Le Stradivarius détrôné par les violons modernes ?

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Le Stradivarius détrôné par les violons modernes ?

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Les Stradivarius sont rares et chers. Ici un violon de 1684 estimé entre 1,55 à 2,45 millions de dollars lors d'enchères il y a quelques mois
Les Stradivarius sont rares et chers. Ici un violon de 1684 estimé entre 1,55 à 2,45 millions de dollars lors d'enchères il y a quelques mois
© AFP - Isaac Lawrence

Malgré la réputation incomparable qu'ont ces violons anciens, une étude, menée à Paris et New-York sur un panel d'auditeurs, prouverait la supériorité de la lutherie moderne.

Un stradivarius est un instrument - généralement un violon ou un violoncelle - fabriqué dans l’atelier d’Antonio Stradivari dit "Stradivarius" vers 1670. Sur le millier d’instruments fabriqués par Stradivari, plus de 600 ont été conservés et certains sont encore dans un état exceptionnel. Ils ont la réputation d'avoir un son unique, inégalé. Pourtant, une équipe de chercheurs français démontrent qu'à l'aveugle, les violons modernes sont préférés aux Stradivari.

Le violon que j'ai la chance de jouer est un magnifique stradivarius, le Stradivarius Camposelice de 1710

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Svetlin Roussev est premier violon à l'Orchestre Philharmonique de Radio France. Et cela fait cinq ans qu'une fondation japonaise lui prête cet instrument d'exception. La suprématie du Stradivarius, comparativement aux deux violons modernes qu'il possède, n'est pas une légende, selon lui : "Un violon moderne est plus flatteur à l’oreille, puisqu’il va vous 'exploser l’oreille' comme on dit dans le jargon. Mais on n’entendra pas du tout la même chose au fond de la pièce. Alors qu’un instrument plus ancien sonne moins fort à l’oreille, ce sera moins flatteur, mais vous aurez une projection du son incomparable aux lutheries anciennes et même modernes".

Un son '"projetant"

Cette fameuse "projection" du son, c'est justement ce qu'a voulu tester Claudia Fritz. Cette physicienne du CNRS au laboratoire "lutheries acoustique musique" avait déjà réalisé une étude en aveugle auprès de musiciens. Cette fois-ci ce sont 137 auditeurs qu’elle a interrogé, à Paris et New-York : "On entend des arguments comme 'le son grandit avec la distance' ce qui évidemment en thermes physique n’a pas de sens. Donc on voulait essayer de comprendre ce qu’il y avait derrière ça, car même si ça n’a pas de sens physique, ça ne veut pas qu’il n’y a pas quelque chose. Le résultat, c’est que les violons neufs - considérés comme plus 'projetants' - sont préférés."

Prochaine étape pour la scientifique : essayer de décrypter les critères acoustiques objectifs qui départagent les six violons étudiés.

Svetlin Roussev pense qu’un critère échappera toujours à la science, celui de la rencontre entre un musicien et son instrument : "Tous les Stradivarius n’ont pas les mêmes qualités, il faut savoir que ces instruments-là demandent une période de plusieurs années pour être apprivoisés, le stradivarius que Jean-Jacques Kantorow, l’un de mes mentors, avait, il n’y a que lui qui pouvait le jouer. Lorsque moi ou n’importe qui d’autre le prenait, ces instrument ne sonnaient pas du tout. "

A signaler le festival Radio France " A vos archets", les 13 et 14 mai prochains un week-end consacré aux cordes "frottées".