Le Conseil constitutionnel appelé à se prononcer sur l'état d’urgence

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Le Conseil constitutionnel appelé à se prononcer sur l'état d’urgence

Il y a eu 360 assignations à résidence depuis le 13 novembre
Il y a eu 360 assignations à résidence depuis le 13 novembre
© MaxPPP

Le Conseil constitutionnel a été saisi au sujet du régime d'assignation à résidence fixé par l'état d'urgence, cadre d'exception décrété après les attentats du 13 novembre. Il doit rendre sa décision ce mardi.

C’est la première fois que les Sages sont saisis sur une "question prioritaire de constitutionnalité" (QPC) depuis l'entrée en vigueur de cet état d'urgence.

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Les explications de Corinne Audouin

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Les explications de Corinne Audouin

Sept militants écologistes assignés à résidence pendant la COP21

"Vous êtes le dernier rempart... A l'heure où l'émotion et la colère semblent l'emporter sur tout autre intelligence, nous venons vous interpeller sur une loi qui confère des pouvoirs exorbitants à l'administration ", a expliqué Me Alexandre Faro, défenseurs d’un des sept militants écologistes assignés à résidence pendant la COP21. Le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative, avait estimé qu'il fallait examiner la conformité de ce régime avec la "liberté constitutionnelle d'aller et de venir" mais n’avait pas permis de mettre fin à ces assignations. Les militants étaient obligés entre autre chose de pointer trois fois par jour au commissariat et de rester chez eux la nuit.

"Nous considérons que les attentats pouvaient justifier l’état d’urgence. Aujourd’hui, ce cadre n’a plus sa justification. Nous laissons trop de pouvoirs à l’administration sans contrôle", explique Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l’homme :

Patrice Spinosi

51 sec

Pour Serge Slama, maitre de conférence en droit public, il est peu probable que le Conseil constitutionnel enjoigne au Législateur de revoir sa copie :

Pour Serge Slama, maitre de conférence en droit public

42 sec

Assignés que sur la foi d'une "note blanche"

L'article 6 de la loi sur l'état d'urgence de 1955, révisée le 20 novembre, stipule que "le ministre de l'Intérieur peut prononcer l'assignation à résidence de toute personne (...) à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics". Deux frères et militants écologistes, Joël et Cédric Domenjoud, n'auraient été assignés que sur la foi d'une "note blanche" des renseignements, non signée et non datée, faisant état de la probabilité de la future participation des intéressés à des manifestations anti-COP21, selon Me Muriel Ruef leurs avocates.

Ce régime d'exception doit durer au moins jusqu'à fin février. D’ores et déjà les avocats pointent le risque d'une prolongation indéfinie face à une menace terroriste qui "ne va pas disparaître dans deux ou trois mois". Par ailleurs, le Conseil d'Etat examine le premier recours d'un homme fiché pour islamisme radical, restaurateur à Bobigny qui conteste son assignation à résidence. Le juge des référés a estimé que le ministère de l'Intérieur, qui avait là encore fondé sa demande d'assignation sur une "note blanche", devait affiner son argumentation, avant de rendre son ordonnance.

2.700 perquisitions administratives et 360 assignations à résidence

Les 2.700 perquisitions administratives et 360 assignations à résidence n'ont donné lieu qu'à "peu de procédures judiciaires" selon les avocats des mis en résidence surveillée. La chancellerie affirme que 488 procédures judiciaires ont été engagées depuis le 13 novembre et 51 personnes écrouées. Le Conseil constitutionnel ne s'est penché qu'une seule fois sur la loi fondant l'état d'urgence. C’était en 1985, au moment de la crise en Nouvelle-Calédonie. Les Sages n'avaient toutefois pas examiné au fond la conformité de ce régime avec les valeurs suprêmes du droit français.

En Conseil des ministres le 23 décembre

Si le Conseil retoque la validité des assignations à résidence, le recours au changement constitutionnel et donc un vote à la majorité des 3/5e du Congrès sera absolument nécessaire. François Hollande a d’ores et déjà annoncé qu’il souhaite modifier la Constitution pour instaurer un état d'urgence "à sortie progressive". Cette mesure permettrait de prolonger certaines mesures au-delà de la durée légale de ce régime d'exception. Ce projet doit être présenté en Conseil des ministres le 23 décembre.