Mères célibataires : comment relâcher la pression ?
Deux millions de foyers en France, c’est-à-dire 82% des familles monoparentales, ont à leur tête une femme ! Une mère qui assume seule l’éducation des enfants. Comment alléger cette charge mentale ? Comment s’organiser, ne pas se laisser déborder, ni déprimer ? Six conseils pour sortir la tête hors de l'eau !
Dans l’émission Grand bien vous fasse d'Ali Rebeihi, des spécialistes, Nathalie Bourrus, ex-reporter de guerre, autrice d’un livre sur la vie de mère en solo, Valérie Roumanoff, hypnothérapeute, et Gérard Neyrans, sociologue, spécialiste de la famille, ont donné quelques pistes pour sortir la tête hors de l’eau, et souffler un peu.
1. Ne cherchez plus à être parfaite : priorisez !
Cécile auditrice, mère célibataire d’une petite fille de cinq ans :
« Je me suis fait une petite méthode Coué. Je me suis demandé où mettre mon énergie ? Elle est tellement précieuse à l’épanouissement de ma fille. Tout ce qui est toxique, je l’écarte… Il y a des choses auxquelles je ne peux pas couper comme l’organisation etc… Mais quand je sens que je m’enfonce dans des choses qui ne sont pas absolument nécessaires, je les laisse tomber. Je vous avoue que ce n’est pas hyper propre et rangé chez moi, mais je m’en fiche… »
Valérie Roumanoff confirme « C’est très important de définir ses priorités, de savoir ce qui compte vraiment pour soi :
Est-ce vraiment que la maison soit impeccable ou que mon enfant soit heureux ?
Ou est-ce que c’est que, moi, je puisse avoir un peu la tête hors de l'eau ? Eisenhower disait : « Ce qui est important est rarement urgent et ce qui est urgent, rarement important »
Ali Rebeihi résume : « Il faut distinguer :
- L'urgent et l'important qui impliquent que l'on doit le faire.
- L'urgent et le non important qu’il faut savoir déléguer,
- Le non-urgent et l’important qu'il faut planifier.
- Et puis, il y a le non-urgent et le non-important : on supprime pour gagner du temps.
2. Ne vous dévalorisez pas : ce que vous faites est difficile
Nathalie Bourrus :
La vie de mère solo est une vie en apnée, sans oxygène.
Je pense même que, nous, les mères célibataires, nous devrions nous glorifier de temps en temps, nous regarder dans la glace et nous dire "Punaise ! J’y arrive ! Mes enfants vont bien, même si parfois, cela ne va pas. Mais ils sont vivants, ils respirent, ils ont des copains… ". Et se raccrocher à ce constat.
On peut se dire aussi qu'on est une famille, ne pas s'exclure, mais exister totalement dans la société. Et arrêter de se flageller : vous n’êtes ni une recluse, ni une mauvaise mère.
3. Cherchez à voir le bon côté des choses (parce qu’il y en a)
Frédérique, auditrice : « Divorcée depuis quatre ans, c’est vraiment très compliqué pour moi de tout porter. J'ai un fils de 18 ans qui rentre en IUT, et une fille en Sixième. Je viens de déménager et, gérer un déménagement seule, c'est très dur. Organiser la gestion de Parcoursup de mon fils, l’entrée au collège de ma fille, la recherche d'un emploi avec la discrimination de l’âge (54 ans), et toutes ces démarches administratives épuisantes… Depuis quelques jours, je fais une dépression. J'ai tendance à me réconforter en fumant beaucoup, en buvant de la bière midi et soir, et en mangeant du chocolat. »
Valérie Roumanoff propose une solution : « Parfois face à la situation de la gestion familiale que l’on porte seule, on a l'impression d'être dans une situation d'échec, de ne pas réussi à mener à bien les choses, ou tout simplement de ne pas y arriver.
On peut se poser la question inverse : « qu'est-ce que cette situation peut m'apporter de positif à moi dans ma vie ? Qu'est-ce que je peux tirer de positif pour moi de cette situation qui n'était pas prévue, que je ne voulais pas, que je subis ? C'est peut-être une nouvelle façon d'organiser sa vie, d’avoir plus de liberté, de vivre des choses que l’on n'aurait pas pu faire avant avec son mari.
En se posant ces questions, des réponses nouvelles vont arriver… Or si on continue à ressasser tout ce qui ne va pas et à se concentrer sur tout ce qui n'est pas facile, forcément on va déprimer et ça va aller de plus en plus mal ».
4. Dites-vous que pour le moment c’est comme ça, mais cela peut changer
Valérie Roumanoff : « Pour se remonter le moral, on peut se dire que c'est une situation temporaire dans la vie. On ne sait pas ce qui va se passer ensuite, comme on ne savait pas qu'on allait se séparer. Se dire : « Ça va durer toujours, toute ma vie, je serai toute seule, sans emploi… », forcément, ça déprime. Mais ce n'est pas vrai, il faut s’ouvrir aux opportunités. »
5. Mères célibataires : parlez !
Gérard Neyrand : « Pouvoir mettre en parole la situation permet de l'élaborer, de mieux comprendre et d’entrer dans une nouvelle dynamique. Trouver une oreille attentive avec laquelle on peut parler de la difficulté de la situation, c'est déjà un grand pas franchi.
Il faut rappeler que la précarité qui touche les familles monoparentales est économique, mais aussi relationnelle. Il y a une restriction du nombre de personnes que l'on peut voir, des amis communs avec son conjoint qu’on ne voit plus. »
6. Cessez de culpabiliser
Souvent, les parents se sentent coupables : ils se sont séparés, les enfants vont souffrir. Mais ce n'est pas la séparation elle-même qui les rend malheureux. On peut vivre avec des parents séparés et être tout à fait normal, bien constitué et, au contraire, découvrir une flexibilité, et l’existence de plusieurs vérités : celle de papa et celle de maman, ce qui procure une ouverture d'esprit et une adaptabilité.
Valérie Roumanoff : « Ce qui fait souffrir les enfants lors d'une séparation, ce n'est pas ce que l’on croit !
Ce qui fait souffrir les enfants, c'est quand, on va dire du mal de l'autre parent. C’est si naturel, nous adultes, on est dans un conflit. On est vexé-e, déçu-e, triste ou en colère. Comme on vit avec son enfant, on va le prendre à témoin et on va en faire notre confident ; c'est quelque chose qui peut être nocif pour l'enfant. »
ÉCOUTER | Grand bien vous fasse sur les familles monoparentales et la charge mentale des mères
Bibliographie de l’émission, avec leurs auteurs :
- Nathalie Bourrus, journaliste, grand reporter à France Info, autrice de Maman Solo, les oubliées de la République, aux éditions Pygmalion,
- Valérie Roumanoff, hypnothérapeute, autrice de Parent Solo, avec (ou sans) l'aide de l'autre parent, élever ses enfants avec zen et bienveillance, aux éditions Eyrolles. ( son dernier ouvrage : Les quatre croyances qui vous empêchent d’être libre, aux éditions Larousse)
- Gérard Neyrand, sociologue de la famille, auteur de Monoparentalité précaire et femme sujet (ed. Erès)