Zola avant la "non-fiction": découvrez les carnets d'enquête de l'écrivain
Par Chloé Leprince
Alors que sort au cinéma "Ouistreham", adapté du récit de Florence Aubenas "Le Quai de Ouistreham" paru en 2010, découvrez un livre qui fascine la journaliste devenue une référence en littérature de non-fiction : "Les Carnets d'enquête d'Emile Zola". Passionnants et inspirants.
Parmi ses références littéraires fétiches à la croisée du réel et du récit, du reportage et de la fiction, Florence Aubenas cite Georges Simenon - Belge comme elle -, Honoré de Balzac, et puis Émile Zola. Qui, bien sûr, avait d’abord été journaliste avant de devenir le grand écrivain des trois dernières décennies du XIXe siècle. L’autrice du Quai de Ouistreham, en 2010, et de L’Inconnu de la poste, en 2021, évoque en particulier un livre, incroyable, dont la sortie en librairie remonte à trente-cinq ans.
La journaliste raconte être tombée dessus par hasard chez un bouquiniste. Or ce livre est une vraie pépite, bien que méconnu. L’ouvrage s’intitule Carnets d’enquête - Une ethnographie inédite de la France et on le doit, en 1987, à Henri Mitterand, le grand historien d’Emile Zola, qui vient de mourir à l’automne 2021. Il avait paru alors dans la collection “Terre humaine”, chez Plon, et ce n’était pas rien en soi : “Terre humaine” étant dirigée depuis 1954 par l’anthropologue Jean Malaurie, les brouillons, croquis et autres notes préparatoires de Zola y gagnaient la reconnaissance d’un matériau d’enquête anobli, soudain considéré comme intéressant en soi. Polyphonique bien sûr, les mots “matériau d’enquête” puisent à la fois dans le journalisme et dans le travail de terrain des chercheurs en sciences sociales. Et, de l'œil aux mots, voilà Zola ethnographe, et son œuvre littéraire travaillée par le réel. Autant que les écheveaux d'histoire sociale qu'ils nous a laissés portent l’empreinte de son écriture.
Difficile à trouver à présent qu’il est épuisé de longue date, on le déniche encore ici ou là, d’occasion. Et alors il ne faut pas hésiter, car ce livre porte la trace incroyablement précieuse, et féconde, de la manière dont travaillait Emile Zola. Mais aussi de ce qu’il avait pu glaner, au ras de mondes sociaux incroyablement divers, et denses, en compilant des modes de vie, des façons de faire, des techniques ou des habitudes et encore tant de détails sur des villes, des campagnes et puis, aussi, la mine. Ainsi ces notes compilées sur plus de 430 pages où butiner sont-elles loin de parler seulement aux amateurs du grand romancier du XIXe siècle, mort en 1902 à Paris, ou aux érudits littéraires. Parce qu’il dévoile une véritable ethnographie en train de prendre corps, ce recueil est aussi un document historique à la portée considérable, en même temps qu’une inspiration pour plonger aux racines de ce qu’on appelle désormais la non-fiction.
Apprendre à voir pour savoir écrire
Si c’est Truman Capote, Bruce Chatwin ou Ryszard Kapuściński qui, souvent, viennent parmi les premières références en matière de littérature du réel, se remettre dans les pas et les mots de Zola en cours de travail offre une plongée dans un matériau à la fois délicat à définir, et très fécond. Presque obsessionnel parfois, et à tout le moins, fabuleusement empirique. Parce qu’à lire la documentation colossale qu’il rassemblait, les entretiens qu’il menait pour apprendre et préciser son regard, et, enfin, les notes qu’il prenait sur place, on pourrait dire “on y est”. Mais plus encore, on comprend soudain pourquoi, en lisant les romans de Zola, au fond nous y étions déjà. Là où lui avait mis ses pas, là où lui avait surtout posé son regard. Car Emile Zola avait appris à voir.
