Les radars privés embarqués inefficaces ? Les autorités démentent
Ils flashent moins de dix fois par jour, mais le préfet de la Manche et le délégué interministériel à la sécurité routière démentent l'inefficacité des radars privés embarqués. Emmanuel Barbe met en avant la volonté d'être irréprochable d'un point de vue juridique.
On redoutait qu'ils flashent comme des fous pour rapporter de l'argent. En fait les radars embarqués, confiés à des compagnies et des chauffeurs privés, ne flasheraient pas assez. L'expérience est tentée en Normandie depuis un an, et ce serait un bide selon certaines associations
Les premiers résultats de cette expérimentation ne semblent en effet pas très concluants. Exemple dans la Manche : pour l'instant ces nouveaux radars ont relevé moins de dix infractions par jour, alors que les excès de vitesse sont en forte hausse dans ce département où un quart des radars fixes ne fonctionne plus à cause du mouvement des "gilets jaunes". Les radars embarqués fonctionnent assez peu, essentiellement pour des raisons techniques, mais le but n'est pas de faire du chiffre selon Emmanuel Barbe, le délégué interministériel à la sécurité routière : "On est dans quelque chose de totalement innovant ! Ces voitures, qui sont la propriété de l'État sont conduites par un chauffeur salarié d'une entreprise privée qui suit un itinéraire indiqué par les préfectures, et la voiture fait tout, toute seule. C'est pour ça qu'on a pris le temps de régler tous les problèmes qui se sont posés à nous, ils sont multiples. Nos véhicules sont toujours en circulation, et mathématiquement, un radar arrêté flashe beaucoup plus. J'ai un seul impératif dans cette affaire, c'est le respect de la procédure pénale, et d'apporter des contraventions qui soient inattaquables d'un point de vue juridique et technique".
La pertinence du dispositif n'est "pas remise en cause" selon le préfet de la Manche
Certes, le dispositif se déploie lentement, mais il fonctionne plutôt bien, assure Emmanuel Barbe. À partir de cet été, 24 voitures-radar circuleront en Normandie, elles pourront contrôler près de 200 000 km par mois.
De son côté, le préfet de la Manche a démenti le constat d'échec dans un communiqué : "Ce dispositif, comme toutes les mesures prises dans le domaine de la sécurité routière, contribuent à rendre les automobilistes ou les usagers de la route plus vigilants, plus prudents, et participent à sauver des vies sur les routes du département et de la France. À aucun moment la pertinence de ce dispositif n’a été remise en cause. Enfin, depuis la mise en service des radars, le nombre d’infractions relevées ne cesse d’augmenter".
Pourtant, interrogé sur franceinfo, Rémy Josseaume, avocat à la Cour spécialisé en droit routier et président de l'Automobile-Club des avocats, estime que le système n'est pas prêt d'être mis en place de manière pérenne : "On a beau nous expliquer qu'il ne fait que conduire le véhicule, il n'en demeure pas moins que cet agent privé est bien dans le véhicule qui sert à constater l'infraction. Il y a une autre problématique, c'est que qu'on appelle le prêt de main d'oeuvre illicite qui est interdit en France. D'ailleurs une note interne et confidentielle du ministère de l'Intérieur s'était alertée il y a quelques mois de ce risque de qualification juridique. Donc on voit bien que ce dispositif-là n'est pas prêt d'être mis en place de manière pérenne. De toute façon l'évolution technologique fait que dans 10-15-20 ans, peut-être même encore plus vite, ces problématiques-là seront purgées par le véhicule autonome. Il y a quand même un investissement, un acharnement de l'administration et ce sentiment des usagers de la route de penser qu'ils sont épiés, matraqués, surveillés. En tous cas, on n'arrête pas le progrès, on n'arrête pas l'innovation en matière de sécurité routière, parce que c'est une cause de santé publique, et c'est certainement la seule qui en réalité, même si elle coûte très cher, rapporte aussi de l'argent."