Covid-19 : la fermeture des écoles, une plaie pour les enfants les plus pauvres

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Covid-19 : la fermeture des écoles, une plaie pour les enfants les plus pauvres

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Dans cette école de Johannesbourg, en Afrique du Sud, le nombre d'élèves a été divisé par trois depuis le début de la pandémie.
Dans cette école de Johannesbourg, en Afrique du Sud, le nombre d'élèves a été divisé par trois depuis le début de la pandémie.
© AFP - LUCA SOLA

370 dollars par enfant : voilà ce qui permettrait aux élèves des pays les plus pauvres au monde de retourner en classe, estime Save the Children. L'ONG de défense des enfants s'inquiète des risques de déscolarisation d'une génération entière de jeunes, du fait de la pandémie de Covid-19.

Dans les 59 pays les plus démunis de la planète, 136 millions d’enfants sont privés d’école en raison des mesures imposées par les autorités pour lutter contre la pandémie du coronavirus. Pour autant, Save the Children estime que, si 50 milliards de dollars étaient investis, des dizaines de millions d’enfants des pays les plus pauvres du monde pourraient retourner s’instruire en toute sécurité : 370 dollars en moyenne par enfant pour éviter la déscolarisation définitive d’une génération.

L’an dernier, l’ONG évaluait à 10 millions le nombre d’enfants qui ne sont jamais retournés à l’école, après la mise en œuvre des mesures sanitaires. Une estimation a minima. Le prochain bilan s’annonce bien plus sombre, compte-tenu des mois de cours annulés. Avec des conséquences à long terme, rappelle Inger Ashing, PDG de Save the Children : "Si 2020 était l’année de la découverte du vaccin, 2021 doit être celle où l'on investit dans l’avenir des enfants".

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"Actuellement, les enfants, qui sont nos futurs médecins, scientifiques, conducteurs de poids lourds ou plombiers, ne sont pas à l’école (Inger Ashing)"

Car si le coût de la crise sanitaire est lourd pour tous, il l'est encore davantage dans les zones les plus critiques, pour lesquelles la solidarité internationale est cruciale. Et le plus souvent, l'éducation en pâtit. Avec des conséquences délétères chez les adolescents notamment, qui représentent un sixième de la population mondiale. 

Proies faciles

Pour l’OMS, la violence, la pauvreté, l’humiliation et la dévalorisation des adolescents les exposent à des risques multiples quand ils n’ont pas acquis à l’école les aptitudes utiles dans la vie. Autrement dit, en quittant prématurément l'école, les jeunes deviennent des proies faciles, exposés à toutes formes d'abus, déplore Save the Children : travail précoce, mariage forcé – 3,5 millions de jeunes filles risquent de connaitre un mariage ou une grossesse non désirés –, pédophilie, enrôlement et trafics.

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En Ouganda, où 13 millions d’écoliers sont restés à la maison depuis le mois de mars, le nombre d’adolescents qui travaillent a triplé et les cas de mariages et grossesses de mineures ont doublé entre avril et juin 2019. Kim, un jeune sud-soudanais de quinze ans, qui vit dans un camp à l’est de l’Ouganda – 600 000 mineurs sont des réfugiés –, confirme :  "Quelques-unes de nos amies se sont retrouvées enceintes. Elles doivent maintenant se marier et renoncer à revenir en cours. Certains copains sont employés dans des fermes ou sur les marchés ou pour faire de lourds travaux alors qu’il n’y a pas de nourriture. Et même quand ils en ont à la fin du mois, ils sont si maigres qu’ils ont des problèmes de santé". 

L'école, vigie sanitaire

Autre vertu de l'école qui fait cruellement défaut : le suivi médical qu'elle permet d'exercer, sur les populations les moins favorisées notamment. Une enquête menée dans 130 pays par l’OMS  révèle que "dans trois États sur quatre, les services de santé dans les établissements scolaires ont été abandonnés", et dans 93 % d’entre eux, la pandémie de Covid-19 a fait grimper les pathologies mentales.  "72 % des enfants et des adolescents dans 70 pays ont subi des perturbations qui n’ont pas été traitées". Sur ce terrain, l'école virtuelle, quand elle existe, est encore à mille lieues de pallier les fermetures de classes.

"72 % des enfants et des adolescents dans 70 pays ont subi des perturbations qui n’ont pas été traitées" (rapport de l'OMS)

Pour Save the Children, la solution est simple : les bailleurs de fonds vont devoir en en faire plus. Car chaque unité dépensée pour la prise en charge d’un enfant rapporte cinq fois plus.

Dans les objectifs de développement durable, l’ONU s’était engagée à ce qu’en 2030, tous les enfants soient scolarisés. Or un enfant de 6 à 17 ans sur six reste exclu de l'école, et seuls 6 jeunes sur 10 vont jusqu’au bout du cycle secondaire, un phénomène évidemment plus marqué dans les pays à revenu faible. Parallèlement les formations d'enseignants reculent, surtout en Afrique subsaharienne. 

Si rien n’est fait, estiment les Nations unies, 20 % des jeunes et 30 % des adultes dans les pays à revenu faible ne sauront toujours pas lire dans neuf ans.