Écologie : la croissance verte ne serait-elle qu'une illusion ?

Publicité

Écologie : la croissance verte ne serait-elle qu'une illusion ?

Écologie : la croissance verte serait-elle un mythe ?
Écologie : la croissance verte serait-elle un mythe ?
© Getty - Colin Anderson Productions pty ltd

Dans "Le débat de midi", la manager chez Carbone 4, Alexia Soyeux, le rédacteur en chef de "Kaizen" Pascal Greboval et le sociologue Jean-Baptiste Comby, expliquent en quoi la logique de consommation actuelle continue d'empêcher les comportements de changer significativement pour promouvoir une économie plus verte.

Au micro de Thomas Chauvineau, les trois invités expliquaient dans quelle mesure les petits gestes écologistes à l'échelle individuelle peuvent vite devenir dérisoires sans qu'un profond changement s'opère du point de vue de notre système économique actuel. Si celui-ci tente de se conjuguer avec les nouveaux enjeux écologiques, il reste, d'après eux, insuffisant car basé sur un rééquilibre vain entre un système de consommation toujours aussi important qui prend encore beaucoup trop de place face aux initiatives citoyennes et écologiques. 

Aujourd'hui, ce qui est irréaliste, c'est de croire qu'on va pouvoir sauver la planète en faisant du capitalisme vert et la rhétorique des petits gestes.

Publicité

- Jean-Baptiste Comby

Croissance = consommation = pollution 

Alexia Soyeux explique que, aujourd'hui, quand on parle d'empreinte carbone, et d'initiatives vertes, cela cache en réalité bien des disparités car chacun fait avec son propre quotidien. Si on cherche à compenser le plus possible certaines de ses actions polluantes, certaines sont encore perçues comme trop nécessaires pour s'en défaire dans l'immédiat. Par là, le système empêche un changement vert significatif car la production est toujours aussi importante : 

"La consommation, globalement, que ce soit de l'ordre de l'alimentation, de l'électronique, de l'électroménager, des vêtements, du numérique, quoi qu'on achète, quoi qu'on consomme, cela a été produit avant toute chose. Quand on produit, on consomme de l'énergie et des ressources. Quand on produit, on pollue. Notre empreinte carbone individuelle est liée à tout ce que l'on consomme. 

Pour réduire, il faut simplement moins acheter.

Rééquilibrer sa consommation : "apprendre à être et ne pas avoir"

Pour Pascal Greboval, il y a une tension entre le citoyen et le consommateur qu'il faut essayer de résoudre en rééquilibrant d'abord l'individu. 

Cela relève d'un vrai travail spirituel et d'une quête de sens.

"Il faut se demander si, quand vous achetez un produit quel qu'il soit, une bouteille d'eau, un écran de TV, un van pour faire le tour du monde… si cela a vraiment du sens. Certes, il ne faut pas non plus être des "khmers verts", il faut aussi savoir rester dans la joie et dans la positivité. 

Certes, on peut réduire son empreinte en cherchant à rééquilibrer sa consommation, mais la protection de l'environnement passe avant tout par l'être au détriment de l'avoir.

Aujourd'hui, notre système de consommation répond à des besoins qui ne sont jamais assouvis et je ne crois pas que tout le monde en ait vraiment besoin. Par exemple, les gens qui ont basculé vers une société personnelle, plus sobre et plus heureuse, n'ont besoin de rien de plus.

On peut vivre dans une société de décroissance vis-à-vis de la consommation et être heureux.

La conscience écologique paralysée par le paradigme de "croissance verte"

Jean-Baptiste Comby et Alexia Soiyeux estiment qu'il faut remettre en question toute l'organisation sociale sur laquelle notre société repose et que le modèle de "la croissance verte" est aussi paradoxal qu'il traduit une incohérence évidente entre consommation et écologie, la consommation étant néfaste, à plusieurs points de vues, pour la protection de l'environnement : 

Le capitalisme est un rapport social qui n'est pas compatible avec les enjeux écologiques. (Jean-Baptiste Comby)

Il faut chercher à comprendre comment comment faire en sorte que les logiques marchandes de concurrence, de compétition qui sont la structure, la moelle épinière même du capitalisme, ne soient plus hégémoniques mais marginales". 

Le sociologue explique aussi que le système économique suscite en plus des rapports de force entre groupes sociaux qui paralysent une généralisation des gestes écologistes : 

"Cette forme d'empêchement résonne pour toute une catégorie de la population issue des milieux populaires, pour qui ce discours est beaucoup plus difficile à entendre. Ils y adhèrent beaucoup moins parce qu'ils entretiennent un autre rapport à l'écologie et, notamment, ils voient bien qu'il y a, derrière l'écologie, un rapport social : les style de vie, selon les classes sociales, contribuent de façon très inégale à la destruction de la planète". 

Il ne s'agit pas uniquement de changer nos comportements mais de changer nos modes de vie et penser un autre modèle que la consommation.

Ce à quoi Alexia Soyeux préconise "d'imaginer d'autres façons de vivre qui ne seraient pas centrées sur la consommation ou l'accumulation de capital et de richesses". 

"La croissance écologique" ça ne veut rien dire, ça entretient surtout le mythe d'une croissance verte matériellement impossible.

On ne sait pas découpler les émissions de CO2 et la croissance du PIB…"

Aller plus loin

🎧 RÉÉCOUTER - Les petits gestes peuvent-ils sauver notre avenir sur la planète ?