"Glass" : le cinéma de Night Shyamalan vertement tancé au "Masque"

"Glass" est le dernier volet du triptyque fantastique de Night Shyamalan commencé avec "Incassable" et "Split". On y retrouve donc James McAvoy, Bruce Willis et Samuel L. Jackson. Le film rencontre un énorme succès en salles et une critique féroce au "Masque". Seul Jean-Marc Lalanne le défend, envers et contre tous…
Le film résumé par Jérôme Garcin
Bruce Willis, alias David Dunn, l’"incassable" justicier est lancé dans Philadelphie à la poursuite de James McAvoy, alias Kevin Crumb, le schizophrène aux 23 personnalités. Ils vont direct à l’hôpital psychiatrique où est interné depuis 16 ans Mr Glass (Samuel L. Jackson), qui a des os de verre. Ce dernier attend cet affrontement décisif avec une curiosité de metteur en scène. Tandis que la psychiatre aux cheveux rouges, Ellie Staple (jouée par Sarah Paulson), veut au contraire réunir les deux surhommes pour les libérer de leur délire.
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Pierre Murat estime que Night Shyamalan est un très mauvais réalisateur
PM : Night Shyamalan n'a jamais fait que le Sixième sens de bien, il faudra qu'un jour on le dise. Pratiquement tout le reste, ce sont quand même des "navetons" fantastiques.
Tout cela est absolument sans intérêt. C'est toujours construit de la même façon chez Night Shyamalan. Ce cinéma commence à me lasser parce que c'est, contrairement aux apparences, un cinéma extrêmement peu inventif.
Jean-Marc Lalanne a trouvé le film très fort
JML : À mon avis, Night Shyamalan a fait plusieurs très grands films, par exemple The Visit (2015) : en baissant de niveau de production, il retrouvait une nervosité de série B où il redevenait un grand cinéaste. Glass est à la croisée des deux : il y a quelque chose d'électrique comme dans une série B et en même temps, Night Shyamalan recycle toute sa réflexion sur ce qu'est un super héros, ce qu'est une fiction qu'il avait entamé dans ses films d'il y a vingt ans...
Le film me fascine et me procure un plaisir très vif de cinéma d'action, avec une économie de moyens impressionnante : c'est un huis clos et en même temps c'est haletant, spectaculaire, ça déconstruit tous les codes du film de super-héros. Comparé à un film Avengers : ça se passe dans trois pièces, il y a très peu d'effets spéciaux, c'est le contraire du spectaculaire du cinéma super-héroïque d'aujourd'hui.

Je trouve génial James McAvoy : il est complètement clownesque mais en même temps hilarant et terrorisant. Je le trouve vraiment remarquable. On a l'impression que dans la manière dont il zappe d'une personnalité à l'autre, il couvre tous les possibles de ce que peut un comédien mais d'une façon vibrionnante, folle, qui me fascine et me fait rire.
Je trouve que le film est très fort sur l'époque. Il y a une part de confusion, mais qui renforce ce que le film a de fascinant. Ça ressemble au monde dans lequel on vit. Ça brasse tout : on peut penser aux gilets jaunes, à Trump… compression de toutes les peurs et de toutes les angoisses de l'époque, ça en fait un objet fascinant et contemporain.
Eric Neuhoff : "c'est le grand guignol complet"
EN : On n'y comprend rien, c'est une ragougnasse ! Ce n'est pas un triptyque, ce que Night Shyamalan a fait, c'est une espèce de bouillabaisse avec tous les vieux restes de ses films précédents ! Au départ, je n'ai pas l'impression qu'Incassable était prévu pour avoir une suite ou même un troisième épisode. Pourquoi pas, s'il veut faire croire ça.
Tous ces gars là se retrouvent dans le même hôpital psychiatrique : sans doute que la psy avait vu les deux films et s'était dit "il faut qu'ils soient avec moi". Il y a Samuel L. Jackson, prostré sur une chaise, il met une heure à bouger un petit doigt. On est un peu dans le même état, à voir tous ces trucs là. Tout à coup, on découvre que ces tueurs en série (sauf Bruce Willlis) étaient des super héros. On ne sait pas pourquoi d'ailleurs. C'est le grand guignol complet. C'est le Vol au-dessus d'un nid de coucous pour geeks qui aiment les bandes dessinées débiles (pardon Jean-Marc)

À la fin, on est menacé d'un quatrième épisode ! Et si le film a marché si bien que ça, on va y avoir droit… Je regrette le Shyamalan des débuts. On l'aperçoit à un moment donné, il joue un petit rôle de vendeur : c'est ce qu'il a fait de mieux dans le film.
Michel Ciment : "aucune intelligence du récit mais une série d'effets"
MC : Il y a un quarteron international de metteurs en scène : Gaspar Noé, Nicolas Winding Refn, Lars Von Trier, Night Shyamalan : ce sont des gens qui effectivement, comme le dit Jean-Marc, reflètent la confusion du monde mais ils se contentent de refléter la confusion par leur propre confusion. Ce que j'attends des grands artistes, c'est qu'ils m'éclairent le monde, qu'ils me fassent comprendre cette confusion !
C'est vrai que le monde dans lequel ont vit est terrifiant. Plus les chose sont complexes, plus on doit faire preuve d'une intelligence du récit. Il n'y a ici aucune intelligence du récit mais une série d'effets. D'ailleurs, le film est aussi fragile que les os d'Elijah Price…
Aller plus loin
► Le film de Night Shyamalan est dans les salles de cinéma depuis le 16 janvier 2019
🎧 Écoutez l'ensemble des critiques échangées à propos du film sur le plateau du Masque et la Plume...
"Glass" de Night Shyamalan : les critiques du "Masque & la Plume"
6 min
Chaque dimanche à 20h, retrouvez les critiques du Masque et la Plume réunis autour de Jérôme Garcin pour parler cinéma, théâtre ou littérature.
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