Mai-68 : Henri Langlois, patron de la Cinémathèque et premier limogé
Par Stéphane Capron
Bien avant le mois de mai 1968, le limogeage d'Henri Langlois de son poste de directeur de la Cinémathèque par le pouvoir politique servira de répétition générale aux événements. Langlois sera réintégré face à la pression par le régime gaulliste en avril.
Scandale à la Cinémathèque : le révoltant limogeage d'Henri Langlois.
C'est le titre d'un article du critique Henry Chapier dans le journal Combat au lendemain de l'éviction de Langlois. André Malraux, ministre de la Culture, a ainsi décidé de le priver de la direction administrative du temple du 7e art, tout en lui offrant la direction artistique.
On reproche à Henri Langlois, remplacé par Pierre Babin, de négliger complètement l'administration, la comptabilité et la gestion. "Prétexte !" clament ses défenseurs.
Malraux ringardisé
Malraux, qui a toujours défendu la liberté artistique, qui a créé des maisons de la culture en région, devient un paria. Une violente campagne de presse débute. Le Monde publie une première pétition signée par quarante cinéastes français, d'Abel Gance à Jean Eustache. Le monde du cinéma se mobilise autour de la personnalité d'Henri Langlois. À l'initiative de Jean-Luc Godard et de Jacques Rivette, un Comité de défense de la Cinémathèque française est créé le 16 février 1968 pour le soutenir. François Truffaut en est le trésorier. Les bureaux des Cahiers du cinéma se transforment en quartier général.
A l'Assemblée nationale, les politiques se mobilisent aussi. François Mitterrand qualifie l'éviction de Langlois de "choquante". Daniel Cohn-Bendit, qui est encore inconnu, participe à une manifestation devant le siège de la Cinémathèque française.
Devant les soutiens de tous bords, André Malraux fait marche arrière. Henri Langlois est réintégré dans ses fonctions le 22 avril 1968. C'est le premier coup de griffe porté au régime gaulliste.