L'agriculture verticale à Singapour

France Inter
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Le reportage de Carrie Nooten, à Singapour

Jack Ng : « Notre système se veut une solution urbaine : c’est propre, sûr, et très important, c’est facile à implanter. C’est comme des lego : vous les démontez facilement, assemblez facilement. Et en même temps, c’est proche du consommateur »

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Jack Ng est le fondateur de la ferme SkyGreen : la première entreprise au monde à commercialiser des végétaux issus d’agriculture verticale. Cette technique permet non seulement de gagner de la place mais aussi de l'eau et de l'énergie, ce qui est particulièrement intéressant pour Singapour, deuxième pays le plus dense au monde. Des légumes verts poussent sur quelque 120 tours d'aluminium de 9 mètres de haut et vendus dans les supermarchés de la cité-état.

Friuts et légumes
Friuts et légumes
© Fotolia

Planter dans les airs des laitues, et des légumes verts typiques d’Asie comme les Kailan ou les Cai Sin, le patron de la ferme SkyGreen le fait depuis six mois. Il a conçu ce modèle d’agriculture verticale pour répondre aux défis posés par Singapour : au lieu de s’étaler en largeur, les plants sont disposés sur 38 étages par tour, et montent et descendent grâce à un système de poulie hydraulique. La poulie utilise astucieusement la même eau que celle dans laquelle baignent les plants de légumes à tour de rôle. Il n’y a besoin que d’un demi litre d’eau pour actionner la structure d’une tonne 7 !

Les cultures font ainsi jusqu’à 4 rotations par jour.

Jack Ng : « Vous voyez, elles sont en forme de A. Cela permet que chaque plant en étage puisse profiter de la lumière du soleil. Si c'était tout droit, en forme de H, les étages du dessous ne seraient jamais ensoleillés. En même temps, il faut que la tour fasse une rotation car quand ils montent ils peuvent avoir un meilleur ensoleillement mais ils doivent redescendre car ils ont besoin de « se reposer. Ainsi une fois en bas, ils peuvent baigner dans la solution nutritive avant de remonter à nouveau. »

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SkyGreen permet ainsi d’économiser 75% en ressources et en main d’œuvre. L’obstacle principal de cette culture pleine de promesses : le coût. Chaque tour coûte 9.500 euros, un investissement trop lourd pour que les agriculteurs se reconvertissent en masse, même dans la prospère Singapour. Pourtant, côté client, on est demandeur de plus de légumes estampillés SkyGreen. Tng Ah Yiam est le responsable des achats à FairPrice, la principale chaîne de supermarchés de l’île, et le principal client de SkyGreen.

Tng Ah Yiam :« Nous travaillons en étroite collaboration avec SkyGreen, de sorte qu'ils sachent de quelle quantité de légumes nous avons besoin quotidiennement. Ainsi, l’agriculteur peut planifier sa production selon notre demande. Et on a moins de gaspillage ! Moins de gaspillage pour l’agriculteur, moins de gaspillage pour nous. Donc c'est une bonne chose car cela améliore la productivité ».

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Ca plaît d’autant plus en Asie qu’on est de plus en plus sensible aux conditions de production. Obnubilée par la pollution chinoise, Meghan, une cliente qui glisse dans son panier un produit estampillé SkyGreen.

Meghan :« Ce Cai Sin, c’est issu de l’agriculture verticale à Singapour. C’est bon. Ce qui est encore mieux c’est qu’il y ait des escargots et des vers à l’intérieur. Ils n’ont pas de pesticides, moins de pesticides. Donc les vers viennent et les mangent, c’est plus sain. C’est Singapourien. Les légumes malais et chinois, je n’aime vraiment pas en manger : ils ne font aucun contrôle. Je pense que ça c’est frais, très frais, cela a peut-être été empaqueté aujourd’hui. Bien sûr local c’est meilleur, n’est-ce pas ? »

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Les quelques 120 tours d'aluminium de 9 mètres de haut devraient être rejointes par 300 autres d'ici quelques mois, ce qui portera la production à deux tonnes de végétaux par jour.

Jusque là, seuls 7% des légumes consommés ici étaient produits sur place. L'agriculture verticale permettra de faire monter ce ratio à 10% l’an prochain.