À Bornéo, une huile de palme plus respectueuse de l'environnement est-elle possible ?
Par Sandy DauphinDéforestation massive, conditions de travail lamentables... Sous la pression des des ONG et des consommateurs, la filière huile de palme tente d'instaurer de meilleures pratiques. Reportage à Sabah, sur la partie Est de Bornéo. Cet État de Malaisie fournit à lui-seul 12 % de la production mondiale.
Sur la route qui mène au village de Sukau sur la côté est de Bornéo, les palmiers à huile s'étendent à perte de vue de chaque côté de la chaussée. Sur le bitume, des files de camions chargés de fruits de palmier font des aller-retours entre les plantations et les moulins à huile.
Abdul Rahim Wilsom Benabula dirige l'une des 14 plantations du groupe Genting dans l'État de Sabah. Cette plantation de 3 500 hectares qui emploie 465 personnes est labellisée "huile de palme durable", la certification internationale RSPO créée en 2005. "C'est une fierté de produire une huile de palme durable" explique le manager lors d'une visite menée en grande pompe. "N_ous avons des critères très stricts en matière de droit du travail et environnementaux_".
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Aujourd'hui ce genre de plantation est une vitrine pour des marques comme Nestlé, Ferrero ou Unilever soucieuses de la bonne image des pots de Nutella, barres chocolatés Kit-kat ou encore des savon Dove auprès des consommateurs. Les multinationales ont entendu le message des ONG, affirme Laure Grégoire, porte-parole de l'Alliance pour la préservation des forêts, qui regroupe une dizaine d'entreprises agroalimentaires et de cosmétiques : "Les campagnes des ONG ont été éminemment utiles pour nos entreprises pour qu'elles prennent conscience des problèmes qu'il y avait sur l'huile de palme qu'elles achetaient. Ça nous a obligé à aller voir les planteurs, à exiger le respect de garanties telles que la préservation des forêts, des conditions de travail décentes pour le travailleur et la protection des espèces animales".
Mais pour l'instant la certification RSPO n'a pas permis de stopper la déforestation. Certaines multinationales ne respectent pas toujours leurs engagements. Et la ruée vers le palmier à huile, 30 % plus rentable que la culture du riz est difficile à encadrer dans un pays où 40 % de la production est assurée par des petits planteurs, plus soucieux d'envoyer leurs enfants à l'école que d'obtenir un label de bonnes pratiques. Pour Greenpeace, si la filière durable est loin d'être parfaite elle a quand même le mérite d'exister. D'autant que les critères de labellisation viennent d'être durcis. Grant Rosemond, représentant de Greenpeace en Asie du Sud-Est : "Greenpeace ne soutient pas l'idée d'un moratoire ou d'un boycott. S'il y a de l'huile de palme propre nous la soutenons. En revanche, on fait du lobbying intense contre l'huile de palme sale, celle qui est associée à la déforestation". En ligne de mire de l'ONG, un nouveau marché, l'huile de palme pour les agrocarburants, "l'ampleur de la déforestation pour les agrocarburants est un désastre nous pensons que l'huile de palme doit servir à l'alimentation, pas aux agrocarburants".
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Message qui passe mal auprès des autorités malaisiennes. Wilfred Madius Tangau est le numéro deux de l'État de Sabah. Et il est remonté contre ce qu'il appelle les donneurs de leçons européens : "Les gens sont mal informés. Même les gens instruits passent plus de temps à lire des choses sur les orangs-outans que de d'essayer de comprendre le secteur de l'huile de palme. Il a permis de lutter contre la pauvreté. Vous connaissez beaucoup de pays en Europe qui sauvegardent 50% de leur forêt ? Ici c'est le cas".
L'huile de palme durable demeure un marché de niche
Aujourd'hui la filière durable de l'huile de palme représente moins de 20 % de la production mondiale. Le risque est qu'elle demeure un marché de niche, du sur-mesure pour les Européens sensibilisés aux enjeux environnementaux. "L'Europe ne fait pas le marché, elle se cantonne à une dizaine de pourcents du marché" explique Alain Rival, directeur régional pour l'Asie du Sud Est du Cirad. Le centre français de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement conseille la filière huile de palme pour qu'elle adopte de meilleures pratiques agricoles, elle vend aussi des semences : "Le défi maintenant, c'est de convaincre les gros acheteurs, ceux qui font le marché, l'Inde, le Pakistan, la Chine que cette évolution de pratiques, elle est bonne pour eux".
Un gain de productivité, des petits planteurs mieux encadrés, de meilleures normes de sécurité pour les travailleurs. "Il faut que la durabilité devienne une norme universelle et pas seulement une norme européenne."
La survie de ce qui reste de la forêt en dépend, celle des orangs-outans aussi, victimes de la déforestation, mais aussi de la chasse. En l'espace de 15 ans, on estime que 100 000 orangs-outans ont disparu à Bornéo.
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