Au sujet de La Bête humaine, dix-septième volet de la série des Rougon-Macquart, le journaliste devenu écrivain avait noté : “C’est le progrès qui passe”. Une fois achevé, le roman nous plongera au cœur de la gare Saint-Lazare, dans le froid piquant de l’aube et nous voilà, au milieu des becs de gaz plantés le long du trottoir. Dans ce roman tel qu’il paraîtra en 1890, on lit : “Une averse venait de cesser, il en restait un souffle d’une humidité glaciale, épandu par ce vaste espace découvert, qu’une brume reculait jusqu’aux petites lueurs pâlies des façades de la rue de Rome. Cela était immense et triste, noyé d’eau, çà et là piqué d’un feu sanglant, confusément peuplé de masses opaques, les machines et les wagons solitaires, les tronçons de trains dormant sur les voies de garage ; et, du fond de ce lac d’ombre, des bruits arrivaient, des respirations géantes, haletantes de fièvre, des coups de sifflet pareils à des cris aigus de femmes qu’on violente, des trompes lointaines sonnant, lamentables, au milieu du grondement des rues voisines. Il y eut des ordres à voix haute, pour qu’on ajoutât une voiture. Immobile, la machine de l’express perdait par une soupape un grand jet de vapeur qui montait dans tout ce noir, où elle s’effiloquait en petites fumées, semant de larmes blanches le deuil sans bornes tendu au ciel.”
Mais avant ce texte définitif, il y avait eu un texte préparatoire, qui figure dans les carnets de l'écrivain. Car Zola avait fait, par exemple, le trajet Paris-Mantes sur la plateforme d’une locomotive à vapeur pour s’imprégner de l’expérience de Jacques Lantier, son héros mécanicien sur la ligne Paris-Le Havre. Une cinquantaine de kilomètres au plus près des trépidations de la machine et… vingt-neuf pages de notes à hauteur de machiniste. Bien souvent, il y a ainsi chez Zola une œuvre tapie sous l’œuvre. Et ce soir-là, le 15 avril 1889, il avait écrit ceci dans ses carnets préparatoires, après cet aller-retour à Mantes, hissé sur la locomotive : “Le chauffeur comme son nom l’indique, a la charge surtout de mettre du charbon dans le foyer. Il en met peu à la fois, en morceaux moyens, d’une couche bien égale, et partout, dans le coin, de façon à ce que la grille soit bien couverte, qu’il n’y ait pas de passage pour l’air ? La porte peut être ouverte à moitié grâce aux crans de la crémaillère. La porte devient violette. Dans la nuit, elle doit être rouge.”
Dans ces notes, profuses et disparates, qu’il griffonnait sur des feuillets de deux tailles différentes et souvent remettait au propre le soir venu, on trouve, ailleurs encore, l’histoire d’un trajet poussif en train, comme une litanie d’avaries : Emile Zola avait consigné le récit d’un certain Lefèvre. Dans les chemins de fer lui aussi, cet ingénieur lui avait confié s’être retrouvé coincé sous la neige, à l’hiver 1879, lorsqu’il avait fallu déblayer la locomotive sous les cris des voyageurs, et Zola avait tout enregistré. C’est ainsi l’ensemble de ces notes, y compris des croquis et la documentation qu’il se faisait envoyer tout au long de son processus d’écriture par des informateurs privilégiés, qui nourrit ce qui restera chez Zola comme l’art d’écrire des “faits vrais”... jusqu’en littérature. Pour Plassans, la ville natale d'Adelaïde Fouque et le berceau des Rougon-Macquart, il s'inspirera par exemple d'Aix-en-Provence, où il avait vécu. C'est ce que montre par exemple ce plan de la main du romancier, qu'on trouve encore dans les carnets :

Zola signera quantité de textes de réflexion sur son travail et ses parti-pris littéraires, à partir de 1868 et cette préface théorique dont il rehausse la deuxième édition de Thérèse Raquin. Au fil de ces textes qui restent comme autant de manifestes, il se décrit comme “naturaliste” plutôt qu’en romancier “réaliste”. Plus tard, Henri Mitterand aura à cœur de montrer combien il ne faudrait pas s’en tenir trop tôt à cette étiquette à quoi on l’a peut-être figé un peu vite, là où lui, le spécialiste immergé dans cette œuvre aux milliers de pages, voyait aussi l’écrivain romantique et les digressions du rêveur.
