"Désastreux", "angoissant", "du jamais vu" : l'échec de la COP25 après deux semaines de (vaines) négociations
Par Lisa Guyenne, AFP
La COP25 s'est terminée ce dimanche à Madrid, après deux semaines de négociations entre chefs d'État. De l'aveu de tous, cette édition est une déception, une "occasion ratée" de répondre à l'urgence climatique.
"Je suis déçu du résultat de la COP25." Ces mots sont signés du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, dans un communiqué du dimanche 15 décembre. "La communauté internationale a manqué une opportunité importante de montrer son ambition pour répondre à la crise climatique."
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La conférence a pourtant été clôturée en retard pour tenter de parvenir à des accords, les négociations ont duré 40 heures de plus que prévu. Dans la nuit de samedi à dimanche, les négociateurs sont restés éveillés pour essayer de trouver une entente. Rien n'y a fait : la conférence "laisse un goût doux-amer" à la ministre espagnole de l'Environnement, Teresa Ribera. "La seule chose plus désastreuse que l'état des négociations, c'est l'état du climat lui-même", a tweeté samedi Catherine Abreu, du réseau Climate Action Network.
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Pas d'engagement concret de la part des grands pollueurs
Au final, le texte appelle à des "actions urgentes" pour réduire l'écart entre les engagements et les objectifs de l'accord de Paris pour limiter le réchauffement climatique. Mais quasiment aucun des grands pays émetteurs de CO2 n'a pris d'engagement concret. "Les principaux acteurs dont on espérait des avancées n'ont pas répondu aux attentes", analyse Laurence Tubiana, l'une des fondatrices de l'accord de Paris. Les États-Unis ont déjà prévu de quitter l'accord en 2020, selon la volonté de Donald Trump.
La Chine et l'Inde, qui restent signataires, ne s'engagent pas davantage. Avant de revoir leur propre copie, les deux grandes puissances attendent des efforts de la part des pays développés, pour respecter notamment leurs promesses d'aides financières aux pays en développement.
"Il n'y avait aucun ministre français"
L'Union Européenne fait légèrement mieux, en se fixant le "Green deal", l'objectif d'être le premier continent à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, comme l'a tweeté Emmanuel Macron vendredi 13 décembre.
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Mais la France, qui se veut pourtant championne de l'environnement, "n'a pas joué de rôle fort pendant ces négociations", estime sur franceinfo Armelle Le Comte, responsable plaidoyer à l'association Oxfam France. "Ces derniers jours, il n'y avait aucun ministre. Le Premier ministre et la ministre de la Transition écologique et solidaire ne sont passés qu'en coup de vent." La militante dénonce, selon elle, le "double discours d'Emmanuel Macron, qui passe son temps à nous dire à quel point le climat est le défi de notre avenir et en même temps quand les négociations les plus importantes de l'année ont lieu, il n'y a personne."
Cela n'a pas empêché le ministère de la Transition écologique de regretter, dans un communiqué envoyé ce dimanche, "un manque d'ambition climatique malgré certaines avancées obtenues dans l'accord". "Au vu de l’urgence climatique et des attentes des citoyens, la France regrette que les gouvernements ne soient pas allés assez loin dans leurs engagements", indique le ministère, tout en rappelant que "durant toutes les négociations, la France s’est mobilisée pour appeler à l’ambition et ne pas accepter de recul de nos engagements".
La société civile atterrée
Pourtant, preuve de l'importance de la question environnementale, cette COP25 s'est également illustrée par l'affluence particulièrement forte des représentants de la société civile, présents en nombre pour tenter de sensibiliser les négociateurs. Écologistes, scientifiques, peuples indigènes, ONG... Hindu Imaru Ibrahim représente la communauté peule Mbororo au Tchad. "Je suis vraiment déçue. On a donné l’espoir à nos communautés que l’on venait ici pour avoir des discussions qui les représentent, et pour obtenir des solutions à ramener à la maison", déplore-t-elle au micro de Mathieu de Taillac, correspondant de France Inter à Madrid. "Les gens dans tout le Sahel subissent déjà les impacts du changement climatique. La saison des pluies n’est pas régulière, avec des inondations ou des sécheresses. Les gens n’ont pas à manger."
"C'était la COP de l'ambition, nous ne voyons pas cette ambition", a regretté quant à lui Carlos Fuller, négociateur en chef du groupe des 44 États insulaires, particulièrement exposés à la montée des eaux. "C'est un résultat désastreux, profondément angoissant - le pire que j'aie jamais vu", s'est emporté Mohamed Adow, directeur de Power Shift Africa.
Patrick Galey, journaliste environnement à l'AFP, s'est lui aussi attristé sur Twitter : "Les objectifs de la COP25 étaient plutôt modestes : faire que les États entérinent ce qu'ils avaient promis il y a quatre ans. (...) Ils n'ont même pas réussi à valider les promesses qu'ils avaient déjà faites, et encore moins à être plus ambitieux. (...) Le message adressé aux peuples, ce n'est pas que l'accord de Paris est inutile. C'est qu'il faut voter pour de meilleurs dirigeants, des dirigeants qui en ont quelque chose à foutre."
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La jeune activiste Greta Thunberg s'est également exprimée, dans la nuit de samedi à dimanche : "Il semblerait que la COP25 soit en train de se désagréger désormais. La science est claire, mais la science est ignorée. Peu importe ce qu'il adviendra, nous n'abandonnerons jamais. Nous venons juste de commencer", a-t-elle conclu dans un tweet.
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Les États ont jusqu'à la prochaine COP pour corriger le tir
Les signes de l'urgence climatique ne manquent pourtant pas, entre les catastrophes climatiques qui se multiplient ( la spectaculaire 'acqua alta' de Venise en est un exemple), le dérèglement climatique (nous venons de vivre la décennie la plus chaude de tous les temps), et les innombrables rapports scientifiques qui alertent sur l'état de notre planète ( lire ce dernier rapport du GIEC en septembre). Dans les rues, des milliers de jeunes se mobilisent le vendredi, avec le mouvement #FridaysForFuture lancé par Greta Thunberg.
Mais cette pression citoyenne et scientifique n'aura pas eu raison des quelque 200 signataires de l'accord de Paris réunis pour cette COP25. Il y a pourtant urgence : au rythme actuel des émissions de CO2, le mercure pourrait gagner jusqu'à 4 ou 5°C d'ici la fin du siècle. Même si les engagements sont respectés, le réchauffement pourrait dépasser les 3°C. Les États ont encore un an pour corriger le tir : l'année prochaine, ils se réunissent à nouveau, cette fois à Glasgow pour la COP26, au cours de laquelle ils devront présenter une version révisée de leurs plans de réductions d'émissions.