Près d’un an après la catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic, les premières mesures

France Inter
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Un reportage de Pascale Guéricolas, à Lac-Mégantic, au Québec

Adrien Aubert, un témoin de la catastrophe:

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On est le 5 juillet, un train de gaz vient de prendre veut et a déraillé en plein centre-ville de Mégantic…[bruit de détonation] oh mon dieu, oh my god !

un problème de freins à l'origine de l'accident de lac-mégantic
un problème de freins à l'origine de l'accident de lac-mégantic
© reuters

La voix que vous venez d’entendre c’est celle d’Adrien Aubert, un jeune français présent à Lac-Mégantic dans le Sud du Québec la nuit du 5 au 6 juillet dernier.

Vers 1h15 du matin, un train chargé de 72 wagons vient de dérailler, provoquant un gigantesque incendie en plein centre-ville. 47 personnes y ont laissé la vie. Ce tragique événement a attiré l’attention du grand public face à l’augmentation exponentielle du volume de pétrole transporté par train au Canada depuis quelques années. Certaines mesures commencent à être prises pour renforcer la sécurité ferroviaire, comme l’obligation de changer les wagons-citernes.

En 5 ans, le transport du pétrole par train a augmenté de 28 000% au Canada. Chargé au Dakota, à l’extrême Ouest des Etats-Unis, ce pétrole de schiste hautement inflammable voyage ensuite à travers tout le continent, pour atteindre les raffineries. Les convois, parfois longs d’un kilomètre traversent régulièrement des petites villes comme celle de Farnham, à une centaine de kilomètres de Lac-Mégantic. Son maire, Joseph Hussler s’inquiète depuis des années du manque d’entretien de la voie ferrée opérée par MMA, la compagnie ferroviaire impliquée dans le déraillement de juillet dernier.

Joseph Hussler, maire de Lac-Mégantic :

Ils ont eu des subventions par le gouvernement, mais ils ont fait le strict minimun. Si vous marchez un peu sur les rails, vous allez voir, c’est complètement dépassé. Vous avez presque peur de rester à deux trois mètres, ou à cinq mètres à côté d’un wagon, parce qu’il branle tellement. Un pied à gauche, un pied à droite. C’est pas ça à ce que l’on s’attendait.

Les premiers résultats de l’enquête sur le déraillement remettent en cause la solidité des wagons citernes utilisés pour transporter le pétrole. Les DOT 111 percent facilement, puis explosent, comparés aux modèles plus récents.

Le gouvernement canadien demande donc à l’industrie ferroviaire d’en retirer 5000 de la circulation, puis d’en remplacer la majorité d’ici trois ans.

Une mesure que Jacques Van der Schleit, spécialiste en sécurité ferroviaire juge difficilement applicable, d’autant plus qu’une partie des convois viennent des Etats-Unis, où les vieux wagons-citernes circulent librement.

Jacques Van der Schleit, spécialiste en sécurité ferroviaire_:_

__ Est-ce qu’il sera bloqué à la frontière parce que les citernes sont de l’ancien modèle ? Je ne pense pas ! Alors tout ça, c’est de la poudre aux yeux. On a toujours la possibilité d’avoir ces vieilles citernes sur notre réseau, et la transformation de ces vieilles citernes ça va être un processus très laborieux. Parce que pour en faire 65 000 en trois ans, il va falloir mobiliser un nombre invraisemblable d’ateliers.

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Vicky May Hamm, la mairesse de la ville de Magog, milite avec d’autres élus pour sécuriser le transport de matières dangereuses par train. Elle se dit satisfaite de la rapidité avec laquelle le gouvernement canadien a pris des mesures après la catastrophe de juillet dernier.

Vicky May Hamm, la mairesse de la ville de Magog :

Un an, c’est quand même relativement rapide pour le gouvernement fédéral. On s’attaque à la législation, ça peut paraître très long, mais on s’attaque à des grosses machines. C’est sûr qu’il y a du lobby qui se fait aussi. Il y a du lobby des entreprises pétrolières, il y a du lobby des entreprises ferroviaires. C’est un grand pas, parce que cela fait longtemps que le Bureau de sécurité des transports disait qu’il fallait retirer les DOT 111. C’étaient des bombes qui traversaient nos communautés.

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Les résidents de Lac-Mégantic ne veulent plus voir de train dans leur centre-ville. Ils réclament la construction d’une voie ferroviaire de contournement.