On s'en doutait, c'est confirmé : nous sommes tous contaminés par des perturbateurs endocriniens

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On s'en doutait, c'est confirmé : nous sommes tous contaminés par des perturbateurs endocriniens

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Un goûter d'enfant dans des ustensiles en plastique. Les boites en plastique présentent des risques pour la santé : perturbateurs endocriniens.
Un goûter d'enfant dans des ustensiles en plastique. Les boites en plastique présentent des risques pour la santé : perturbateurs endocriniens.
© Maxppp - Christophe Morin/L'Alsace

Bisphénol, phtalate, parabène : depuis plusieurs années, ces polluants sont entrés dans le langage courant, sous la dénomination générale de "perturbateurs endocriniens". Une étude nationale démontre ce mardi que tous les Français, quel que soit leur âge, leurs habitudes ou leur localisation, en sont imprégnés.

Du bisphénol dans les biberons pour bébés, des phtalates dans les tampons périodiques, du parabène dans les produits cosmétiques : ces dernières années, les Français ont appris à se méfier de ces substances qui semblent omniprésentes dans notre quotidien. Aujourd'hui, pour la première fois, une étude effectuée à l'échelle nationale mesure la présence de ces polluants dans l'organisme des enfants et des adultes. Les résultats confirment ce que l'on soupçonnait déjà : ces substances sont présentes dans l'organisme de tous les Français, quel que soit notre âge, notre mode de vie ou nos habitudes.

Les enfants particulièrement contaminés

La raison ? Ces molécules sont partout : dans les aliments, à l'intérieur des maisons, sur les objets du quotidien. Les enfants sont particulièrement exposés, explique Sébastien Denys, directeur du pôle santé-environnement-travail à Santé Publique France. "Par exemple, si l'on prend l'exemple des poussières dans les environnements intérieurs, on sait que les enfants sont plus propices à toucher le sol et les objets contaminés par ces poussières, et vont ensuite les porter à leur bouche.

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Bien sûr, ce n'est pas une révélation et plusieurs études se sont déjà penchées sur le sujet. En revanche, cette dernière étude confirme pour la première fois que l'ensemble de la population est touchée, "et nous donne des mesures objectives de ces imprégnations, qui sont des éléments puissants pour les politiques publiques", complète Sébastien Denys.

De quelles substances s'agit-il exactement ? 

L'étude fait partie de l'enquête Esteban, qui vise à mesurer tous les polluants présents dans le corps des Français. Depuis 2014, 1100 enfants et 2500 adultes ont été questionnés sur leurs habitudes, et prélevés (urine, sérum, cheveux). 70 biomarqueurs contenus dans six polluants ont été analysés :

  • Les bisphénols A, F et S. Présents dans les résines optiques et dentaires ainsi que dans certains plastiques, "ils sont suspectés d'être associés à de nombreuses pathologies comme le diabète, l'obésité, des maladies cardiovasculaires, respiratoires, rénales, certains cancers ainsi que des troubles du comportement et de la reproduction", indique l'étude Santé Publique France.
  • Les phtalates. Bien que soumis aux réglementations européennes et françaises, on les retrouve dans les emballages alimentaires, les jouets, certains sols, les peintures... "La plupart des phtalates sont classés comme substances toxiques pour la reproduction masculine", note le rapport.
  • Les parabènes. Utilisés dans de nombreux cosmétiques en raison de leurs propriétés antibactériennes, "dans l'état actuel des connaissances, il existe peu de données sur leurs effets sanitaires à faible niveau d'exposition".
  • Les éthers de glycol. Ce sont des produits dits "à l'eau" présents dans les peintures, encres, vernis et autres produits d'entretien. Ils sont suspectés d'entraîner "des effets toxiques sur la reproduction et le développement chez l'homme, ainsi qu'une hémato-toxicité".
  • Les retardateurs de flamme bromés. Ils sont utilisés principalement sur le mobilier par les constructeurs, afin de ralentir la propagation du feu en cas de début d'incendie. Ils se dispersent facilement dans l'air, et "ont ainsi progressivement contaminé l'environnement et se retrouvent dans la chaîne alimentaire", précise l'étude.
  • Les composés perfluorés. Ils sont principalement véhiculés par l'alimentation et l'eau potable, ainsi qu'à travers certains produits manufacturés comme les vêtements de ski. "Malgré les restrictions d'usage de certains perfluorés [...], les résultats montrent que la population était exposée à un ou plusieurs composés", conclut le rapport.

Quelles conséquences sur notre santé ?

C'est ce qui manque dans l'étude : s'il y a en toute vraisemblance des effets pathologiques liés à ces substances, on ne dispose pas de conclusions formelles et chiffrées sur leurs conséquences sanitaires. Pour autant, il est d'ores et déjà impératif de réagir, ajoute Sébastien Denys. "Indépendamment des incertitudes scientifiques qui existent toujours sur les effets de ces substances, nous avons les éléments pour gérer les expositions à ces polluants, de manière à anticiper l'arrivée de pathologies auprès des populations."

À ce sujet, le gouvernement a dévoilé, ce mardi 3 septembre, sa deuxième stratégie nationale pour lutter contre les perturbateurs endocriniens. Parmi les mesures annoncées, de nouvelles expertises pour déterminer quelles substances sont effectivement dangereuses, ainsi qu'une nouvelle liste des perturbateurs endocriniens établie dès 2020.

De son côté, Santé Publique France a lancé le même jour un site internet, Agir pour bébé, qui prodigue des conseils pour assainir au mieux l'environnement des nouveaux-nés. Enfin, l'étude Esteban doit se compléter par deux autres volets : le premier livrera des conclusions sur la contamination aux métaux et sera publié à la fin de l'année. Le second porte sur les pesticides, et devrait paraître en 2020.