"Avoir le résultat aussitôt, c'est rassurant" : des tests antigéniques expérimentés dans des Ehpad
Par Hélène Chevallier, Louis-Valentin Lopez
C'est une alternative plus rapide mais moins fiable que les PCR : les tests antigéniques seront disponibles d'ici quelques semaines, a déclaré jeudi Olivier Véran. Validés par la Haute Autorité de Santé, ils sont déjà expérimentés en Île-de-France, dans 80 Ehpad. Reportage.
Dans un couloir de l'Ehpad Korian de Longpont-sur-Orge en Essonne, cinq salariées patientent non sans un peu d'appréhension. Elles commencent à avoir l'expérience de l'écouvillon dans le nez : "C'est au moins la sixième fois", en rigole l'une d'entre elles : "Deux fois au mois de juin puis juillet et une fois par mois depuis août". Depuis le mois de juin, les salariés des EHPAD sont régulièrement testés mais ils peuvent parfois attendre jusqu'à une semaine avant d'avoir le résultat.
Si pour un test antigénique la façon de prélever est la même que pour les tests PCR, les résultats sont beaucoup plus rapides : 30 minutes maximum. Ils fonctionnent un peu comme un test de grossesse explique Andréa, élève infirmière réquisitionnée pour les prélèvements : "On a des réactifs, qui vont réagir à la protéine de la Covid-19. Donc si le test est positif on aura deux barres et s'il est négatif on aura une seule barre, qui est la barre de contrôle."

90 salariés testés en 3 heures
Une fois le test réalisé, c'est Soumaya qui prend le relais. Chronomètre sous les yeux, cette autre élève infirmière surveille une dizaine de tests en même temps. En 3 heures, les 90 salariés de l'Ehpad sont testés. Tous négatifs. Un soulagement pour Sarah, la responsable de l'hébergement : "Le fait d'avoir le résultat aussitôt, c'est rassurant. Cela va permettre de casser la transmission du virus entre nous et entre les résidents."
Car si la situation s'est un peu améliorée, Sabine Gourgeon, directrice régionale chez Korian, a parfois dû attendre longtemps les résultats de certains de ses résidents : "On a eu des cas où il a fallu une semaine pour avoir des résultats de tests PCR. Ce qui évidemment limite significativement le résultat des tests." Et ce qui peut aussi laisser largement le temps au virus de s'implanter dans l'EHPAD.
La rapidité, c'est bien tout l'intérêt de ces tests antigéniques, explique le virologue Jean-Michel Pawlotsky de l'Hôpital Mondor de Créteil : "On estime globalement que leur sensibilité par rapport à une PCR est de l'ordre de 60%. Et ils détectent bien les charges virales importantes, c'est à dire les sujets qui sont les plus contagieux donc ceux qu'il faut isoler de façon urgente."

Moins isoler les résidents
Le directeur adjoint de l'Ehpad Florent Hyafil y voit lui la possibilité de moins isoler ses résidents : "Actuellement, c'est terrible. Pour un repas auprès de ses proches, une sortie, le couperet c'est 7 jours d'isolement minimum pour le résident. Si demain, on pouvait leur faire un test rapide par exemple quand ils vont dans leur famille le week-end, les durées d'isolement seraient beaucoup plus courtes, et leur vie sociale pourrait continuer." C'est aussi, pour le directeur adjoint, moins de personnel absent dans l'attente du résultat d'un test : "Au plus fort de la crise fin mars, on pouvait se retrouver avec 60 à 70% de nos titulaires qui manquaient car on les isolait systématiquement en cas de suspicion."
Cette campagne de dépistage du Covid-19 à partir de tests antigéniques a été lancée il y a dix jours à titre expérimental sur les personnels d'Ehpad en Île-de-France. "Ce qui fait 80 Ehpad en Ile-de-France qui vont tester ce protocole", a déclaré le directeur général de l'Agence régionale de santé, Aurélien Rousseau. La Haute autorité de santé (HAS) avait rendu vendredi dernier un avis "favorable" aux tests antigéniques.
"Cela ne remplacera pas les tests PCR", prévient Olivier Véran
Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a fait pour sa part savoir ce jeudi que les tests antigéniques, qui permettent d'obtenir un résultat "entre 10 et 30 minutes" seraient disponibles "d'ici quelques semaines". "5 millions sont déjà déployés", assure-t-il : "Nous disposons désormais de toutes les recommandations de la Haute Autorité de santé pour permettre prochainement aux hôpitaux, mais aussi aux médecins libéraux, aux pharmaciens d'officine, aux infirmiers libéraux de pouvoir acquérir ces tests." Olivier Véran a néanmoins concédé que ça allait "prendre un peu de temps", et que ça "ne remplacera pas les tests PCR."

"Nous allons rentrer dans une stratégie où on va pouvoir réduire drastiquement les délais" pour mieux "suivre" la circulation du virus, assurait de son côté Emmanuel Macron mercredi soir lors de son interview télévisée sur TF1 et France 2. Il avait indiqué que cela passerait par de nouvelles techniques, comme ces tests antigéniques.
À Nice, une campagne de tests antigéniques contre le Covid a aussi débuté mercredi, pour une expérimentation de 15 jours. La majeure partie de ces tests seront réalisés au Centre hospitalier universitaire de Nice, dans les services d'urgence de pneumologie et gérontologie. Selon la métropole, le CHU, qui a commandé 70 000 des ces tests, en disposerait déjà d'une dizaine de milliers.