Après sa démission, le diplomate russe Boris Bondarev dénonce "la guerre, la haine" de Poutine
Par Marie-Pierre Vérot, Denis Kataev
Boris Bondarev a claqué la porte fin mai de la convention de la mission russe à l’Office des Nations unies à Genève. Aujourd'hui, le diplomate russe confie sa honte de la guerre menée par Vladimir Poutine. Il est le premier diplomate russe à exprimer aussi clairement son désaccord.
C'est une parole rare, celle d'un diplomate russe. Le premier à quitter avec fracas la porte de son poste à la Mission russe après de l'ONU, à Genève. Dans une lettre rendue publique et partagée sur Linkedin, Boris Bondarev disait fin mai sa honte d'une guerre, celle menée par Vladimir Poutine contre l'Ukraine depuis le 24 février. Le dirigeant russe est, selon lui, en guerre contre le peuple ukrainien mais aussi contre le peuple russe. Après avoir mis sa famille en sécurité auprès de lui en Suisse, il s'est confié à France Inter et la rédaction internationale de Radio France.
Pas de diplomatie mais "guerre, mensonge, haine"
Boris Bondarev officiait au sein du ministère des affaires étrangères russe depuis 20 ans, où il n'a fait que constater une dégradation continue des relations entre la Russie et le monde occidental. "Au début des années 2000 nous entretenions d'assez bonnes relations avec les pays occidentaux. Nous avions fait de la coopération avec les États-Unis et l'Europe une priorité" explique-t-il. Un basculement intervient en 2007 : "Il y a ce fameux discours de Munich dans lequel Poutine tonne contre le monde entier et dit qu'il a été trompé, que l'Ouest n'a pas été à la hauteur de nos attentes. Il décide alors de mener une politique d'endiguement de l'Occident. C'est une politique inamicale voire hostile."
Dans sa lettre rendue publique, Boris Bondarev explique qu'il n'est plus question de diplomatie mais "de guerre, de mensonge et de haine". Pour lui, Vladimir Poutine n'est pas dans un processus de négociation, comme on peut l'imaginer en Occident. Il martèle ce message : "La Russie a toujours raison et nous devons faire valoir nos intérêts sans faire de concessions, parce que seuls les faibles cèdent. Et qu'une grande puissance doit faire respecter pleinement ses intérêts".

Il vit sous protection en Suisse avec sa famille
Boris Bondarev est, pour le moment, le seul diplomate à avoir exprimé publiquement un désaccord aussi violent avec la diplomatie menée par Moscou, mais il n'est pas le seul, dit-il, à penser ainsi. "J'ai des collègues qui partagent des sentiments similaires, des amis qui ont le même point de vue, on parle de cela bien sûr mais notre avis n'est pas partagé par grand monde, ce n'est pas le point de vue dominant."
Boris Bondarev sait ce qu'il risque. Il vit aujourd'hui comme sa famille sous protection en Suisse, où il a demandé l'asile politique. Spécialiste des questions de désarmement et de non prolifération, il cherche un nouvel emploi et dispose d'un atout certain, sa connaissance intime des rouages de la diplomatie poutinienne.