"Demandez à Clara", la base numérique qui révèle les pépites de la musique composée par des femmes
Par Christine Siméone
Elle porte le nom de la compositrice Clara Schumann : la base de données "Demandez à Clara" a pour objectif de mettre en valeur le travail de centaines de compositrices, invisibilisées ou oubliées, en les recensant, mais aussi en les faisant vivre à travers des représentations, des enregistrements.
Dédiée à la promotion des compositrices de toutes nationalités et toutes époques, l'association Présence Compositrices a mis au point la base numérique Demandez à Clara, consultable par toutes celles et ceux qui s'intéressent à la musique. Clara, parce que c'est le prénom de Clara Schumann, épouse du compositeur Robert Schumann, et premier nom de femme compositrice qui vient à l'esprit aujourd'hui. "C'est l'arbre qui cache la forêt" explique Claire Bodin, responsable de Présence Compositrices.
Car au-delà de Clara, il y a aussi d'Anna Magdalena Bach dont on est en train de prouver qu'elle est la créatrice d'un des préludes les plus célèbres de son époux et de ses suites pour violoncelle, mais aussi des centaines d'autres femmes-de-personne dont les travaux sont tombés dans les oubliettes.
"Demandez à Clara a remporté immédiatement un vif succès, avec énormément de propositions de contributions qu'il nous faut étudier et valider minutieusement. Beaucoup de compositrices contemporaines étrangères désirent entrer dans la base" raconte Claire Bodin.
Coté utilisateurs et utilisatrices, ce sont des moins de 34 ans à 60% qui consultent cette base de données sur les œuvres répertoriées, et autant d'hommes que de femmes.
Cet engouement, Claire Bodin l'avait prévu et pour elle, après la "révolution du baroque, où l'on a vu les bacs des disquaires pleins de disques de musiques baroques, ce sera bientôt la révolution des compositrices". Elles sont si nombreuses, leurs œuvres d'époques, de styles, et d'univers si variés, "je peux vous dire que les programmateurs peuvent y puiser des dizaines d'années de programmation pour leurs événements".
Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.
Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.
Faire partager, jouer et éditer la musique des femmes
Outre le répertoire des artistes et de leurs œuvres, l'équipe de Clara souhaite créer un label numérique, éditer ou faire éditer ces musiques, "le travail qui nous attend est colossal" souligne Claire Bodin. En novembre devaient commencer les présentations dans les conservatoires de musique, et d'une manière générale il va s'agir désormais de faire vivre ces musiques, rendre le contenu du site Demandez à Clara palpable par tous.
Debora Waldman, cheffe d'orchestre, contribue à cette mise en lumière des compositrices oubliées. "Je me suis rendue récemment en Amérique-du-sud et j’ai eu l'occasion de parler devant trois milles personnes du site "Demandez à Clara". La réponse a été très enthousiaste, ils m'ont répondu qu'ils pouvaient contribuer car là-bas aussi, ils ont des noms à donner".
En tant que directrice artistique, elle les fait jouer dans le programme de concerts qu'elle envisage pour l'Orchestre régional d'Avignon. Après avoir sorti de l'oubli la symphonie de Charlotte Sohy, jouée par l’Orchestre Victor-Hugo Franche-Comté à Besançon, Grande Guerre, pour la première fois depuis sa création, la nouvelle directrice de l'orchestre régional d'Avignon est dans une démarche de programmation des œuvres de compositrices au fil des saisons à venir. Il s'agit de compositrices contemporaines comme Edith Canat de Chizy, ou d'une artiste comme Sophie Gail, qui rivalisait largement en talent avec ses confrères au XVIIIe siècle. À partir de janvier, l'orchestre d'Avignon-Provence a prévu de présenter pour la première fois un programme avec plus de compositrices que de compositeurs.
"C'est un travail que de rechercher leurs partitions, pouvoir les comprendre exactement, les corriger éventuellement sans en changer ni l'essence ni l'intention bien sûr." explique Debora Waldman. "Cela consiste en fait à redonner à ces femmes leur place dans l'histoire".