Carte blanche : le poème inédit de Cyril Dion

Invité de l'émission "Boomerang", Cyril Dion, co-réalisateur du documentaire "Demain" et militant écologiste, a offert une surprise aux auditeurs : accompagné à la guitare par Sébastien Hoog, il a lu à l'antenne un texte inédit. Le voici.
La Carte Blanche de Cyril Dion : "Rien qu'une prière"
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"Rien qu'une prière.
Juste une idée fixe qui tourne et s'alimente sans cesse
à l'intérieur de mon crâne, des mes os,
un élan hérité des lueurs millénaires
des fougères et des rocs
des aventures batraciennes.
Rien qu'une prière.
Plus de distanciel.
Plus de mode dégradé.
Plus de zoom, de teams, de meets
plus d'errances déconfinées
plus de courses empressées sur l'asphalte déserte
Ne plus faire cas
du moindre contact
Ne plus me dissocier
Ne plus ériger
à chacun de mes gestes
de nouvelles barrières
Mais
Revenir au monde
aux millions de mains, de peaux, de lèvres,
aux pulsations famillières.
Sentir sur mon cou, le souffle et l'ardeur,
autour de ma poitrine
l'embrassade
le soulagement du corps qui se rend
et s'abandonne à celui qui le tient
Plonger à nouveau
dans le crépitement des ruches
inspirer à pleines goulées
et livrer aux cieux
la puissance des brins
la chaleur des cœurs assemblés
Aimer encore
Aimer car il ne s'agit que de cela.
Tout ceci
n'est pas une histoire de climat
de croissance ou de forêts dévastées
Pas une histoire de capitalisme,
de libéralisme
ou d'espèces en déroutes.
Non.
Tout ça n'est rien
qu'une histoire d'amour.
Une histoire d'amour
qui a salement tourné."
Cette prière pourrait-elle un jour être exaucée ?
Cyril Dion : "J'espère bien ! On le sait. Il y a suffisamment de scientifiques qui racontent que plus on va continuer à détruire la biodiversité, moins on aura de forêts, moins on aura d'habitat pour les animaux sauvages, moins on aura d'espèces différentes, et plus on prend le risque d'avoir des pandémies à répétition.
Pour deux raisons simples :
- la première, c'est que moins les animaux sauvages ont des endroits où nicher, plus ils se rapprochent de là où sont les humains, et donc plus les maladies peuvent se transmettre de l'un à l'autre.
- et l'autre, c'est que moins il y a de diversité, moins il y a d'"espèces culs-de-sac". En fait, il existe des espèces qui se transmettent le virus les unes aux autres. Il y en d'autres, qui sont des culs-de-sac épidémiques. Quand le virus arrive à elle, il cesse de se transmettre. Moins, il y a d'espèces, moins on se donne la possibilité que ces espèces protectrices existent, et plus il y a de chances que ça arrive jusqu'aux humains. Et franchement, on n'a pas envie d'avoir ça tous les ans !"