Comment l'Iran et l'UE s'apprêtent à commercer à la barbe des Américains

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Comment l'Iran et l'UE s'apprêtent à commercer à la barbe des Américains

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Federica Mogherini, diplomate en chef de l’UE et de son homologue iranien Mohammad Javad Zarif, estiment que cet accord pourrait s'ouvrir à d'autres pays partenaires dans le monde.
Federica Mogherini, diplomate en chef de l’UE et de son homologue iranien Mohammad Javad Zarif, estiment que cet accord pourrait s'ouvrir à d'autres pays partenaires dans le monde.
© AFP - HANS PUNZ

Quel dispositif pour contourner les sanctions américaines et maintenir les échanges commerciaux avec l’Iran ? Eclairage.

"Un système de troc sophistiqué…" C'est de cette manière que les Européens présentent ce futur mécanisme, une sorte de bulle d'échange, à l'intérieur de laquelle l'Iran aurait la possibilité d'écouler essentiellement sa production de pétrole brut.

Si l'Espagne décide par exemple d’importer du pétrole brut iranien, le système imaginé permettra la transaction sans qu’aucun paiement n’apparaisse entre Madrid et Téhéran.

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Troc international

L’Iran obtiendrait une rémunération en se faisant payer, non pas par le biais d'une monnaie, mais par un jeu d'écritures où serait prise en compte la valeur de biens exportés de l’UE vers Téhéran, comme par exemple des produits pharmaceutiques ou des pièces détachées automobiles venant de France. 

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En bout de chaîne, c'est une partie de l'argent espagnol, destiné à l'achat du pétrole, qui permettrait de rétribuer le constructeur et/ou le fournisseur de médicaments. 

Ce grand "troc international", qui ressemble à un programme "pétrole brut contre produits transformés", est directement inspiré de celui mis en place pendant la Guerre froide par l'Europe et l'Union Soviétique, son but commercial étant de faire disparaître les transactions financières avec Téhéran.

Transactions sans dollars

Au cœur de ce mécanisme, une cellule, appelée chambre de compensation, sera chargée de s'assurer que la valeur des biens échangés est équivalente.

Ce dispositif est "légal", précisent les pays signataires, et sera mis en place pour éviter deux écueils : d'une part, il s’agit de ne pas utiliser le dollar comme monnaie de paiement ; d'autre part, ce système devrait  permettre aux entreprises présentes sur les marchés iranien et américain de ne pas être exposées aux sanctions extraterritoriales prévues par Washington à partir du 4 novembre.

En 2017, les échanges commerciaux entre l'Union européenne et l'Iran étaient proches de l'équilibre : 10,1 milliards d'euros d'importation pour l'UE (essentiellement du pétrole) contre 10,8 milliards d'euros d'exportations à destination de Téhéran.

Porte ouverte

De nombreux détails techniques restent encore à travailler, estime-t-on au sein de la diplomatie. Mais Iraniens et Européens ont laissé entendre lundi, à la suite de la déclaration conjointe de Federica Mogherini, diplomate en chef de l’UE, et de son homologue iranien Mohammad Javad Zarif, qu'ils pourraient s'ouvrir à d'autres pays partenaires dans le monde.

Politiquement, l’objectif de ce mécanisme est évidemment d’isoler Donald Trump… de lui démontrer que le reste du monde a les moyens de fonctionner sans les Etats-Unis.