Mai-68 : Jean-Paul Sartre, un intellectuel en soutien des salariés et des étudiants
Par Stéphane CapronEn mai 1968, Jean-Paul Sartre a 63 ans. Il est de tous les combats, passant de la Sorbonne aux usines occupées. Celui à qui l'on doit le célèbre slogan "Elections, pièges à con" se fait l'écho du mouvement de révolte.
S'il n'a pas été l'inspirateur des événements de mai 1968, Jean-Paul Sartre a fortement contribué à les faire vire. En tant que journaliste tout d'abord, il interviewe Daniel Cohn-Bendit dans Le Nouvel Observateur, et en tant qu'agitateur public.
L'écrivain-philosophe, qui avait soutenu les indépendantistes algériens du Front de libération nationale (FLN), ne pouvait rester les bras ballants à regarder la jeunesse faire la révolution sur les barricades.
Déjà, en 1967, il était revenu sur le devant de la scène en présidant avec Bertrand Russell une assemblée internationale d'intellectuels chargée de juger virtuellement les guerres et de les condamner, en particulier celle du Vietnam.
Une solution : "Descendre dans la rue"
Alors forcément, lorsque les premiers mouvements se font sentir, l'intellectuel est là. Il se fera l'écho de la révolte dans la rue, sur les estrades, dans les journaux, et aux portes des usines en grève.
Face au pouvoir qui dénonce la violence, Sartre la justifie :
La violence est la seule chose qui reste, quel que soit le régime, aux étudiants qui sont jeunes, qui pensent qu'ils ne sont pas encore entrés dans le système que leur ont fait leurs pères, et qui ne veulent pas y entrer.
"Autrement dit, poursuit l'intellectuel, ils ne veulent pas de concessions, ils ne veulent pas qu'on aménage les choses, qu'on leur donne satisfaction sur une petite revendication, pour en fait les coincer, leur faire prendre la filière et leur faire être dans trente ans le vieux bonhomme usé qu'est leur père. Ils ne veulent pas du tout y entrer et, par conséquent, ce refus est évidemment un refus de violence. Donc si vous voulez, on peut considérer que le seul rapport qu'ils puissent avoir avec cette université, c'est de la casser, et pour la casser, il n'y a qu'une solution : c'est descendre dans la rue."