La dernière bande

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La dernière bande

Par

C Honoré
C Honoré
© Radio France - Vincent Josse

Le projet est ambitieux: inventer un spectacle sur un moment précis de la littérature,

ce tournant que des auteurs jeunes à l’époque, à la fin des années 50 ont fait prendre à la littérature, en refusant la narration traditionnelle, en inventant des formes d’écriture nouvelles. Ces auteurs regroupés par l'éditeur de Minuit, sous la bannière du "Nouveau Roman".

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On redoute l’exercice, la dissertation plombante et c’est tout le contraire qui se passe.

Il y a un spectacle, pas de théorie pure, il y a du théâtre pendant plus de trois heures, avec une énergie extraordinaire sur le plateau qui vous contamine sur le champ.

Honoré ne fait pas un biopic sur le nouveau roman, même si ce genre est à la mode.

Il raconte, par une succession de scènes, des moments où les auteurs du Nouveau roman, entourés de leur mentor, l’éditeur jérome Lindon (Annie Mercier), posent les bases de leur mouvement, mais aussi des moments plus triviaux, les moments où ils s’engueulent, ils sont nombreux ! A la question, par exemple de savoir ce qu’ils décident de bruler comme auteurs du passé, eux, l’avant-garde ? Toutes les réponses ne sont pas les mêmes. Butor (Brigitte Catillon) refuse de brûler Sartre! Qu'est-ce qu’on brûle ? Que veut-on veut écrire ? Comment écrire ? C’est quoi, un roman ? Dans les réponses, apparaissent des caractères. Claude Ollier, plus modeste que les autres, dévoré, même, par les autres. Duras, déjà Duras, répond : « Je ne sais pas ce que c’est qu’un roman, personne ne sait, on sait quand il y en a… Mais quand il n’y a rien… On sait comme on sait qu’on n’est pas encore mort! », et toutes ces questions sur le style, l’envie de renouveau de la littérature, posées par des acteurs de toutes générations dans un souci de non ressemblance (Anais Demoustier ne ressemble pas à Duras pas plus que Ludivine Sagnier ne ressemble à Sarraute), toutes ces questions sur la création s’avèrent passionnantes. Les acteurs débattent et s’ébattent dans un décor qui ressemble à la fois au bureau de Jérome lindon et aussi à l’Académie Française, où Alain Robbe grillet sera élu.

Les acteurs ont lu les auteurs qu’ils incarnent, ils savent ce qu’ils ont dit dans des entretiens, de cette matière, ils ont fait des impros retenues ou pas par Honoré.

Alors, s’ébroue sur scène une bande dynamique qui semble avancer en roue libre et qui parfois demande au public de poser des questions, en étant capable de répondre, une bande culottée qui évoque ces jeunes de l’après guerre qui écrivaient, inventaient, tentaient des formes nouvelles dans un esprit commun de renouvellement, malgré des tempêtes, des jalousies, des désirs d’argent et de reconnaissance.

C’est une épopée littéraire et humaine que Christophe Honoré réveille sur scène, par différents moyens : des mots, de la vidéo, de la danse, des chansons, de la musique, avec beaucoup de pertinence.

Il fait du théâtre pour tous et non pour une poignée de spectateurs avertis.

"Nouveau roman",

Texte et mise en scène de Christophe Honoré avec Brigitte Catillon, Jean-Charles Clichet, Anaïs Demoustier, Julien Honoré, Annie Mercier, Sébastien Pouderoux, Mélodie Richard, Ludivine Sagnier, Mathurin Voltz, Benjamin Wangermée Théâtre de la Colline jusqu'au 09 Décembre 2012 Durée : 2h50

du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30

A Toulon les 12 & 13 janvier 2013

A Perpignan les 17 & 18 janvier 2013

Pour écouter l'Atelier de Christophe Honoré et suivre les étapes de cette création, taper sur:

http://www.franceinter.fr/emission-l-atelier-saison-2011-2012-l-atelier-de-christophe-honore