Inclusion économique : plus de diversité en entreprise générerait 0,4% de croissance par an
Par Claire Chaudière
L'insertion professionnelle de centaines de milliers de jeunes aujourd'hui sur le carreau pourraient générer jusqu'à 0,4 point de PIB supplémentaire, selon des économistes. Un panel de grandes entreprises doit aujourd'hui s'engager sur des objectifs chiffrés de recrutement de jeunes issus des quartiers prioritaires.
Alors que se tient aujourd'hui à Bercy le premier sommet de l'inclusion économique, à l'initiative de la fondation Mozaïk RH, le Cercle des économistes publie une note évaluant l'impact sur la croissance de l'insertion des jeunes "NEETS", ni en emploi ni en formation. Elle aborde aussi la situation des jeunes qualifiés issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui rencontrent eux aussi des difficultés. Discriminations, ségrégation territoriale, décrochages... "Leur mauvaise insertion est un immense gâchis", affirment les auteurs de cette note en introduction. "Les études que nous avons menées et qui doivent être poursuivies, indiquent que si l’on développait des politiques efficaces pour résoudre ces deux problématiques d’insertion, nous pourrions gagner environ 0,4 % de croissance annuelle."
Baisse des coûts, nouveaux gains
Cette estimation résulte de plusieurs projections. D'abord : la suppression du coût pour la société lié à l'inactivité de ces jeunes. En 2011, une étude de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound) estimait ce coût à plus de 12 000 euros par NEET pour la France, au-delà de la moyenne européenne qui s’élevait à 10 651 euros. Ensuite : le gain potentiel pour l'économie lié à l'arrivée d'une nouvelle main d’œuvre considérable. "Avec 1,5 millions de jeunes éloignés de l'emploi, l'impact serait absolument majeur ! On ne se rend pas compte à quel point cette situation est non seulement socialement inacceptable mais un véritable handicap pour la croissance", interpelle Jean-Hervé Lorenzi, président du directoire du Cercle des économistes.
Pour les profils les plus diplômés, il est désormais prouvé que l'arrivée de profils différents dans les entreprises est rentable, poursuit Saïd Hammouche, de Mozaïk RH. "A court terme, si vos salariés ont tous le même profil, vous gagnez peut-être du temps lorsque vous lancez votre projet, mais très vite, la diversité va vous permettre d'aller plus loin, et de gagner de nouveaux marchés", estime-t-il. Selon une étude du cabinet McKinsey, "les entreprises où la diversité est une réalité sont jusqu’à 36% plus susceptibles d’avoir de meilleurs résultats financiers."
En finir avec les coups de com' autour de la diversité
Pourtant la dynamique n'est pas véritablement au rendez-vous. "Si le chômage baisse clairement au niveau national, la diminution est moins forte pour les jeunes. Si l'on regarde dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, là on voit que ça stagne complètement", regrette Saïd Hammouche. Tout un symbole, les traditionnels Trophées de la diversité, lancés par Mozaïk RH, qui récompensaient depuis quatre ans les recruteurs engagés dans ce domaine, ont été abandonnés. "Lors de la dernière édition, nous n'avons pas trouvé suffisamment d'entreprises, avec des pratiques réellement impactantes. Pourtant nous avons cherché, enquêté. Il nous a fallu nous résoudre à changer de méthode. Désormais on veut pousser les entreprises à s'engager, à adopter les outils qu'on leur propose, à sortir des coups de communication et du déclaratif", dit-il.
Pour passer à l'action, la fondation demande aux entreprises présentes ce lundi à Bercy de s'engager sur des objectifs chiffrés de recrutements de jeunes issus des quartiers prioritaires, avec des bilans réguliers permettant d'évaluer l'efficacité des politiques mises en œuvre.