C'est l'une des toiles les plus sulfureuses du XIXe siècle, et l'une des oeuvres fondatrices de l'art moderne. "Le déjeuner sur l'herbe" se dévoile ce dimanche.
- Joséphine Draï Actrice, humoriste et chanteuse française
Peint en 1863 par Edouard Manet, le "Déjeuner sur l'herbe" est l'une des oeuvres les plus mémorables du premier Salon des Refusés organisé à Paris. C'est par cette toile scandaleuse, la première à présenter une "vraie" femme nue, qu'arrive petit à petit le mouvement impressionniste, et derrière lui, tout l'art du XXe siècle. Invité ce dimanche de Bav[art]dages, ce tableau se dévoile sur les ondes de France Inter.
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Le Déjeuner sur l'Herbe répond aux questions que vous lui avez posé sur les réseaux sociaux #BVDinter

Il y a d’abord mon style, qui a lui choqué. Je suis le premier tableau à avoir défrayé la chronique pour ses traits brossés, ses contrastes marqués. Je suis l’un des premiers à avoir donné l’impulsion vers le style impressionniste.
Et puis il y a le contexte historique. Il faut vous souvenir que lorsque j’ai été peint, l’Académie des Beaux-Arts faisait encore régner sa loi. Elle décrétait quel artiste respectait (ou pas) les codes qu’elle avait décrétés, lequel méritait d’être reconnu ou pas. La création du premier Salon des Refusés en 1863, dans lequel j’ai été exposé, a été le premier pas vers la fin l’hégémonie de l’Académie : en 1897, le Musée du Luxembourg à Paris a fini par accepter des toiles d’artistes non-officiels.

Si la femme que je représente est nue, ce n’est pas le cas de l’homme ! Ce ne sont pas Adam et Eve. Et c’est justement ça (en partie) qui a débouché sur le scandale à mon sujet. Si la femme avait été Eve, un personnage biblique donc, sa nudité n’aurait posé aucun problème. C’est parce que je représente une scène profane que la nudité que je représente a choqué.
Je suppose que vous faites référence à mon premier titre, “Le bain”, et à “La partie carrée”, qui n’a jamais été vraiment un titre officiel. C’était plutôt le petit surnom sarcastique que m’attribuait Manet, comme un référence à mon côté coquin.
C’est une chose plutôt fréquente, des oeuvres qui changent de titre. “Impression Soleil Levant” de Monet n’avait pas de nom au début de son exposition… et “Fontaine” de Duchamp s’est longtemps appelé le “Bouddha de la salle de Bain”. Mais je vais vous avouer, je ne sais pas vraiment pourquoi Edouard a choisi de changer mon titre en cours de route !
Cela dit, j’ai une piste : j’ai été peint en 1863. Et en 1865, Claude Monet a peint une toile beaucoup moins sulfureuse, appelée “Le déjeuner sur l’herbe”. De là à ce que mon changement de titre soit un clin d’oeil d’Edouard à son camarade…
Ah cette question ! Je l’ai tellement entendue ! Vous savez, cela fait même partie des raisons qui font qu’on m’a rejeté à l’époque où j’ai été peint. Les spectateurs ne comprenaient pas pourquoi cette grenouille et pourquoi cet oiseau (un bouvreuil plus précisément) ; or un tableau qu’on aimait, en ces temps-là, c’était un tableau qu’on comprenait facilement.
Tenez ça me fait penser, cet oiseau n'a pas non plus échappé à Claude Nougaro, qui en a parlé dans sa chanson "Déjeuner sur l'Herbe".
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Je pense qu’il y a deux grandes raisons pour lesquelles Manet a peint ces deux animaux sur moi. D’abord parce que nous participons à l’esthétique de son tableau. Nous sommes là pour marquer l’instant présent. Vous avez vu comme le petit bouvreuil est précisément peint, pour un animal en plein mouvement ? Je suis un arrêt sur image.
Et puis comme souvent dans les tableaux, il y a un côté symbolique ! Si je vous dis qu’en argot de l’époque, “bouvreuil” est une sorte d’invitation à ouvrir l’oeil (ouvre l'oeil), et que la grenouille était l’un des surnoms des prostituées, ça vous aiguille ?
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Merci. Beaucoup d’artistes, de cinéastes et même de publicitaires m’ont repris, adapté, parodié, et nombre d’entre eux ont choisi de m’adapter au monde d’aujourd’hui, comme l’a fait le peintre Alain Jacquet par exemple. La version que vous me proposez est fort parlante.

Un repas somme toute frugal ! Du bon pain, des tomates, quelques oranges, des cerises… Bon sang que c’était bon !
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