?

Depuis huit ans maintenant, aucune autre manifestation n'est analysée à ce point dans la Région.
En effet, à la demande de la Chambre de Commerce et d'Industrie, un cabinet d'études économiques local dresse un bilan annuel des retombées économiques de cet événement.
Qui vient y assister, d'où, avec quelles motivations et quel profit pour la ville ?
En 2007, 940 visiteurs grand public et 200 professionnels ont ainsi été interrogés par l'équipe d'Eric Maurence (4'04") :
Les retombées de Visa pour l'Image
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Autre pierre à l'édifice de Visa pour l'Image, un "Off" qui existe depuis une douzaine d'années et qui se développe de plus en plus. Le 1er Visa d'un jeune photographe

Grand book à l'épaule, il guette au QG du Festival un contact rencontré dans la matinée et qui pourrait bien lui acheter quelques photos.
Antoine Doyen dévisage chacun et scrute les badges dans ses intérêts. Ce Parisien, "par nécessité", vient ici pour la première fois.
A 26 ans, il est passé du portrait au reportage et compte bien profiter d'une semaine dans la capitale mondiale du photojournalisme (2'52") :
"Je suis venu par curiosité et dans l'espoir également de présenter mes sujets en cours et obtenir des pistes, voire des ventes."
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Mais comment réagit-il au thème répété du colloque de cette année à propos de la crise du métier et pourquoi Antoine s'est-il lancé depuis deux ans dans ce qu'il confie lui-même souvent être une "galère" ? (4'07")
"Aujourd'hui, on sait que si l'on ne fait que du journalisme on ne peut pas gagner assez d'argent. On doit travailler à côté dans du corporate, etc. Cela devient militant forcément."
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Gérard Vandystadt vs Jean-François Leroy

Le combat ne date pas de cette année mais le pape français de la photo de sport ne se prive pas de le poursuivre, voire de le relancer.
Le prix World Press 1990 commente avec plaisir le « très très grand Festival » auquel il a participé dès sa création, à l’appel de Michel Decron, le 1er directeur et initiateur de Visa (mort le 25 juillet dernier).
En revanche, l’homme affable et très loquace, qui goûte souvent en voisin le grand rendez-vous de septembre, change de ton lorsqu’il s’agit d’évoquer Jean-François Leroy... (4'51").
"Le seul défaut que j'ai toujours trouvé à Visa pour l'Image, c'est que le sport y ait une portion plus que minimale. Je crois que Jean-François Leroy est sectaire, fermé et ignorant à ce sujet."
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Directeur d’une agence spécialisée, à son nom, pendant 28 ans, avant d’en lancer une nouvelle en 2005, Gérard Vandystadt n’accepte pas « le côté snob » et le « blocage mental » par rapport au sport du chef d’orchestre de Visa. Quant aux différents talents qui pourraient être exposés dans ce domaine, voilà sa réponse (4'25").
"Tout le monde sait par exemple que Philip Plisson est un très grand photographe de voile et je pense que ses photos mériteraient d'être exposées à Perpignan."
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En 2004, dans Paris Match, Jean-François Leroy estimait qu' « Un photographe de sport est un vrai photojournaliste. (...) Malheureusement, je ne vois pas le genre se renouveler beaucoup. » Et « Vandystadt est le seul à avoir vraiment innové. On a fait trois expositions avec lui, mais maintenant il refuse de venir parce qu'il veut être le seul photographe de sport à Visa. ».
A découvrir : La rétro de Jean-François Leroy
Apprendre l'image d'actualité aux jeunes
En 2002, ils étaient 3080. L'an dernier, 6295. En six ans, le nombre d'élèves participant au stage conjoint du CLEMI* et de Visa pour l'Image a augmenté de plus de 100% Et sur 100 établissements concernés en 2007, 27 venaient même d'hors du département. Un succès tel que cette année, Visa sera même ouvert une troisième semaine uniquement pour les scolaires. Christian Ture est délégué départemental du CLEMI*. Il nous décrit ces sensibilisations auprès des plus jeunes, majoritairement lycéens. (6'56")
"Il s'agit avec Visa pour l'Image pour support de favoriser l'expression des élèves et de développer leur esprit critique. Car nous avons souvent peu de recul face aux images d'actualité."
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*Centre de Liaison de l'Enseignement et des Médias d'Information
Joël Robine : un grand nom passé à son compte

