

Face à la menace sur l'approvisionnement en gaz russe, les pays d'Europe, plus ou moins dépendants, cherchent à diversifier leurs approvisionnements et les infrastructures gazières.
L'Europe devra-t-elle faire sans le gaz russe cet hiver ? Le groupe Gazprom a déjà cessé ses livraisons à certains fournisseurs comme le Français Engie. De nombreux pays européens qui dépendent de ces approvisionnements cherchent des alternatives pour affronter le froid sereinement. Exemple en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas.
Depuis plusieurs mois, l'idée de relancer le gazoduc MidCat est défendue en Espagne. Le MidCat, pour Midi-Pyrénées-Catalogne, un gazoduc qui relierait Barcelone à Carcassonne, et abandonné en 2019. À l'époque, ce projet, estimé à trois milliards d'euros, était jugé trop cher. Son impact sur l'environnement était aussi pointé du doigt. Depuis, la donne a changé avec la guerre en Ukraine, et la péninsule ibérique souhaite désormais sortir de son isolement énergétique. Avec ce gazoduc, l'Espagne pourrait faire remonter du gaz algérien vers le nord de l'Europe, mais surtout envoyer du gaz naturel liquéfié. Le pays compte parmi les meilleures infrastructures d'Europe avec six ports méthaniers, dont le plus grand à Barcelone.
"L'Espagne est absolument obsédé avec le MidCat, confirme Ignacio Cembrero journaliste, spécialiste des questions d’énergie. L'Espagne a une grande capacité de régazification, mais ces centrales sont un peu sous-utilisées. Ce serait donc l'occasion ou jamais de s'en servir pleinement". Pour se faire entendre en Europe, l'Espagne mène un intense lobbying auprès de Bruxelles. Elle a obtenu le soutien de la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen et du chancelier allemand Olaf Scholz. Le gouvernement français, lui, ne veut pas de cette infrastructure même s'il n'a pas complètement fermé la porte. L'Espagne pourrait aussi chercher une alternative du côté de l'Italie, avec un gazoduc sous-marin entre Barcelone et Livourne.
L'Italie multiplie les sources d'approvisionnement
L'Italie est l'un des pays européens qui dépend le plus de Moscou. 95% des ressources énergétiques y sont importées et 40% de son gaz venait de Russie avant le début du conflit. Une véritable sujétion qui est une "erreur" et qui n'est "plus tolérable" avait déclaré le président du Conseil, Mario Draghi, dès le début du conflit en Ukraine. Avec son ministre des Affaires étrangères, ils se sont immédiatement lancés dans une tournée diplomatique au printemps pour multiplier et diversifier les sources d'approvisionement. Des contrats ont été passés avec le Congo, l’Angola, le Mozambique, l’Azerbaïdjan et le Qatar, mais surtout avec l’Algérie. Le deuxième fournisseur de l’Italie détrônera la Russie en augmentant le volume annuel actuel de deux milliards de mètres cube. De quoi réduire la dépendance au gaz russe de 40 à 18%. Le ministre de la Transition écologique, annonce une "indépendance totale du gaz livré par Moscou d’ici 2024".
Cet objectif est réalisable à la condition que l'Italie réussisse à achever au plus vite l'installation de deux nouveaux terminaux méthaniers flottants, qui lui permettront d'augmenter ses importations de gaz naturel liquéfié, notamment en provenance des Etats-Unis. Actuellement, l'Italie dépasse les 80% de ses capacités de stockage de gaz et son objectif est d'atteindre les 90% en octobre. En attendant, le gouvernement préfère parler de plan d'économies d'énergie plutôt que de rationnement. Allumer les enseignes commerciales après 23 h sera bientôt interdit, l'éclairage public sera réduit de 40%. Une vaste campagne pour sensibiliser l'opinion publique à la sobriété sera aussi lancée.
Les Pays-Bas importaient de Russie 15% de leurs besoins en gaz, soit 10% de leur consommation en énergie. Il reste encore un peu de gaz russe dans les pipelines, mais la majeure partie n'est plus là. Le principal fournisseur du pays s'est vu couper le robinet par Gazprom dès le mois de juin. La centaine de municipalités qui avaient des contrats avec Gazprom sont censées y renoncer avant le 10 octobre, en vertu des sanctions européennes, mais elles ne trouvent pas de fournisseurs alternatifs. Des mesures ont donc été prises dès le printemps.
D'abord, il a été décidé de relancer l'exploitation du gisement gazier qui se situe dans le nord du royaume à Groningue, et dont la fin d'exploitation était prévue cet été. Il représentait il y a quelques années 20% de la production propre de l'Union européenne. Tout aussi controversé, la décision de relancer des centrales à charbon qui avaient interdiction de fonctionner à plus de 35% de leur capacité.
À plus long terme, les Néerlandais ont choisi de développer trois axes : la relance du nucléaire avec le passage d'une à trois centrales, une nouvelle exploitation gazière au large de la mer des Wadden et un projet de parc éolien géant en mer avec le Danemark et l'Allemagne pour en faire la "centrale électrique verte de l'Europe".
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