Accès direct aux kinés et infirmiers : pourquoi la loi Rist fait bondir les médecins généralistes ?

Publicité

Accès direct aux kinés et infirmiers : pourquoi la loi Rist fait bondir les médecins généralistes ?

Par
La loi Rist propose de donner plus de missions aux infirmiers.
La loi Rist propose de donner plus de missions aux infirmiers.
© AFP - Pascal Bachelet / BSIP via AFP

La loi de la députée Renaissance Stéphanie Rist, adoptée jeudi en première lecture à l'Assemblée nationale, vise à donner un accès direct à certains infirmiers, kinésithérapeutes et orthophonistes. Un texte auquel s'opposent fermement les médecins généralistes.

Tandis que six millions de Français n'ont pas de médecin traitant, cette proposition de loi doit permettre de simplifier l'accès aux soins. Le texte de la députée Renaissance du Loiret Stéphanie Rist, a été votée à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée nationale jeudi 19 novembre, avec l'abstention du RN et de LR. Il vise à donner un accès direct à certains infirmiers, kinésithérapeutes et orthophonistes.

Mais ce texte ulcère les médecins généralistes au moment même où ceux-ci négocient leurs tarifs de consultation pour les cinq années à venir. Ils dénoncent "une attaque" contre leur profession. Les six syndicats représentatifs des médecins libéraux ont même suspendu leur négociation avec l'assurance-maladie après le vote du texte. Explications.

Publicité

Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.

Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.

Que dit la proposition de loi ?

Le texte, qui sera examiné au Sénat le 14 février, vise à permettre d'avoir directement un rendez-vous avec des infirmiers, des kinésithérapeutes et ou des orthophonistes qui exercent dans un établissement de santé, sans prendre rendez-vous avec un médecin au préalable.

La loi veut aussi élargir les missions des infirmiers. Si elle est adoptée, ils seront autorisés à faire certaines prescriptions de soins et de médicaments. Plus besoin donc de passer nécessairement auparavant par le médecin. Les infirmiers pourront aussi prendre en charge des plaies, en coordination avec un médecin, après avoir été formés.

Les députés ont soutenu une disposition qui veut permettre aux soignants de prescrire une activité physique adaptée (APA), notamment aux patients atteints d'une affection de longue durée. Le texte veut aussi donner plus de prérogatives aux assistants dentaires, avec un nouveau statut d'assistant en médecine bucco-dentaire. Les pédicures podologues pourront prescrire des orthèses plantaires, et les opticiens adapter une prescription des ophtalmologues.

En outre, les pharmaciens pourraient renouveler les traitements chroniques pour une durée maximale de trois mois, lorsque le médecin prescripteur n'est pas disponible.

"Casser la médecine de France"

Certains médecins sont très critiques vis-à-vis de cette proposition de loi. À tel point que les six syndicats représentatifs des médecins libéraux ont décidé de quitter la table des négociations en cours avec l'Assurance maladie jeudi. "Le gouvernement s'arroge le droit de faire passer des lois qui impactent très fortement l'organisation de la médecine", dénonce sur France Inter Jérôme Marty, président de l'Union française pour une médecine libre. Pour lui, autoriser les infirmiers à faire plus de soins, là où il n'y a pas de médecins, peut s'avérer dangereux, car leur formation n'est pas suffisante. "La médecine ne peut pas se satisfaire d'une formation parcellaire", s'insurge-t-il. "En quatre mois de formation, vous ne pouvez pas avoir l'expertise d'un médecin", assure Jérôme Marty. Selon lui, cette loi risque de "casser la médecine de France".

Pour Agnès Giannotti, vice-présidente du syndicat MG France, cette loi risque de faire fuir encore plus les jeunes médecins. "De la même manière qu'on a vu tous les professionnels de santé quitter l'hôpital les uns après les autres face à des conditions de travail trop difficiles, on va vraiment obtenir la même chose, face à des contraintes de plus en plus importantes. Vous travaillez déjà 55 heures mais il faut aussi travailler le soir, il faut travailler le dimanche, vous n'en faites jamais assez. Les gens vont partir et il n'y aura plus personne pour soigner la population", juge-t-elle.

S'ils ne reçoivent pas un geste fort du gouvernement et de l'Assurance maladie, les médecins généralistes envisagent déjà de nouvelles actions et de nouvelles grèves.