Le parc national des Cévennes, situé à cheval sur les départements de la Lozère, du Gard et de l'Ardèche, reçoit lundi 13 août, le label mondial "Réserve de ciel étoilé". Il n'en existe que 12 au monde dont celle du Pic du Midi, en France. Celle du parc national des Cévennes est donc la treizième.
Le parc national des Cévennes devient la plus grande réserve européenne couronnée du label RICE "Réserve internationale de ciel étoilé". Ce label est décerné par l'association internationale qui fait référence en la matière : l' International Dark-Sky Association (IDA). Elle a établi les critères pour certifier les régions où la pollution lumineuse est minime.
Pour plus d'un tiers de la population mondiale il est impossible d'observer les étoiles, constellations ou même la voie lactée en raison d'un éclairage artificiel excessif. Mais ce n'est pas le cas au parc national des Cévennes, à cheval sur les départements de la Lozère, du Gard et de l'Ardèche.
Sébastien Vauclair est astronome et fondateur du bureau d'études DarkSkyLab, spécialisé dans l'expertise scientifique de la pollution lumineuse et de ses impacts sur les écosystèmes.
Le parc national des Cévennes est un des rares lieux, en tout cas en France et en Europe, où on a une qualité de ciel encore relativement préservée avec un ciel très noir. Malheureusement en Europe et en France ce genre d'endroit n'existe plus trop… Pour avoir un ciel très noir, il vaut mieux aller au fin fond du désert de l'Atacama au Chili.
Pour Anne Legile, la directrice du parc national des Cévennes, ce label est une reconnaissance de la qualité du ciel : "Détenir ce label va nous permettre une valorisation des paysages nocturnes du parc national des Cévennes. Nous allons pouvoir renforcer l'offre touristique qui existe actuellement sur le site. Sur le plan de la protection du ciel et de l'environnement nocturne nous allons également pouvoir sensibiliser davantage, à la fois les habitants du territoire et aussi les acteurs socio-économiques, à la nécessité de préserver cette qualité de ciel."
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Un enjeu pour la biodiversité
Grâce à sa faible intensité lumineuse, le parc national des Cévennes, l'un des seuls de métropole qui soit habité (67 000 habitants), abrite une biodiversité nocturne extrêmement riche : chouettes, hiboux, chauve-souris, papillons de nuits ou encore mammifères. Mais lorsque la lumière est trop présente cela devient un danger pour la biodiversité explique Anne Legile : "Toutes les espèces vivantes sont sensibles à l'alternance jour-nuit qui est indispensable à notre métabolisme. Une grande partie des espèces, que ça soit des vertébrés ou des invertébrés, ont une activité nocturne et sont fortement perturbés lorsque ces alternances de cycle jour-nuit ne sont pas respectées. Et ces alternances sont largement le fait de la pollution lumineuse. Sachant qu'au niveau mondial, l'éclairage artificiel augmente de 6 % par an, ce qui est énorme !"
Romain Sordello, expert à l’agence française pour la biodiversité est un spécialiste de pollution lumineuse. Cela ne fait qu’une vingtaine d’années qu’on a pris conscience de la nécessité de limiter l’éclairage selon lui. "Même si dès le 19ème siècle, on avait compris l’effet délétère sur la faune en voyant des oiseaux morts au pied des tours et des insectes attirés par les lampadaires, on n’en avait pas la même perception, explique-t-il. Aujourd’hui, on sait que cela peut conduire à la mort des espèces. "Soit elles ont attirées vers les points de lumière artificiels et cela les conduit dans un piège de mort (insectes notamment), soit elles l’ont associé à un danger mais s’en prémunissent en ne sortant plus de leur terrier par exemple", ajoute Romain Sordello.
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Un travail collectif
Pour obtenir ce label, le parc national des Cévennes a dû remplir une longue liste de critères établis par l'IDA. Par exemple, "la Voie Lactée doit être facilement visible à l'œil nu". Ou encore, "il ne doit pas y avoir de source de lumière artificielle à proximité produisant un éblouissement important".
Pour cela, il faut que les éclairages publics notamment, soient réduits. Ce qui nécessite l'implication de tous les acteurs présents sur le territoire. "Nous avons signé une convention avec les deux syndicats d'électricité du Gard et de la Lozère, avec qui nous travaillons, pour aider les communes à rénover leur éclairage public, explique la présidente du parc. Aujourd'hui grâce au soutien du parc et des syndicats d'électricité, 26 communes du territoire peuvent investir pour rénover leur éclairage public. Certaines peuvent même faire des économies sur leur facture énergétique, allant jusqu'à 90 %. Ce qui fait un retour sur investissement qui est très rapide de l'ordre de 3 ans."
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Changer l'éclairage public, oui, mais pas n'importe comment
De nombreuses communes ont tendance à privilégier des ampoules LED qui sont moins chères. Un recours à modérer selon l'astronome Sébastien Vauclair : "La majorité des éclairages publics, dans nos rues, est plutôt de couleur orange. Il s'agit, en fait, d'une lumière de type sodium haute pression. Mais de plus en plus, on voit émerger avec les nouvelles technologies des LED. Ce sont des éclairages beaucoup plus blancs. Et si la lumière est plus blanche, ça veut dire qu'elle est composée de couleur bleue. Cette couleur bleue n'est pas sans conséquences. Elle multiplie la formation des halos lumineux dans le ciel et c'est ce qui fait cette fameuse pollution lumineuse."
Depuis quelques années, il existe des LED ambrées qui n'ont pas cet inconvénient et auxquelles il est possible d'avoir recours. Rénover et surtout réduire l'éclairage public semble être une solution pour limiter la pollution lumineuse. Il ne s'agit pas d'éteindre les lumières publiques mais d'éclairer au bon endroit. Et il semble de bon sens, par exemple, d'éviter d'éclairer vers le haut. "Les étoiles n'en ont pas besoin, les façades des maisons non plus, d'autant que ça peut faire de la lumière intrusive chez les particuliers. Il faut surtout éclairer du haut vers le bas", détaille Sébastien Vauclair. Et de poursuivre : "En diminuant les éclairages publics, non seulement on préserve le ciel, l'outil de travail des astronomes, mais on fait d'énormes économies d'énergie, on améliore la vie des citoyens et on protège la biodiversité. Il n'y a vraiment aucune raison aujourd'hui de ne pas commencer à réfléchir à protéger davantage notre environnement nocturne."
Pour les responsables régionaux, ce label est aussi un vecteur d'attractivité touristiques. La réserve du Pic du midi par exemple a imaginé de nouvelles activités comme l'ascension des cols Pyrénéens à vélo par nuit de pleine lune. Sans éclairages publics omniprésents, c'est une expérience qui devient magique selon ceux qui l'ont pratiquée.