"On a commencé à se violenter" : au tribunal, la nuit de rupture d'Aya Nakamura et de son ex-compagnon
Par Sophie Parmentier
La chanteuse Aya Nakamura était convoquée au tribunal correctionnel de Bobigny, ce jeudi après-midi, à quelques heures de la sortie de son nouvel album "DNK". Jugée pour violences réciproques aux côtés de son ex-compagnon, Vladmir Boudnikoff, le producteur de l'énorme clip "Pookie".
Sur le parvis du tribunal de Bobigny, avant le procès, les photographes sont postés en embuscade, téléobjectifs en bandoulière. Quelques fans se pressent pour passer sous les portiques de sécurité. Beaucoup pensent qu'Aya Nakamura ne viendra pas à cette audience où la justice l'a convoquée, audience qu'elle avait boudée lors de sa première convocation en novembre dernier. Ce jeudi, son avocat a refusé de dire si la chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde se déplacerait à ce procès où elle doit être jugée pour violences par conjoint avec incapacité temporaire de travail de moins de huit jours. Son ex-compagnon, le producteur Vladimir Boudnikoff, est aussi attendu, devant être jugé lui aussi, pour les mêmes faits de violences réciproques. Jusqu'à 13 heures, heure du début de l'audience, paparazzi et journalistes les ont guettés sans trop y croire, d'autant qu'Aya Nakamura a ce jeudi soir la soirée de lancement de son dernier album "DNK" qui sort vendredi. Et puis, on les a vus s'avancer d'un pas tranquille, entrant par la grande porte du palais de justice.
"C'est une prévenue particulière !"
Aya Nakamura, 27 ans, et Vladimir Boudnikoff, 34 ans, ont descendu les marches du tribunal jusqu'à une grande salle du sous-sol, la 12e chambre du tribunal correctionnel. L'interprète des succès planétaires "Djadja" ou "Jolie Nana" est allée s'asseoir sur le banc des prévenus, tout comme son ex-compagnon, qui est aussi le producteur de son énorme clip "Pookie". Des fans sont venus les écouter. "Bien, comme vous le savez, nous avons une audience un peu particulière !", commence la présidente, juge unique. "Madame Dianoko, approchez-vous !" lance-t-elle à la chanteuse aux disques de diamant, née Aya Dianoko.
Aya Dianoko, alias Aya Nakamura, porte ses longs cheveux bruns détachés, un jean noir, une veste marron à carreaux. Elle a les pieds nus, ongles vernis de rose, dans des escarpins découpés, malgré le froid glacial. Elle jette un coup d'oeil à la presse, sourit, gloss aux lèvres. Vladimir Boudnikoff est debout à ses côtés à la barre, pantalon fluide noir, petit blouson beige clair, un prénom gravé sur sa nuque. On a du mal à distinguer s'il s'agit d'Aya, ou celui du bébé qu'ils ont eu ensemble.
D'emblée, les avocats réclament le huis-clos, au nom du respect de la vie privée. "Comme un député", plaide Me Karim Sebihat, en référence à Adrien Quatennens, pour qui le huis-clos avait été prononcé dans son affaire de violences conjugales. "Je m'oppose !", proteste la procureure, estimant que c'est "une demande de faveur" dans ce cas, "la loi est la même pour tous, même justice pour tous, aucun privilège ne doit leur être accordé". La présidente refuse ce huis-clos et l'audience se poursuit en public. Les curieux ne cessent d'affluer.
"On a commencé à se violenter dans la soirée !"
La présidente démarre la lecture des faits, dans la nuit du 6 au 7 août 2022. Les choses ne sont pas très limpides. Mais il s'agit d'une dispute conjugale qui a débuté dans la journée, à propos d'une fête de mariage à laquelle Aya Nakamura n'a pas été invitée. Ce jour-là, elle vient de découvrir que Vladimir Boudnikoff avait été convié, et qu'en prime, il y est allé en présence de son ex-compagne. Elle a vu tout cela sur des photos dans son téléphone. Ensuite, ce sont des cris. "Je lui ai dit que j'allais le quitter", confie la chanteuse. Elle explique que ce soir-là, elle sort dîner seule au restaurant pendant que leur bébé dort au domicile du producteur à Rosny-Sous-Bois. Elle revient, donne rageusement des coups de pied dans le portail. La dispute reprend de plus belle et dégénère.
Des cris encore, des griffures, des cheveux tirés, des bousculades. Elle lui jette du sirop de grenadine à la figure, "et un verre s'est cassé", note la présidente. Elle lui prend son téléphone pour partir chez elle, dans une autre ville de banlieue. Il la poursuit "torse nu, en caleçon", vociférant. Il est minuit passé de seize minutes. Un voisin appelle la police. Les policiers tentent de calmer l'escalade. Une heure plus tard, ils sont rappelés. La star de la chanson est revenue au domicile de Vladimir Boudnikoff, avec deux amis. Il pointe sur eux un "pistolet factice", jure-t-il à la barre. "Alors vous comprenez que quelqu'un à qui on montre un pistolet, il est pas censé savoir si c’est un factice ou non ?", fait remarquer la présidente.
"C'est vous qui écrivez vos paroles et musique ?"
En perquisition, les policiers avaient retrouvé chez lui une carabine à plomb non chargée, une arme de poing de type airsoft, et des brassards de police. "Je comprends que c'est pour vos clips", dit la juge. Il avait aussi été testé positif au cannabis. "Vous en êtes où, niveau cannabis ?", lui demande la magistrate. "Euh, j'en suis au CBD", répond-il. Madame la présidente n'avait semble-t-il jamais entendu parler d'Aya Nakamura avant de préparer cette audience, et confie qu'elle a lu dans la presse un portrait "très intéressant". "Mais j'avais oublié de vous demander madame, c'est vous qui écrivez vos paroles et musique ?"
A la barre, face à la juge, Aya Nakamura et Vladmir Boudnikoff s'expriment très tranquillement. Leurs voix sont posées. Ils reconnaissent cette dispute violente. Aya Nakamura invoque "l'émotion" cette nuit-là, Vlamidir Boudnikoff, la fatigue. "On n'avait pas beaucoup dormi"... Ils expliquent qu'ils sont aujourd'hui séparés, et "on essaye de bien s'entendre", poursuit Aya Nakamura. Ils suivent une thérapie familiale pour le bien-être de leur petite fille d'un an. "Bon, maintenant, tout s'est apaisé, et si ça ne s’était pas passé sur la voie publique, ça serait resté entre vous", conclut la présidente.
5000 euros requis contre Aya Nakamura
La procureure requiert des amendes. 5.000 euros d'amende pour la star de la chanson, 2.000 pour son ex-compagnon, "car ce sont des violences", gronde-t-elle. Violences conjugales tristement banales. Pour lui, comme elle, les médecins avaient estimé que ces violences avec blessures avaient entraîné trois jours d'interruption temporaire de travail. Douleurs au dos, au poignet, ou à l'œil. "Madame Dianoko est aussi victime, dans cette affaire", plaide son avocat, Me Sebihat. Qui demande au tribunal "une peine adaptée pour cette primo-délinquante à la situation admirable", dit-il. Et il rappelle au tribunal qu'Aya Nakamura sort demain son nouvel album, et affiche déjà complet pour ses concerts de mai à Paris. Le jugement sera rendu le 23 février 2023. Aya Nakamura et Vladimir Boudnikoff quittent le tribunal de Bobigny par une sortie discrète, escortée de policiers et sans passer devant les caméras.