Zola, et le prestige des sciences
Malgré tout, toute l'œuvre de Zola est irriguée par cette perception que l’écrivain avait de lui-même en encyclopédiste du réel. Scientiste, il était un auteur célèbre d’un siècle qui justement voyait la science se parer d’un prestige nouveau. Zola, qui d’ailleurs prêtera son propre corps à l’examen scientifique, témoigne de ce mouvement en même temps qu’il l’accompagne. Il l’incarne, et ses notes en sont la trace matérielle : on y retrouve par exemple l’influence d’Hippolyte Taine ou de Claude Bernard, que Zola avait lus passionnément. Et lui qui écrit, dans Le Roman expérimental, “nous continuons, par nos observations et nos expériences, la besogne du physiologiste, qui a continué celle du physicien et du chimiste” avait dévoré par exemple les premiers traités sur l’hérédité, et des travaux sur “le tempérament” dont il irriguera toute une partie de son œuvre. Il devient ainsi un témoin de l’état de la science en train de se faire, en même temps que de la société française dans ses différentes strates.
Au point qu’à un siècle et demi de distance, c’est encore dans son œuvre qu’on plonge pour accéder, au plus près, à une infinité de mondes sociaux aussi variés que vivants. Il reste celui qui nous restitue le plus finement les trois dernières décennies du XIXe siècle : c’est chez lui que la France prend corps à une époque où les sciences de la société étaient loin de faire leur miel de descriptions au peigne fin ou de s'ouvrir aux menus détails de la vie ordinaire. Mais Zola n’était pas seulement l’image un peu caricaturale restée dans les mémoires. Ce que Henri Mitterand a si bien su rendre palpable, en 1987, en publiant les carnets de l’écrivain au ras des brouillons et de son travail de repérage, c’est que noter et décrire, même à ce stade du carnet personnel, était déjà un acte d’écrivain. Et même, une écriture en soi. Que donc le réel n’existe ici que parce qu’il est gravé dans sa rétine, et retranscrit par lui, même à la volée.
"Pas de luxe en somme"
L'œil, ici, a une portée considérable. En particulier, le cadrage, chez cet amateur qui se passionnera pour la photographie en train de se démocratiser : c’est bien son regard à lui, l’ancien publicitaire du groupe Hachette au début des années 1860, qu’on suit au fil des pages de notes qu’il noircissait compulsivement. Ses carnets recèlent des centaines de descriptions comme celles du quartier des Halles, qu’il avait arpenté sous toutes les coutures. Par exemple, cette description du côté des maraîchers : “Les pavillons ne sont pas tous pourvus de la même toiture. Le 3 et le 4 ont trois toitures superposées ; les 5 et 6, deux…” Mais alors qu’il se rapproche du Louvre, à deux pas, et quelques pages plus loin dans ses notes, on lit encore : “Pas de luxe en somme, petite bourgeoisie, assez mal mise, étriquée. Même des femmes avec des paniers et des femmes en cheveux, que le voisinage des Halles doit amener. Quelques femmes seules, beaucoup deux par deux.” C’est un regard photographique qui paraît se dévoiler sous nos yeux, 150 ans plus tard : Zola faisait du repérage - comme on le dit d’un cinéaste.
