
Au premier jour du procès de Georges Tron et de son ancienne adjointe à la mairie de Draveil, renvoyés pour viols et agressions sexuelles, la parole a été donnée aux accusés. La cour d'assises de Bobigny a brièvement examiné leur personnalité.
Difficile d'imaginer deux ambiances plus différentes.
On s’en souvient, le procès Tron avait commencé en décembre dernier, devant la même cour d'assises de Bobigny, dans un contexte extrêmement tendu. Deux mois après le scandale Weinstein et la déferlante #MeToo, ces tensions, alliées à la maladresse du président, avaient fait voler le procès en éclat.
C'est désormais Philippe Coirre qui mène les débats, d'un ton ferme et courtois, encadré de deux magistrates. Le nouveau jury comprend quatre hommes et deux femmes. Et la justice n'est pas passée, cette fois, à côté de la dimension symbolique du procès : on a dégagé quatre semaines d'audience. Quand à Eric Dupond-Moretti, qui défend ici l'ex ministre, à peine l'a-t-on entendu bougonner contre l'absence d'un témoin.
Ce mardi 23 octobre, la cour examine pour commencer la personnalité des accusés. Le président demande à chacun sa position vis à vis des faits. Brigitte Gruel commence. L'ex adjointe de la mairie de Draveil était arrivée au tribunal emmitouflée dans un bonnet, enrubannée d'une écharpe, cachée derrière des lunettes noires. À la barre, cheveux châtains aux épaules, cette femme de 61 ans s’exprime d’une voix sourde. "J’ai vécu un enfer depuis 7 ans" explique-t-elle. Brigitte Gruel est redevenue "femme au foyer" après des années d'engagement, d'abord auprès de l'Association des amis de Georges Tron, puis à la mairie en 2008. "Tout est faux" dit-elle. "J’ai été l’objet de vengeance, de jalousie, personnelle et professionnelle, on m’a traînée dans la boue... Tout cela a été orchestré par les deux plaignantes et par nos opposants politiques du Front national." Le président l’arrête, "On y reviendra au cours du procès madame", il n'est pas encore temps.
C’est ensuite au tour de Georges Tron. "Je l’ai toujours dit. Je suis innocent, je n’ai jamais été violent avec qui que ce soit" appuie-t-il, la voix assurée, les mains sur la barre, sa haute stature légèrement penchée en avant. Il rejette ce qu'il qualifie d’accusations "aussi abjectes qu’injustes".
Au premier rang, Virginie Ettel écoute calmement. Elle est l'une des deux plaignantes qui accuse ses deux anciens employeurs de l'avoir agressée et violée. Elle s’attendait à cette défense. "Comme ils nient depuis le début, il faut bien qu'ils trouvent une explication" dit la quadragénaire aux longs cheveux blonds. "Alors c'est forcément de notre faute, vengeance, complot, je ne sais pas...." Sa voix se voile. "Ça fait sept ans qu'on l'attend ce procès, on a porté plainte en 2011. Alors oui, je suis prête. Tout le monde n'a pas la chance de pouvoir s'exprimer dans un procès d'assises. J'ai conscience que ça ne va pas être facile, mais j'ai confiance en moi, et dans le dossier. J'espère que ma parole, cette fois, va être écoutée : ce qui compte, c'est que ce soit le tribunal et les jurés qui l'entendent."
Après ce premier round d’observation, l’examen de personnalité des accusés est expédié en quelques minutes ; dans un calme qui contraste avec la tension palpable ici même l’an dernier. La cour entre mercredi dans le vif du sujet avec l’audition des premiers témoins.