Prix World Press en 1993 pour la photo d'un enfant somalien, cet illustre reporter a fait les grandes heures de l’Agence France-Presse.
De 1978 à 2005, il en deviendra l'une des plus grandes signatures. Au front au Liban, au Tchad ou en Afghanistan mais aussi observateur de la famine en Éthiopie, de cyclones en Amérique centrale ou des transformations à l'Est. Mais ces dernières années, Joël Robine voit s'organiser et s'institutionnaliser un métier avec désormais pour priorité la rentabilité.
Il quitte donc l'AFP pour créer sa propre société « Place aux Images » et travaille en indépendant, redevenu "le jeune photographe d'avant". (3'55") :
"A l'AFP, je ne me sentais plus du tout à ma place, on faisait surtout de l'institutionnel. C'est pour cela que je suis parti et maintenant je cherche à m'autofinancer via de grosses entreprises."
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Joël Robine s'attriste de l'emprise désormais des financiers et du marketing, ainsi que du développement de la photo d'amateurs. "Avant, il y avait une histoire, une âme du photographe de presse, maintenant, elle a disparu pratiquement." (5'34") :
"Les agences ont redistribué les cartes avec les banques d'images, d'images numériques d'amateurs. Cela ne leur coûte pas trop cher et c'est comme cela que le métier de grand reporter disparaît."
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Le regard de Göksin Sipahioglu

Sa carrure de basketteur est à l’égal de sa carrière : celle d'une légende vivante du photojournalisme ! A plus de 80 ans, celui qui expose cette année ses images de 1968 nous reçoit dans un salon de l’hôtel cossu qui héberge les stars de Visa.
Le plus français des photographes turcs confie son expérience de photographe mais surtout de fondateur et d’âme de l’agence dont il fut propriétaire pendant un peu plus de trente ans : SIPA.
Une référence mondiale où ont notamment débuté Reza, Abbas, Luc Delahaye ou Alexandra Boulat.
Et pour celui qui fut aussi directeur d'un quotidien en Turquie, il faut aujourd'hui aller de l'avant (3'35").
"Ce n'est pas aussi facile qu'avant. Mais il faut sauter sur le problème et marcher !"
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Impossible aussi de ne pas demander à l'un des plus importants visionnaires du métier son idée de l'avenir (2'29").
"Il faut trouver des idées et avoir des relations, que les gens vous connaissent. Et il y aura un autre marché de la vidéo."
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Polka : un magazine, une exposition et un site pour le photojournalisme

C'est d'abord une histoire de famille. Y compris ce nom : celui d'un de leurs chiens !
On connaissait Alain Genestar , le père, ancien directeur de Paris-Match et du JDD.
Le voilà qui défend avec ses enfants, Edouard, Victor et Adélie un concept inédit lancé fin novembre dernier.
Un magazine revendiqué comme "la revue du photojournalisme" (au sens large). Mais indissociable d'une galerie d'exposition des clichés publiés (charmante, rue Oberkampf) et d'un site web. (7'04")
Alain Genestar raconte la genèse de Polka dans "une période révolutionnaire", en s'appuyant sur 3 médias
7 min
Selon Alain Genestar, les deux premiers numéros tests ont abouti à un équilibre financier. Avec pour le deuxième, 25.000 exemplaires diffusés et tout vendu dans les gros dépôts (Relais H). Sans oublier pour l'exposition n°2, 70 photos vendues. Le 23 octobre, sortie annoncée du n°3 et lancement officiel de ce qui devrait devenir bimestriel, avec plus uniquement des figures de la photo. Malgré de bons échos des annonceurs, les Genestar sont en quête d'investisseurs. Mais économiquement parlant justement, l'ancien poids lourd de Lagardère pense-t-il que le photojournalisme soit en danger de mort ? (2'08")
Alain Genestar : "Le photojournalisme n'est pas en danger de mort, mais les photojournalistes sont davantage victimes de profonds bouleversements que les journalistes de texte."
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Le défi de XXI

