La Ligue du LOL aurait-elle pu continuer longtemps? « Oui et je le déplore », répond la directrice des Inrocks
Par Manon LeterqElisabeth Laborde, invitée de Sonia Devillers dans l'Instant M sur France Inter ce jeudi, a donné plus de détails sur le licenciement des deux journalistes des Inrocks, accusés d'avoir participé à la "Ligue du LOL".
"Si cette histoire de la Ligue du LOL n’avait pas explosé dans Libération, ça aurait pu continuer comme ça longtemps ?" "Oui, et je le déplore." Voici la réponse à la question posée par Sonia Devillers dans l'Instant M sur France Inter à Elisabeth Laborde, directrice générale des Inrocks depuis 2017. Sa parole dans les médias sur cette affaire reste rare. Elle est venue jeudi matin s'exprimer à l'antenne sur le licenciement de deux anciens journalistes de la rédaction mis en cause dans l'affaire de la Ligue du LOL : l'ancien rédacteur en chef David D. et son adjoint François-Luc D.
Elisabeth Laborde a assuré que les Inrocks avaient appris l'existence de la ligue du LOL au moment de la publication de l'article de Libération révélant son existence le 8 février. Un "moment de sidération" a suivi. "Moi j’ai suspendu les deux collaborateurs au motif qu’il y avait un risque de dégradation de l’image du journal, dans la mesure où quand vous êtes rédacteur en chef ou son adjoint, vous incarnez le journal à l’extérieur et ses valeurs", a-t-elle ajouté. Suite à une enquête interne, ils ont dans un deuxième temps "été licenciés pour faute grave".
Il y a eu ensuite un moment de libération de la parole, "c'est à dire que beaucoup de gens qui sont venus me parler pour me dire ce qu'il avait subi ce dont je n'avais aucune idée", a-t-elle ajouté.
"Quand la parole se libère, il faut l'entendre"
Mais ce n'est pas tout. Selon des enquêtes menées par Médiapart, l'Obs ou Le Monde, qui parle de "fonctionnement toxique" aux Inrocks, les deux journalistes auraient eu des comportements non-professionnels au sein de la rédaction encore très récemment. Qu'est-ce qui a favorisé cette atmosphère délétère ? Les témoignages rapportent une camaraderie masculine, une impossibilité de s'opposer à ce club sans subir des remarques, des appels à faire craquer des collaborateurs...
Elisabeth Laborde assure n'en avoir pas eu connaissance à cette époque, mais elle affirme bel et bien qu'un travail de sape a été organisé par David D. aux Inrocks pour "déstabiliser la personne [Christophe Mollo] que je souhaitais et que j’ai depuis nommé secrétaire général de la rédaction. On est venu m’en parler après que j'ai suspendu les deux personnes dont on parle. C’était un autre argument pour les licencier."
Le licenciement de David D. et de François-Luc D. a permis de libérer la parole. "Il faut en tirer des leçons de façon générale, c'est-à-dire qu’on a un problème de libération de la parole dans les entreprises, comme le montre le collectif Prenons la Une qui publie son enquête ce matin. C’est très intéressant. Quand la parole se libère, il faut l’entendre."
Dans un communiqué, les Inrocks avaient indiqué: "nous sommes saisi.e.s par l’acharnement, le sadisme, la pulsion féroce de domination dont ont fait preuve" les membres de la ligue du LOL. "La découverte que des membres de la rédaction des Inrockuptibles ont appartenu à ce groupe a provoqué un vrai choc dans notre journal", était-il ajouté.
MISE À JOUR le 14 mars: Le titre originel de cet article - _"_Sans le scandale de la Ligue du LOL, le harcèlement aurait pu continuer aux Inrocks "déplore" sa directrice" - a été modifié suite à une demande adressée par David D. pour en retirer le mot "harcèlement", aucun "harcèlement" n'ayant été, à cette date, constaté par la justice aux Inrocks.
* à la demande des personnes concernées, certains noms de famille ont été supprimés.