La maison des sons du compositeur Pierre Henry bientôt détruite
Par Élodie Forêt
"Sauvons la maison de Pierre Henry". Un cri du cœur poussé depuis des mois, en vain, par les proches et les fans du compositeur, père de la musique électro, mort en juillet dernier. Ils se battent pour préserver le pavillon parisien dont il était locataire. Racheté par un promoteur immobilier, il doit être rasé.
A l'entrée du 32, rue de Toul, dans le XIIe arrondissement de Paris, les deux gardiennes du trésor accueillent les visiteurs. Bernadette était l'assistante musicale de Pierre Henry, son bras droit. Isabelle Warnier, elle, a été mariée au compositeur. Elle vivait dans cette maison, comme lui, depuis 1971. Depuis quelques mois, elles se battent pour conserver le pavillon. Le ministère de la Culture ayant refusé de le classer, elles ont entrepris un travail titanesque : faire l'inventaire de toutes les archives, bandes magnétiques et peintures concrètes entreposées dans la maison. Elles ont jusqu'à juillet. Les bandes seront ensuite conservées, numérisées, à la BNF.
C'est immense, parce que Pierre n'a jamais arrêté de composer.
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Et ce travail, Isabelle et Bernadette le font le cœur lourd. "Ce sera un déchirement", disent elles, de quitter ces lieux où elles ont tant de souvenirs. Comme ces concerts organisés dans la maison, pour une quarantaine de personnes. Isabelle raconte : "Toute la maison était sonorisée, avec des enceintes dans toutes les pièces. Il y avait du monde partout, jusque dans le lit de Pierre."

Dans le studio d'enregistrement, Bernadette caresse les magnétos analogiques du doigt. "La Rolls du magnéto", sourit-elle. Ici, plus de cent œuvres de Pierre Henry ont été composées. Sa préférée ? La dernière, Fondu au noir.

Accepter, oui. Comprendre... Non
Les deux femmes se sont jetées à corps perdu dans le travail pour ne pas trop penser au futur déménagement. Isabelle n'a pas de colère, seulement des regrets. Et un espoir... Que la maison soit reconstituée virtuellement. Quand aux peintures, magnétos, archives, objets, ils devraient être entreposés dans un local du XIIe arrondissement, trouvé par la mairie. Un lieu qu'Isabelle espère un jour ouvrir au public, pour que l'esprit de Pierre Henry survive à sa maison.