
Vincent Josse consacre ce dimanche son Grand Atelier à Françoise Sagan. Extrait.
Françoise Sagan, pour beaucoup, c'était la vie. La vie à cent à l'heure, la passion des voitures de sport et du jeu, la carrière fulgurante, une apparente désinvolture, les boîtes, l'alcool, les amours, les dettes... et une oeuvre. Des romans et des pièces dans lesquels aussi la vie est en relief : le cœur bat la chamade, les amours font des bleus à l'âme, les lits sont défaits, les femmes fardées et les faux-fuyants assumés.
Sagan c'était la vie. Une vie que pourtant elle faillit perdre à 22 ans, au volant de son Aston Martin. Un accident de voiture qui la laissa quelques temps entre la vie et la mort, et dont elle se remit indemne mais dépendante aux médicaments. Cette addiction la conduisit en cure de désintoxication, racontée sans fard dans Toxique, illustré par Bernard Buffet : "Je me suis habituée peu à peu à l'idée de la mort comme à une idée plate, une solution comme une autre si cette maladie ne s'arrange pas."
Vivre si intensément après avoir, si jeune, frôlé la mort... forcément, ça laisse des traces et de nombreux journalistes interrogent Sagan sur son rapport à la mort. C'est le cas en 1973 sur France Culture, avec le journaliste, réalisateur et producteur de télévision française André Halimi. A ses questions, Françoise Sagan répond, désarmante de franchise et d'humour mêlés :
On vous donne plein de cadeaux qui sont la vie, les arbres, le soleil, les printemps, les automnes, les autres... et on sait qu'un jour on va vous enlever tout ça. C'est pas gentil, c'est pas bien, c'est pas honnête.
Françoise Sagan évoque la mort
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En 1994, à l"occasion de la parution d' Un chagrin de passage (dans lequel le héros, Matthieu, apprend qu'il va mourir dans six mois d'un cancer des poumons) Laure Adler reçoit Sagan dans Le Cercle de Minuit et l'interroge sur la peur de la mort et le désir de vivre... et Françoise Sagan botte en touche, avec toujours ce mélange désarmant de candeur et d'ironie :
La vie, la mort... je n'ai pas d'idées générales (...) Il y a tellement de gens qui vous paraissent morts et qui sont vivants... !
Le mot de la fin
En 1998, pour un livre consacré aux écrivains, Le Dictionnaire (François Bourin éditeur), son ami Jérôme Garcin lui demande de rédiger son épitaphe. Quelques lignes savoureuses, "improvisées sur un bout de papier en trois minutes, comme elle aurait fait la liste des courses" se souvenait-il en janvier 2017 dans Télérama .
« Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, Bonjour tristesse, qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »
Retrouvez Françoise Sagan, dimanche, dans "Le grand Atelier" de Vincent Josse qui consacre deux heures au "charmant petit montre" comme la surnommait André Malraux.