Dans les coulisses de la campagne | Place Publique et le PS : "Il ne faut pas vivre avec des remords"
Par Laurence Peuron
Première sortie de campagne commune, sur le terrain, pour les nouveaux alliés Place Publique et le parti Socialiste. Raphaël Glucksmann et Olivier Faure se sont rendus à Creil pour protester contre la fermeture de la maternité. Aux rebelles à toute alliance à gauche, le patron du PS assure que rien n'est fermé.
Myriem, que tout le monde connaît à Creil comme la pasionaria socialiste locale, arrive à la maternité de Creil les bras chargés d’une gerbe de fleurs géante, frappée d’un ruban en lettres d’or "Olivier Faure, Premier Secrétaire du PS". Ça fait un peu couronne mortuaire mais le patron socialiste est bien vivant.
Entre deux volutes de cigarette, il savoure son joli coup. Cette alliance avec Place Publique, il est allé la chercher contre nombre de barons du PS. À commencer par les Hollandais. Et il se permet, un rien narquois : "À ceux qui ont des remords, je leur dis 'c’est encore possible'. Jusqu’au 6 mai, date de dépôt des listes européennes, rien n’est fermé. Il ne faut pas vivre avec des remords". (Benoît Hamon, si tu m’entends...)
Le leader de Générations.s est venu, tout comme Ian Brossat, la tête de liste communiste, défendre cette maternité transférée à Senlis parce que, dit-on ici, Eric Woerth aurait pesé de tout son poids pour privilégier les intérêts de Senlis la riche, contre Creil la populaire.
Pour l’heure, les contacts sont rompus mais certains militants socialistes veulent croire que les sondages qui donnent la nouvelle alliance à 7% sauront ébranler les certitudes.

Assailli par les micros et les caméras, l’essayiste Raphaël Glucksmann justifie aussi son passage du rubicond. Il intègre sans états d’âme la caravane électorale d’un PS dont il a écrit - mais c’est de l’histoire ancienne - qu’il devait mourir pour se refonder. Les journalistes le malmènent sur ses anciennes proximités avec l’Alliance Libérale et un début de compagnonnage avec Nicolas Sarkozy.
Il s’explique posément : "J’ai baigné dans la gauche libérale, j’ai été éduqué à préférer Montesquieu à Rousseau ; Kant à Hegel. Mais la crise de 2008 m’a ouvert les yeux. La sociale démocratie libérale va dans le mur, l’urgence écologique et sociale impose de tout repenser. Notre enjeu en Europe, c’est de faire basculer la sociale démocratie du côté de cette radicalité sociale et écologiste". Le PS plutôt que Benoît Hamon (dont il a pourtant, pendant la campagne présidentielle, co-écrit certains discours dont celui de Bercy) ? Réponse cinglante de Raphaël Glucksmann : "Pour Hamon, la société civile, ce sont des pin’s sur un revers de veste".
Pas de pin’s, pas de drapeaux pour cette première sortie sur le terrain, mais ça se bouscule sur la nouvelle photo de famille, Olivier Faure le patron du PS parle d’ailleurs de Raphaël Glucksmann comme d’un petit "frère". Laurence Rossignol l’ancienne ministre de Valls, Claire Nouvian la militante écologiste pour la préservation du vivant et des océans au sein de l' association Bloom, Pierre Larrouturou et Anne Hessel de Nouvelle Donne.
L’équipée prend ensuite le chemin de la scène de la Faïencerie dans le centre-ville de Creil pour une réunion citoyenne où l’on sent tout le savoir faire du PS pour remplir une salle.

Raphaël Glucksmann explique qu’il faut redonner de l’espoir aux "orphelins de la gauche", qu’on ne "peut pas se résoudre au match imposé entre Macron : les libéraux d'un côté, Le Pen et les nationalistes de l'autre".
Claire Nouvian, en position inéligible sur la liste, lui emprunte le micro : "Ce qui m’intéresse c’est qu’on envoie au parlement des gens courageux, qui se battent comme des chiens jusqu'au bout. Tout l'espace en Europe est occupé par les lobbys et les forces obscures. Je serai pour les embêter".
Mais la star c’est "Olivier". Le "valeureux Faure" qui, un brin ingrat, a failli partir en oubliant la gerbe de la pasionaria Myriem.