ASCO 2019 : l'immunothérapie pour traiter le cancer, quand ça marche, ce sont des années de vie gagnées
Par Véronique JuliaLe congrès mondial du cancer, l'ASCO, s'est ouvert vendredi à Chicago. Pendant 5 jours, les oncologues du monde entier vont partager les derniers résultats de leurs études cliniques et cette année encore, l'immunothérapie sera la vedette.
La première fois qu’on en a parlé, c’était en 2010, et chaque année, l’immunothérapie confirme les espoirs qu’on place en elle et prend un peu plus de place au congrès mondial du cancer de Chicago. Cette année encore, cette approche qui consiste à stimuler les globules blancs du patient pour qu’ils aillent tuer la tumeur, va battre les records d’études cliniques présentées au congrès. Il n’y en a jamais eu autant : 3 000 essais dans le monde en ce moment. En France, une société savante, la société française d’immunothérapie du cancer vient même d’être créée, elle réunit en France les plus grands spécialistes dans le domaine. Ils avaient besoin de s’organiser vu l’ampleur que prend cette thérapie dans le paysage du cancer.
Déjà quelques dizaines de milliers de patients traités en France, et ce n’est qu’un début
D‘année en année on soigne plus de patients et plus de cancers. L’immunothérapie est maintenant utilisée en traitement standard dans le cancer du poumon, du rein, dans les cancers ORL et dans le mélanome. D’abord employée en cas de rechute quand les traditionnelles chimios ou radiothérapie ne marchait pas, l’immuno est même désormais utilisée dans certains cas dès le diagnostic. Comme l'explique Aurélien Marabelle, il est oncologue a Gustave Roussy et président de la toute nouvelle société française d’immunothérapie : "Par exemple en France on a l'immunothérapie en première ligne des cancer du poumon pour certains patients et demain en première ligne du cancer du rein en aura aussi de l'immunothérapie."
Avantage de l’immunothérapie : les effets secondaires sont moins dévastateurs que la chimio. Pas de nausées, pas de chute de cheveux. Une multitude de nouveaux médicaments sont à l’étude, on les combine aussi pour plus d’efficacité. L’immunothérapie peut détruire la tumeur et ses métastases, mais parfois aussi les réduire ou simplement bloquer leur évolution et les effets semblent durables note le docteur Marabelle : "On commence à avoir du recul. Des patients qui ont eu de l'immunothérapie pendant un an, ou deux ans, et qui ensuite ont arrêté parce que d'un point de vue protocolaire c'était prévu comme ça, n'ont pas rechuté de leur cancer. On est à un an, deux ans, jusqu'à trois ans de suivi et le cancer ne revient pas."
Condamnée il y a trois ans avec les traitements traditionnels, elle revit grâce à l'immunothérapie
Chantal a 63 ans. En janvier 2014, elle tousse depuis plusieurs mois, l'imagerie révèle un cancer du poumon à un stade avancé. Dans son cas l'espérance de vie et très limitée et son médecin ne lui laisse pas beaucoup d'espoir, raconte Chantal. "À ce moment-là je me dis que c'est fichu, j'étais très fatiguée, très essoufflée, mon poumon était très opaque et le diagnostic était très mauvais."
Après huit mois de chimiothérapie, la tumeur disparaît, pour resurgir quelques mois plus tard avec cette fois des métastases au cerveau d'abord, puis au foie. Chantal s'enfonce. D'abord méfiante vis à vis de l'immunothérapie parce qu'elle a entendu dire - ce qui est vrai dans certains cas - que ça aggrave la tumeur au lieu de la détruire, elle se laisse finalement convaincre.
"Je revis normalement"
Très vite, c'est la métamorphose. "Ça m'a sauvé la vie et franchement l'immuno c'est génial ! Je suis en pleine forme et j'oublie même d'être malade. Je n'ai plus signes, je ne suis plus essoufflé, je peux monter les escaliers, je vis tout à fait normalement, je sors, je vais au restaurant, je vis comme tout le monde et je travaille !"
Depuis près de trois ans, tous les 15 jours, Chantal fait son injection d'immunothérapie. Tous les deux mois, une imagerie permet de constater que la tumeur et ses métastases ont beaucoup diminué et n'évoluent plus. "Tant que ça marche, on continue", dit-elle, d'autant qu'à part un peu de fatigue, elle n'a pas d'effets secondaires, en tout cas plus de nausées comme avec la chimio.
Chantal à cette chance : l’immunothérapie fonctionne chez elle, mais, hélas, ça ne marche que pour 20% des patients.
Pourquoi ça ne marche qu'avec un patient sur cinq ?
Restent donc des questions : pourquoi les deux tiers des patients ainsi que certains cancers, comme la prostate ou le pancréas ne répondent pas du tout à l’immunothérapie, c’est un enjeu de recherche. La technique provoque également dans une minorité de cas des maladies auto immunes comme une dépigmentation cutanée ou des problèmes de thyroïde notamment.