"En ville, tout le monde connaît mon fils" : quand l'école inclusive aide les enfants handicapés à s'intégrer
Par Lisa Guyenne
C'est l'une des priorités affichées par le gouvernement : l'école "inclusive", plus ouverte aux enfants porteurs de handicap. Ces derniers sont aujourd'hui près de 400 000 à être scolarisés dans des écoles publiques. Une façon de sociabiliser ces enfants, mais aussi d'éduquer les autres à la différence.
À l'école maternelle Louis-Pasteur d'Epinay-sur-Seine, en banlieue parisienne, plusieurs dizaines d'enfants font leur rentrée des classes, ce lundi 2 septembre. Parmi eux, Ferhat, un petit garçon de 5 ans. Sa particularité ? Il est autiste, et ne s'exprime pas verbalement. Cela fait deux ans qu'il est scolarisé ici, dans cette école ouverte à tous les enfants mais qui propose une classe spéciale : l'UEMA, pour "Unité d'enseignement maternelle autisme".
Une unité d'accueil pour les enfants handicapés, à l'intérieur d'une école "classique"
"Ça s'est bien passé ce matin, il n'a pas pleuré", sourit son père, Mounir. "Ce sont des enfants qui n'aiment pas le changement, ça les perturbe. Mais là, dès qu'il est rentré en classe, il a pris ses marques. En plus, l'équipe est la même depuis trois ans, ça facilite les choses."
Une équipe de sept à huit professionnels de santé et d'éducation - un enseignant, un psychologue, un psychomotricien et des éducateurs spécialisés - pour seulement sept enfants, ce qui permet d'adapter le programme à chacun. "Jusqu'à présent, l'enseignement se pratiquait souvent au sein des structures spécialisées où étaient accueillis ces enfants. Maintenant, ce sont les professionnels du handicap qui viennent dans l'école", explique Marc Dewys, à la tête de l'institut médico-éducatif Adam-Shelton, à Saint-Denis, et directeur de l'UEMA d'Épinay.
"Ils vont à la cantine, en récréation, en sortie scolaire avec les autres enfants"
Mais en-dehors des temps d'apprentissage, les enfants autistes sont intégrés aux autres élèves : "Ils vont à la cantine avec les autres, en récréation avec eux, participent aux spectacles et aux sorties scolaires, et passent du temps dit 'en inclusion', dans les classes, plusieurs fois par semaine", détaille Delphine Altenbourger, enseignante à l'UEMA. Une manière de sociabiliser ces enfants : "C'est très intéressant pour les échanges, la communication, l'apprentissage des règles de vie. Ils fonctionnent beaucoup avec l'imitation : si un enfant joue, ils vont le regarder et l'imiter."
Par ailleurs, l'inclusivité permet aussi d'éduquer les autres élèves à la différence, comme l'explique Mounir : "Je le vois bien, à Épinay, quand nous allons au parc ou au centre commercial, tout le monde le reconnaît. Les enfants disent 'Oh, c'est Ferhat !' Ils veulent s'amuser avec lui, ils font attention à lui. Je pense que c'est une manière d'initier les autres enfants au handicap." La secrétaire d'État aux personnes handicapées Sophie Cluzel veut voir plus loin : "On crée ici la tolérance qui fait que ces futurs adultes, futurs employeurs pour certains, n'auront plus peur de la différence et n'hésiteront pas à recruter des handicapés."
La question de la continuité de l'apprentissage est aussi centrale. À Épinay-sur-Seine, le petit Ferhat pourra poursuivre son cursus en unité éducative, s'il en a besoin, car une classe de primaire vient d'ouvrir dans une école voisine. En cette rentrée 2019, on dénombre en France 159 unités éducatives en école primaire (maternelle et élémentaire). Le gouvernement veut doubler ce chiffre d'ici la fin du quinquennat.