Et c’est ce regard qui permet de comprendre le décalage qui se crée entre documentation et réel à plat, et ce qu’il a pu en faire au fil de son œuvre prolixe. Le naturalisme ne court-circuite pas le point de vue. Ainsi Zola ne se vivait-il pas seulement en concurrent des encyclopédistes (même si c’était le cas). Il avait appris à regarder en fréquentant assidûment les ateliers des peintres et les salons des amateurs d’art, entre 1860 et 1880. Manet, qu’il admirait par-dessus tout, avait en particulier ciselé chez lui un regard comme une façon de savoir voir. Et c’est une écriture par plans pareille à la construction d’une toile du peintre qu’on redécouvre par exemple dans Thérèse Raquin. Or c’était déjà là, dans ses notes, une habitude : dans le dossier préparatoire de L’Assommoir, dix ans plus tôt, Henri Mitterand a trouvé, parmi quantité d’autres, des feuillets aujourd’hui conservés à la Bibliothèque nationale, où on lit des choses comme : “Femmes en cheveux courant pour le dîner, panier sur la main, les petites filles avec un pain. Des hommes parlant fort avec des hommes marchant vite.” Et, un peu plus loin encore dans les carnets : “Paris qui allume son gaz. Le ciel. Les mains dans les poches. Fontainier avec sa trompette. Tout seul, ou en groupes. Des peintres avec leurs pots à peinture. Des hommes traînant des voitures avec bretelles. Les ceintures rouges.” Ailleurs encore, le zoom s’attarde du côté des cuisines : “Le café se sert dans une petite tasse bleue sans anse, où se trouve à l’avance un morceau de sucre. La soupe aux choux se sert dans des tasses jaunes plus grandes”.
Ainsi comprend-on encore mieux pourquoi Zola, certes journaliste de profession mais surtout auteur de fiction, marque d’une telle empreinte celles et ceux qui 150 ans plus tard s’essayent à ce qu’on appelle désormais “la littérature de non-fiction”. Pénétrer dans ses carnets, c’est en effet accéder à la manière dont son expérience des lieux a façonné son travail. Une expérience physique, réelle, météo comprise - l’écrivain noircit de centaines de commentaires ses carnets au sujet du temps qu’il fait. Si sa manie documentaire a plus souvent été commentée, cette présence les deux pieds dans le réel apparaît comme une clef de voûte. Interrogé par le journal local L_e Petit Ardennais_, alors qu’il était venu à Sedan avec sa femme, en avril 1891, préparer ce qui sera son roman de 1892 La Débâcle, Zola lui-même en dira ceci : “J’ai une masse de documents excellents. Voyez-vous, il y a deux façons de prendre des renseignements. La première consiste à se renseigner longuement, à visiter un pays par petites étapes, en s’installant même au milieu des habitants pour vivre leur propre vie. La seconde – c’est la mienne – consiste à passer dans un pays rapidement pour en emporter une impression rapide, logique, intense.”
Habillé en mineur, au fond de la fosse pour Germinal
Et c’est sans doute à cette intensité-là que les carnets nous donnent accès - plus encore qu’à leur précision documentaire, ou à la granularité si fine de ses observations. Car au fond Zola ne cessera jamais d’être un romancier. A Anzin, où il se rendra comme il en avait l’habitude, pour découvrir la mine, et arpenter des maisons ouvrières, les cabarets et les estaminets, il descendra bien dans une fosse pour palper le grisou, et se baisser comme le faisaient les mineurs. Deux minutes pour descendre à plus de quatre cent soixante-seize mètres : “Au jour, quand on voit, sensation d’enfoncement, de fuite sous vous, par la disparition rapide des objets. Puis une fois dans le noir, plus rien. Monte-t-on, descend-on ? […] Il y a comme des immobilités quand la cage file droit sans toucher aux guides. Puis, de légères secousses, un dansement dans les guides, des heurts (inquiétude) […]. Enfin, on est au fond, la cage s’arrête.”
