Impayés de loyers : "Certains locataires qui tenaient, tant bien que mal, s'effondrent aujourd'hui"

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Impayés de loyers : "Certains locataires qui tenaient, tant bien que mal, s'effondrent aujourd'hui"

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Eliane, bénévole, répond aux sollicitations au sein de la plateforme téléphonique de la Fondation Abbé Pierre.
Eliane, bénévole, répond aux sollicitations au sein de la plateforme téléphonique de la Fondation Abbé Pierre.
© Radio France - Claire Chaudière

Réunis à l'initiative du gouvernement dans le cadre du nouvel "Observatoire sur les impayés de loyers", les acteurs du logement ont fait part hier de leur inquiétude. Pas de déferlante d'impayés mais des signaux d'alerte. Et les ADIL, (associations pour l'information sur le logement), sont de plus en plus sollicitées.

"Pas encore d'avalanches d'impayés de loyers, mais des indicateurs qui nous alertent, et doivent nous pousser à être extrêmement vigilants". Dans son diagnostic, Roselyne Conan, la directrice générale de l'ANIL, l' Association nationale pour l'information sur le logement, reste mesurée, mais les chiffres sont bien là, dit-elle : "Nous avons 15% de sollicitations supplémentaires en octobre par rapport au même mois l'année dernière, et la tendance se poursuit en novembre. Il y a un frémissement. Clairement de nouveaux profils de personnes viennent nous solliciter : les jeunes, mais aussi des indépendants, qui commencent à décrocher après avoir tenu, pendant des mois, grâce aux aides de l'Etat et en puisant sur leurs économies.

Dans le prétoire
2 min

Éviter l'engrenage

Même constat à la Fondation Abbé Pierre où malgré le confinement et la trêve hivernale, la permanence téléphonique de prévention des expulsions reste en service. "Ceux qui nous appellent ne sont pas forcément des gens que l'on pourrait qualifier de très démunis", explique Eliane, bénévole, qui répond aux appels : "Ce sont des actifs, des retraités, qui ne peuvent plus payer leur loyer. Le gros problème, c'est qu'ils nous contactent souvent très tard, alors que leur situation est déjà très dégradée, avec des mois d'impayés derrière eux."

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Si l'on n'agit pas tout de suite, le niveau d'endettement peut augmenter assez rapidement. Ils ont ensuite beaucoup de mal à remonter la pente.

Au bout du fil : des locataires anxieux, qui demandent une assistance juridique et ont besoin d'être écoutés. L'un d'eux a vu ses revenus baisser lors de son passage en retraite : "Je n'y arrive pas avec 930 euros par mois. Je dois payer 300 euros de loyer dans le parc social mais autant de charges d'électricité ! Cela ne rentre pas dans mon budget. Je n'ai pas la solution." Si, avant la crise sanitaire, certains retraités pouvaient "s'en sortir" avec des "petits boulots" non déclarés, c'est beaucoup plus difficile aujourd'hui, acquièce Eliane.

On voit bien que certains locataires, fragiles depuis des mois, ont puisé dans leur réserves et s'effondrent en ce moment, avec le deuxième confinement.

Lors d'un deuxième appel, il faut apporter des informations sur les délais de réponse des tribunaux en cas de litige. "J'ai envoyé mon dossier en septembre, toujours aucun retour, ni date d'audience", s'inquiète une locataire. "La crise sanitaire a entraîné beaucoup de retard sur les dossiers, car certains services publics tournent encore au ralenti. Les assistantes sociales sont débordées__. Les hébergements d'urgences sont aussi saturés. Le contexte complique notre action et les personnes qui nous appellent peuvent être très angoissées", poursuit Marie Rothanh, juriste à la Fondation Abbé Pierre. 

Des aides insuffisantes ou aux critères d'accès trop restrictifs ?

"Il est important de rappeler qu'il existe des aides__. Appelez-nous, informez-vous, dès aujourd'hui si vous êtes en difficulté", insiste Roselyne Conan à l'ANIL : "Il y a le Fonds de solidarité pour le logement, abondé au niveau de chaque département, des aides locales, mais aussi les aides d'Action Logement, avec une enveloppe de 100 millions d'euros, qui peut permettre à de nombreux salariés de ne pas tomber dans les impayés de loyers.

Des aides qui ne suffiront pas pour la Fondation Abbé Pierre : "Ces nouveaux profils de commerçants, indépendants, petits patrons dans l'hôtellerie ou la restauration, qui ne peuvent plus payer leur loyer, ne rentrent pas, du fait de leur statut, dans les critères pour obtenir l'aide d'Action Logement par exemple ! Nous demandons un assouplissement des critères d'accès à cette aide, mais aussi et surtout un fonds d'aide aux impayés à hauteur de 200 millions d'euros" pour éviter des situations dramatiques au printemps prochain. 

  • Pour joindre les ADIL un numéro : 0 805 160 075
  • Pour joindre la plateforme de la fondation Abbé Pierre Allo Prévention Expulsion : 0 810 001 505