"En janvier dernier, on nous prenait pour des dingues. Aujourd'hui, certains, au sein de grands groupes de presse commencent à nous citer en exemple". Ancien reporter de haute-volée du Figaro, Patrick de Saint-Exupéry s'enthousiasme dans un son petit bureau du Quartier latin de son bébé lancé avec Laurent Beccaria. Il revendique la singularité de cette nouveauté dans la presse française : un trimestriel de 210 pages vendu en librairie et sans pub pour une "information en grand format".
Et d'insister sur une nécessaire remise en question et renaissance du journalisme pour aller au-delà du constat de la crise. Un pari sur les lecteurs et un temps de la réflexion en contrepoint d'une information de flux grandissante (4'58")
Patrick de Saint-Exupéry explique comment le public devrait faire vivre la revue XXI
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Quant à la photo, c'est l'une des trois composantes importantes de ce tremplin à récits, jusqu'ici à l'équilibre et avec une diffusion en moyenne de 25.000 à 30.000 exemplaires. (3'02")
Quelle place pour la photo dans la revue XXI ?
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Une agence à scoops pour les amateurs

"Partagez et vendez vos images d'actualité". Voilà le slogan de CitizenSide. D'abord baptisée Scooplive, cette agence photo est née en 2005. Mais elle s'est faite connaître en début d'année grâce à une exclusivité mondiale : la première photo de Jérôme Kerviel, lors de son audition à la Brigade financière de Paris. Un anonyme vivant en face est tout simplement passé par ce site participatif pour au final empocher plus de 20.000 euros.
L'affaire a fait grand bruit mais a aussi encore accru les contributeurs à ce site. Un rédacteur en chef a donc été très vite nommé pour cadrer cette activité bouillonnante.
Ancien correspondant en Asie et notamment au Japon de TF1 et LCI, c'est Aurélien Viers . (6'46")
"Mon rôle est de vérifier ces images d'internautes, de voir leur intérêt et si oui de les vendre aux médias."
6 min
Aujourd'hui, selon Aurélien Viers, le site reçoit entre 20 et 50 séries de photos par jour et reverse jusqu’à 75% du montant des ventes sur une photo au contributeur, mais plus généralement 65% en France, et 50% à l’étranger. Quant aux critiques déontologiques, le jeune rédacteur en chef sourie en évoquant son nombre grandissant de clients, l'achat de 34% des parts de la société par l'AFP (en décembre) et un phénomène qu'il vaut mieux contrôler qu'ignorer. (8'33")
"On ne remplace pas reporters, photographes, caméramans. C'est un tout autre métier. Nous, c'est un amateur, un particulier qui tombe sur un événement par hasard et qui va diffuser cette image."
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Visa pour les images, mais pour quel métier ?
Notre dossier complet complet à l'occasion de cette nouvelle édition du Festival.
Réaction de Didier PILON 24.08.2010
Bravo pour cet instantané très pertinent de la situation du journalisme photographique actuel, particulièrement pour le choix des "interviewés". Comme Gérard VADYSTADT, je regrette que le sport ne soit pas plus présent à VISA, mais le paradoxe semble être de mise dans un secteur ou certains succès naissants semblent bâtis sur les cendres d'une qualité de photojournalisme disparue au nom de modèles financiers plus profitables aux actionnaires qu'aux consommateurs d'images d'auteurs. Oui, ces exceptions semblent apporter quelques notes de couleurs chaudes dans ce monde gris cendre qui entoure des professionnels de grand talent, qu'ils soient reconnus ou émergents, pour lesquels la perspective de gagner normalement leur vie ne semble envisageable qu'avec des photos, de préférence racoleuses, de "peoples" de carton-pâte volées au détour d'une plage ou d'un shopping aux USA. Espoir ou dernier soupir ? Il me semble que mieux vaudrait pour notre santé intellectuelle que ce soit à une renaissance que nous assistions à travers les pages, papier ou web, de magazines tels que "XXI" ou "Polka", histoire d'éviter une édition actualisée de "1984".