Effacer l’historique ? Comment surfer sur le web sans laisser de traces ?
Est-ce possible de naviguer discrètement sur le web ? Faut-il effacer ses traces sur Internet ? Faut-il pour cela quitter Facebook ? Dans l’émission Grand bien vous fasse, des spécialistes du numérique ont donné quelques conseils pour une navigation plus sûre.
Avec : Anne-Sophie Jacques, Maxime Guedj, journalistes auteurs de Déclic (ed. Les arènes), Jérôme Colombain, journaliste à France Info, auteur de Faut-il quitter les réseaux sociaux ? (ed. Dunodè), Michael Stora, psychologue et Bertrand Pailhès, directeur des technologies et de l'innovation de la CNIL.
Laisser des traces est-il problématique…
Outre les cas dramatiques de harcèlement sur le web, ou des photos de vous en petites tenues qui risquent de ressortir plus tard, "vos données, explique Anne-Sophie Jacques, ne disparaissent pas. Elles servent à rémunérer les géants du web, les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) qui les utilisent pour vous 'surveiller' et surtout vous vendre des choses dont vous n’avez pas besoin".
… ou pas ?
La vision optimiste est de dire, comme Jérôme Colombain : "Le ciblage marketing a toujours existé, et sur le web, il est anonymisé : ce sont des paquets de données qui sont traitées, pas seulement les nôtres. On peut aussi apprécier que ces méthodes nous permettent d’avoir accès à des services gratuits exceptionnels".
Comprendre pourquoi on laisse des traces
Avant de se lancer dans une navigation plus sûre, peut-être faut-il s’interroger sur ce qui nous pousse à nous afficher autant sur les réseaux sociaux.
C’est le problème de fond : pourquoi cherche-t-on à exister de manière complètement narcissique sur les réseaux ?
Benjamin Colombain : "C’est le concept d’«extimité », inventé par Lacan, et repris par Serge Tisseron : déposer des choses intimes dans un domaine public pour avoir un retour". L’"extimité" procure des satisfactions.
Quitter Facebook ?
Le psychologue Michael Stora explique : "90% des Français sont très soucieux d’être anonymes, mais 80% ne sont pas prêts à quitter Facebook.
Facebook, c’est un peu comme ta mère : tu as envie de la quitter mais tu n’y arrives pas.
Et aujourd’hui, qui est prêt à se passer de son téléphone portable ?"
Benjamin Colombain : "Facebook chatouille le circuit de la récompense : des likes sur nos messages nous font secréter de la 'drogue', c’est agréable, et c’est ce qui fabrique l’addiction".
Anne-Sophie Jacques a quitté Facebook. "Quand je l’ai fait, mes amis ont suggéré de m’envoyer des pigeons voyageurs ! Plus sérieusement, il existe des outils comme Framasoft ou d’autres pour se passer du côté organisation événements du réseau social !"
CGU et RGPD ?
Les CGU (Conditions générales d’utilisations) et le RGPD (Règlement général de la protection des données) sont censés nous protéger mais, malheureusement, personne ne les lit. Et ce n’est pas un hasard, explique Anne-Sophie Jacques : "Si on ne les lit, pas c’est qu’ils sont inaccessibles.
D’abord, c’est non négociable, on est obligé de dire oui !
Ensuite, une avocate britannique avait fait l’expérience, il y a quelques années de traduire les CGU d’Instagram pour qu’elles soient compréhensibles par des adolescents.
Sa traduction était limpide : une fois ces CGU comprises, vous n’avez plus envie d’utiliser l’outil !"
Bertrand Pailhès : "Les RGPD permettent de faire avancer l’information sur les données que l’on partage, et poussent les internautes à porter plainte à la CNIL (Commission nationale informatique et libertés)."
Quelques petits conseils simples pour naviguer avec plus de sécurité
Bertrand Pailhès : "D’abord faire attention à ce qu’on partage, en respectant le droit des autres. Si on publie les photos d’autres personnes, leur demander l’autorisation. Ensuite faire attention à ses mots de passe sur les réseaux sociaux : ce sont les premiers sites attaqués, car une fois que des pirates ont y accès, ils ont accès aux mails… D’une manière générale, s’éduquer et éduquer nos enfants".
Jérôme Colombain : "Pour voir si vous êtes cybersurveillés, faites régulièrement de l’égo surfing : taper votre prénom et nom dans un moteur de recherche pour voir si des choses gênantes circulent sur vous".
Et techniquement ?
- Utilisez la navigation privée
- Réglez la gestion des cookies
- Configurez votre historique
- Utiliser le plus possible le protocole HTTPS (rajoutez un "s" dans la barre d'url au "http")
- Utiliser un proxy (serveur distant qui se substitue à votre identité)
- Cryptez vos données
- Effacez vos données/supprimez votre historique de navigation.
En cas de revenge porn ?
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Dans le film Effacer l’historique, de Benoît Delepine et Gustave Kervern, le personnage de Blanche Gardin fait face à un cas de revenge porn : une publication de photos ou de vidéos à caractère sexuels très compromettantes. Bertrand Pailhès conseille "de demander à la personne d’enlever l’image, et si ça ne suffit pas de porter plainte à la CNIL qui a obligation d’instruire le dossier.
**Ensuite, on peut voir avec l’hébergeur s’il est possible de supprimer les photos. Sinon, on peut aller devant un tribunal, des articles de la loi République numérique sanctionnent pénalement ce type d’acte (**diffusion d'images à caractère sexuel sans le consentement de l'intéressé)".
ECOUTER | Grand bien vous fasse sur les traces sur le numérique
Avec : ·
- Anne-Sophie Jacques et Maxime Guedj, journalistes, auteurs de Déclic (ed. Les arènes)
- Jérôme Colombain, journaliste à France Info, auteur de Faut-il quitter les réseaux sociaux ? (ed. Dunod)
- Michael Stora, psychologue
- Bertrand Pailhès, directeur des technologies et de l'innovation de la CNIL