
Maarten Baas est le premier interlocuteur de ce blog acceptant de se prêter au jeu de l’interview automatique… ou pas. Le musée des Arts Décoratifs à Paris lui a donné carte blanche pour exposer « les curiosités d’un designer ». C’est un ensemble de petits décors dans des boîtes noires. Il a installé quelques unes de ses œuvres au milieu d’autres objets. C’est un peu court et frustrant, mais poétiques et ludique.

.
Baas a réussi dans ces petites mises en scène à montrer ses pièces majeures mais il faut les deviner au milieu de mystérieux décors.

Des questions, ses réponses, voici donc l’interview de Maarten Baas, designer allemand. Avec ses lignes courbes, irrégulières, asymétriques ou chaotiques, son travail dénote avec les recherches épurées et le minimalisme de certains designers, sans verser non plus dans le baroque. Mieux vaut aller chercher Baas du côté du surréalisme ou de dada. Il s’est notamment fait connaitre avec une série de meubles dits Smoke. Les meubles de cette série, des pièces de grands créateurs, sont brûlés avant d’être recouverts d’une couche d’epoxy.
1/ Marteen, Intéressons-nous d’abord à la série Smoke. Comment l’idée vous est-elle venue un beau jour de produire un fauteuil calciné ?
Maarten Baas : Smoke est une série conçue pour mon travail de fin d’études. J’ai d’abord réfléchi à ce que nous avions l’habitude de tenir pour certain en matière de beauté. Comment définit-on la beauté? Comment décide-t-on de ce qui est bien ou mal? Je cherchais de nouvelles définitions pour la beauté. Bref, je me posais des tas de questions de cette sorte. C’est comme s’il y avait des règles, que dis-je des lois même, pour savoir comment faire quelque chose de beau.Il y a par ailleurs un désir instinctif à vouloir conserver les choses telles qu’elles sont, mais je pense que c’est contre-nature pour les objets de demeurer en l’état . Les choses ne sont pas comme ça, statiques. Pour la série Smoke, j’ai choisi un siège baroque ultra-connu, et d’autres pièces aussi connues que des icônes, à tel point que les gens savent très bien à quoi elles ressemblent et donc j’ai pris ces objets et je les ai amenés à autre niveau. Le fait de les brûler a pu paraître comme quelque chose de négatif mais je parlerais plutôt d’une libération . Inutile de se cramponner à ce que nous possédons, mieux valait en finir avec ça. Voilà tout ce à quoi je pensais en produisant cette série.


2/ Pourquoi vous en être pris à de grandes signatures du design comme Eames ou Gaudi ?
Maarten Baas : C’était logique, car ces pièces sont immédiatement reconnaissables. Il s’agissait de rendre hommage à mes prédécesseurs, plutôt que de dévaloriser leur travail, contrairement à ce que les gens ont pu croire.
3/ Avant de brûler un siège, aviez-vous connaissance du travail d’Arman (ses combustions, Le Fauteuil d’Ulysse par exemple) ? Que vous inspire le travail de cet artiste ?

Maarten Baas : Oui, Arman est l’un de mes artistes préférés. Utiliser le feu comme méthode de travail est un point de départ très intéressant. Par ailleurs mes « Hey, chair, be a bookshelf » sont comparables à son travail. Je ne peux pas dire ce qui m’a inspiré, mais je pense que son travail m’a simplement donné un déclic.

Avec Hey Chair, Marteen Baas s’est aussi amusé à empiler des chaises les unes sur les autres créant le plus grand désordre. On pourrait dire que c’est du Arman sans le sens esthétique et le jeu des formes. Baas a privilégié une forme de chaos.
4/ Donald Judd a dit « une chaise n’est pas une œuvre d’art parce que quand on s’asseoit dessus on ne peut pas la voir ». Qu’en pensez-vous ?
Maarten Baas : Si je m’asseois sur un tableau de Rembrandt, je ne pourrai pas le voir non plus, donc ce ne serait pas une bonne définition. Et je ne peux pas m’asseoir sur une œuvre de Jean Sébastien Bach, je ne peux pas la voir non plus, donc est ce que ça veut dire que ce n’est pas de l’art ? De plus, ça m’est égal que vous appeliez cela de l’art ou pas. Faites ce que vous voulez avec.
5/ Page blanche, à vous de jouer :
Pas de réponse de Maarten Baas.
Prenez donc un siège !


Au sujet des chaises et fauteuils en feu, un passage par Magritte est indispensable. Arman a pensé à brûler un siège après avoir vu une décharge en Hollande, et il a titré certaines de ses oeuvres en pensant à Magritte.On trouve aussi chez Magritte des fauteuils en flammes.

Le musée des arts décoratifs à Paris, exposition jusqu’au 12 février 2012
Au sujet d’Arman, le site historique
Textes Copyright Christine Siméone.
Photos Copyright Christine Siméone sauf indication autre.
Remerciements à
Valeria Emanuele, au web de France Inter twitter.com/valeriae
Annelise Signoret , du service documentation de Radio France __
Sophie Raimbault, assistance du service Culture de la rédaction de France Inter
Ghislaine Delubac et son équipe de l' agence Apocope