Zola, le citadin bourgeois qui a revêtu la tenue de mineur pour descendre, passera en tout huit jours à Anzin en 1884. Il y a notamment pour chaperon un professeur d’université de Lille qui se trouve aussi être député socialiste de Valenciennes… et un zoologiste féru d’anatomie. Dans ses notes de terrain, il décrit aussitôt “les formes s’agitant dans la nuit fumeuse. Les voix étouffées. Tout est noir. Il faut se traîner à quatre pattes dans une forte chaleur”. Une grève éclate au cours du bref séjour d’Emile Zola à Anzin, qui infléchira l’image bourgeoise et sa part de frisson sanguinaire que l’écrivain parisien avait pu se faire d’un soulèvement ouvrier avant d’arriver. Douze mille mineurs s’étaient mobilisés contre les usiniers cette année-là, et un an plus tard, lorsque paraîtront les premiers comptes-rendus sur Germinal dans la presse, certains crieront à la diffamation. Emile Zola leur répondra par lettre ouverte interposée : sur le travail des femmes, sur les grèves sanglantes, sur les salaires, sur la promiscuité, ou les enfants naturels, il “maintient absolument la vérité générale des mineurs mis en scène”, écrit-il. Puis ceci : “Qu’on ne me contredise pas avec des raisons sentimentales ; qu’on veuille bien consulter les statistiques, se renseigner sur les lieux, et l’on verra si j’ai menti. Hélas ! j’ai atténué [...] Pourquoi veut-on que je calomnie les misérables ? Je n’ai eu qu’un désir, les montrer tels que notre société les fait, et soulever une telle pitié, un tel cri de justice, que la France cesse de se laisser dévorer par l’ambition d’une poignée de politiciens, pour s’occuper de la santé et de la richesse de ses enfants.”
Anzin est une toile de fond, et une substance du côté du vrai. Mais, en réalité, Germinal alors est déjà écrit aux deux-tiers environ, lorsque Zola se rend sur place. Il a même trouvé le titre depuis quelques jours, et en parle comme d’une fulgurance lumineuse. Ainsi comprend-on qu’il aura davantage irrigué sa trame de ses observations sur place qu’il n’aura transformer en substance romanesque une documentation plate et besogneuse.
Et c’est sans doute aussi pour ça qu’on découvre, dans la correspondance de Zola, des lettres où il écrit par exemple, depuis Chartres, et tandis qu’il s’attèle à son roman La Terre, en 1886 : “Je suis ici depuis hier, et tiens le coin de terre dont j’ai besoin. C’est une petite vallée à quatre lieues d’ici, dans le canton de Cloyes. Entre le Perche et la Beauce, et sur la lisière même de cette dernière. J’y mettrai un petit ruisseau se jetant dans le Loir, – ce qui existe d’ailleurs ; j’y aurais tout ce que je désire, de la grande culture et de la petite, un point central bien français, un horizon typique, très caractérisé, une population gaie, sans patois. Enfin le rêve que j’avais fait.” S’adressant quelques années plus tôt à ce même ami qu’il venait de charger de lui fournir “un document exact”, il avait aussi écrit dans une autre lettre : “Ne cherchez pas davantage un masque de variolique, mon siège est fait, et j’en suis si content que je ne le corrigerais pas, même sur des documents exacts”.
On sait que Zola conservera cette habitude du repérage tout au long de sa vie d’écrivain. Malgré tout, les notes préparatoires à certains romans manquent aujourd’hui. Toutefois, une partie de ce qui concerne le cycle des Rougon-Macquart a plutôt bien survécu au temps et à l’éparpillement. Pas toujours numérotés, les feuillets furent parfois difficiles à reconstruire. Mais pour ses “Notes sur le Bon Marché”, qui seront mises à profit dans l’écriture de Au Bonheur des Dames, Zola avait carrément créé une arborescence qui guide dans ces repérages ventrus : 307 feuillets au total pour l’enquête documentaire sur place et autant de “choses vues” bien classées (“vendeuses”, “vendeurs”, “la Direction”...), là où le travail en amont sur les personnages occupe seulement 70 feuillets. Du plan des étages à l’histoire du magasin en passant par l’échelle des salaires, les horaires, les techniques d’inventaire, les achats, l’étalage, la surveillance ou les habitudes alimentaires à la cafétéria, on retrouve ainsi de quoi esquisser les bribes d’une sociohistoire du Bon Marché à l’époque. Ce sont autant de chaluts lancés vers le réel. Et déjà une écriture.
