Egalité femmes-hommes : pour le dernier 8 mars du quinquennat, l'heure du bilan dans la rue
Par Claire ChaudièreUn appel à cesser le travail aujourd'hui, toute la journée ou quelques heures seulement, dans le cadre d'un mouvement de grève féministe, est lancé par plusieurs syndicats et organisations. Les femmes gagnent encore 22% de moins que les hommes, au global.
Dernière journée internationale du droit des femmes du quinquennat, et retour dans la rue après deux années de crise sanitaire... "C'est marrant, cette année on sent vraiment que la grève féministe commence à avoir du poids. Il y aura des débrayages, des AG dans les entreprises. C'est devenu un moment incontournable, même si la mobilisation n'est pas encore aussi massive qu'en Espagne. Le fait que les grands groupes du CAC 40 aient engrangé les profits pendant la crise génère aussi de la colère, qui va s'exprimer dans la rue. On va voir que quand les femmes s'arrêtent, tout s'arrête. Il y aura les femmes de ménage, les aides soignantes des Ehpad, les accompagnantes d'élèves en situation de handicap..." sourit Anne Leclerc du collectif "On arrête toutes" mobilisé en ce 8 mars 2022, comme une soixantaine d'organisations, syndicats et partis politiques autour du mouvement de grève féministe.
Des disparités salariales "qui ne bougent pas"
Premier constat : les écarts de salaires entre femmes et hommes n'ont pas véritablement régressé, malgré la mise en place de l'Index de l'égalité par le gouvernement. "Dans la fonction publique, ça n'a pas bougé depuis le début du quinquennat ! On est à 20% d'écarts. 27% si l'on ne prend que les salariées dans l'administratif", regrette Sigrid Girardin pour la FSU.
Il y a les salaires, mais aussi les pensions de retraite. On atteint encore aujourd'hui 40% d'écarts entre les pensions des hommes et celles des femmes. Insupportable.
Du côté de l'exécutif, on assure que les efforts ont pourtant porté leur fruit, et permettent progressivement de réduire l'écart de rémunération à poste et ancienneté équivalente. On brandit une note globale obtenue à l'Index 2022 avoisinant les 86 points sur 100, en augmentation d'un point par rapport à l'an dernier. Dans une interview aux Echos, la ministre Elisabeth Borne rappelle par ailleurs qu'"_une grande partie de l'écart salarial, évalué à 22% en France, résulte de l'écart dans l'accès à des emplois à temps plein et bien rémunérés__, au delà de l'enjeu du salaire égal pour un poste équivalent_". En clair : ces disparités résultent de freins sociétaux plus compliqués à combattre, mais aussi de choix dans l'orientation scolaire des filles et des garçons.
Travailleuses essentielles : des revalorisations sectorielles insuffisantes pour résorber le différentiel
Sophie Binet de la CGT ne partage pas cette vision. "Il faut tout de même rappeler qu'au lieu de déboucher sur plus de transparence, l'Index de l'égalité organise une forme d'opacité sur les inégalités de salaire", estime-t-elle. Ce qui freine, selon elle, les avancées dans les entreprises. Concernant les secteurs très féminisés : "Les revalorisations de ces derniers mois n'ont pas été à la hauteur. On a préféré sortir la calculette, au lieu d'appliquer la loi qui dit que des métiers de valeur égale doivent être rémunérés de la même manière", poursuit-elle. Une loi qui fêtera cette année ses 50 ans.
Dans le cortège parisien cet après-midi, Maria, femme de ménage, a prévu de venir porter ces messages. Elle raconte deux années très dures. "Travailler vite, vite, vite... en plein confinement, subir des heures de transports, se lever au petit matin. On a tout fait. Et que se passe-t-il aujourd'hui ?" demande cette professionnelle qui a passé des années à nettoyer des bureaux à La Defense. A 15h40, heure symbolique à partir de laquelle les femmes travaillent gratuitement, les salariées en télétravail sont, elles aussi, invitées à se déconnecter et à rejoindre dans la rue...les "premières de corvée".