On a testé Clubhouse, le réseau social axé sur le son, valorisé à un milliard de dollars
Par Julien BaldacchinoC'est une sorte d'OVNI dans le paysage des réseaux sociaux : sur invitation uniquement, austère au possible, orienté audio et doté de peu de fonctions, Clubhouse pourrait prochainement être valorisé à un milliard de dollars lors d'une levée de fonds.
L'information est sortie en fin de semaine dernière : grâce à une levée de fonds, l'application Clubhouse, forte d'un nombre d'utilisateurs et d'utilisatrices croissant, vise une valorisation à près d'un milliard de dollars. L'histoire de Clubhouse est celle d'une ascension vertigineuse : lancée en mars dernier en version beta, l'application (disponible seulement sur iOS pour l'heure) ne comptait alors qu'environ 1 500 membres… et se targuait déjà d'avoir levé environ 100 millions de dollars de fonds.
Soutenue par quelque 180 investisseurs, l'application entend désormais s'ouvrir à un plus grand nombre d'utilisateurs – elle revendique deux millions d'utilisateurs chaque semaine – en développant une appli Android, en renforçant ses serveurs informatiques et, plus singulier, en testant des modes de rémunération pour les créateurs et créatrices les plus actifs.
Peu de fonctions sociales, mais du son
Mais au juste, qu'est-ce que cette nouvelle application ? Si elle est souvent désignée comme un "réseau social" – y compris dans les premières lignes de cet article – elle est pourtant dépourvue de nombreux attributs habituellement communs aux réseaux sociaux. Sur Clubhouse, si vous pouvez vous abonner à d'autres profils et, vice versa, être suivi.e, il n'y a pas de "like", pas de "partage", pas de "stories", et surtout… pas d'image. L'application n'est basée que sur le son – et plus précisément, le son en direct.
S'il fallait résumer en quelques mots Clubhouse, on pourrait affirmer qu'elle est l'enfant que Twitch aurait pu avoir avec une plateforme de podcast. Vous y naviguerez entre des dizaines de conversations audio en direct, que vous rejoignez sous la forme de "salles" thématiques. Chaque salle est animée par un ou plusieurs modérateurs, et vous pouvez soit écouter sagement ce qui se dit en tant que spectateur ou spectatrice, soit lever la main pour demander à prendre la parole et à vous exprimer.
Où est le fun ?
Cela vous rappelle quelque chose ? C'est normal : en l'état, Clubhouse ressemble à un immense Zoom (ou Microsoft Teams) mondial, avec des dizaines de réunions organisées simultanément.
L'austérité règne en maîtresse sur cette application, où les seules images sont les photos de profil des intervenants et des intervenantes : une façon de montrer que ce qui compte dans cette appli, c'est la communauté des participants, et rien d'autre – le concept est poussé jusque sur l'icône de l'appli, qui change régulièrement pour représenter un utilisateur ou une utilisatrice. Et l'écran d'accueil s'ouvre sur les "salles" ouvertes en cours dans lesquelles interviennent des gens auxquels vous êtes abonné, ainsi que sur un planning des "sessions" à venir qui pourraient vous intéresser.
En somme, s'il fallait être encore plus précis, Clubhouse serait l'enfant que Twitch aurait eu avec une plateforme de podcast… avec LinkedIn comme nounou. Car si l'application a un vrai potentiel technique, elle ressemble pour le moment à une grande salle de conférence réunissant "startupers", entrepreneurs et quelques curieux et curieuses – avec des discussions quasi intégralement en anglais.
Sur invitation uniquement
Une sociologie qui tient à l'autre grande particularité de l'application : Clubhouse revendique un côté "select". Elle n'est accessible que sur invitation. Pour y accéder, il faut avoir été invité par quelqu'un qui est déjà membre. Autrement dit, le système d'inscription ne favorise pas la diversité des contenus.
Malgré la présence de très nombreuses catégories – et de nombreuses stars parmi les membres, le dernier converti étant l'homme d'affaires Elon Musk – on a vite l'impression de tourner en rond – malgré quelques bonnes idées, comme un utilisateur qui a profité de l'appli pour créer une webradio, ou encore cette conversation nocturne sur laquelle nous sommes tombés, où un conducteur qui traversait les États-Unis avait lancé une "salle" de discussion pour avoir de la compagnie pendant les trajets.
Les concepteurs de l'application ont prévu des dizaines de catégories dans lesquelles ranger les différentes discussions. Et parmi elles, on trouve des sous-sections originales, mais pour l'instant presque vides, comme "karaoké", ou "théâtre". Il faudra peut-être attendre quelques semaines pour voir comment l'application peut se diversifier et offrir des contenus pour un plus large public.