La République en Marche a-t-elle le droit d'acheter de la pub sur Facebook pour inciter à voter ?
Par Julien BaldacchinoUne page Facebook, nommée "La France aux urnes", diffuse sur Facebook des publicités appelant à aller voter ou à faire des procurations pour l'élection présidentielle. Problème : elle est éditée par La République en marche, alors que la publicité des partis politiques est interdite en période électorale.
La page s'appelle "La France aux urnes", elle a été créée récemment, le 25 février 2022, et ne compte que 347 abonnés et quatre publications. Pourtant, comme cela a été relevé sur Twitter, cette page semble poser un problème de droit : elle diffuse, au nom de La République en marche, des publicités politiques, pratique strictement interdite en France en période électorale. C'est Valerio Motta, ancien conseiller en communication du Secrétariat d'État aux Droits des Femmes pendant le mandat de François Hollande, qui l'a relevé sur le réseau social.
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La filiation entre cette page et le parti d'Emmanuel Macron n'est pas dissimulée : chaque publicité mentionne que la publication est "sponsorisée et financée par La République en Marche" (une obligation mise en place par Facebook pour assurer la transparence des publicités politiques), et la description de la page Facebook mentionne "La France aux urnes est éditée par La République en Marche pour promouvoir le vote aux élect" (sic, le mot est coupé dans la description). Tous les liens des publicités, ainsi que le lien principal de la page Facebook, pointent non pas vers le site de LREM mais vers le portail Service-public.fr.
56 campagnes de publicité en un mois
La page "La France aux urnes" est sans aucun doute un simple outil publicitaire : Grâce aux outils proposés par Meta, la maison mère de Facebook, on découvre qu'il existe en réalité 56 campagnes de publicité qui ont généré plusieurs dizaines de millions d'affichages – bien loin des quatre publications et 347 abonnés. Jusqu'au 4 mars, les publicités portaient sur l'inscription sur les listes électorales : sur la seule période du 1er au 4 mars, on compte 16 publicités différentes qui ont été générées, pour des budgets allant de moins de 100 euros à 1500€.
On trouve ensuite un trou du 4 au 23 mars, et depuis le 23 mars, de nouvelles campagnes portant donc sur le vote par procuration. Avec des budgets plus importants : la publication sponsorisée qui diffuse un événement intitulé "Premier tour de l'élection présidentielle" a coûté entre 10 000 et 15 000 euros, pour plus d'un million d'affichages. Si on ne connait pas leurs critères de ciblage exacts, on voit que l'audience touchée réside majoritairement en Île-de-France.
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Problème : le code électoral mentionne que pendant les six mois avant l'élection, "l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale (...) est interdite". Seule exception autorisée, les appels aux dons pour financer les campagnes. Ces publicités ne figurent donc pas dans ce cas-ci.
La question de l'impact des publicités posée par le Conseil d'Etat
En revanche, en 2021, le Conseil d'État a rendu deux arrêts sur des affaires concernant les élections municipales de 2020, où des candidats avaient été pointés du doigt pour avoir acheté de la publicité sur Facebook – et l'une d'entre elles concernait notamment un message d'incitation à faire une procuration. Dans les deux cas, le Conseil d'État a confirmé les élections, indiquant qu'il était impossible de prouver que ces publicités avaient eu un impact sur le scrutin.
Difficile, donc, de savoir si ces publicités tombent sous le coup de la loi. Il s'agira, pour les institutions chargées de contrôler la régularité des élections, de savoir si elles peuvent être définies comme de la propagande électorale ou non, question difficile à trancher car elles sont bien financées par un parti mais ne font pas la promotion d'un candidat.
Depuis le début de la campagne, d'autres candidats ont contrevenu à cette interdiction de faire de la publicité politique sur Internet : c'est le cas d'Eric Zemmour et de son parti Reconquête. Là aussi les publications jouent avec les règles, car les publications ne font pas la promotion du candidat, dont ni le nom ni l'image ne sont visibles, mais appellent à adhérer au parti.
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