

C'est un fait mal connu de la 2nde Guerre Mondiale, le Service du travail obligatoire. Il fut instauré par le gouvernement de Vichy en 1943. Ceux qui en sont revenus étaient mal vus à leur retour, souvent traités de collabos. L'oeil du STO, c'est l'histoire de Justin, le grand-père de l'épouse de Julien Frey.
Que vaut une année dans une vie ? Le meilleur ou le pire. Tout dépend à quelle période se situe votre année et quels sont les événements qui l'ont jalonnée. En 1977, Justin est à l'aube d'une nouvelle vie. La retraite approche. Mais Justin est un homme de principe. Il ne veut pas que son année 1943 passée en Allemagne, soit prise en compte dans le calcul de sa retraite. Il ne veut pas, parce que pour lui, ce fut une année noire. Il a fait partie des centaines de milliers de jeunes travailleurs français exilés de force en Allemagne par le gouvernement de Vichy. Et c'est un sujet dont il ne veut pas parler à ses enfants. Seule son épouse, Renée sait ce qu'il en a été. Pour comprendre l'histoire de Justin, Julien Frey et Nadar décident donc de replonger le lecteur dans les souvenirs de Justin.
J'ai reçu ma convocation. Tu as le choix Justin. Faire avec l'occupant ou prendre le maquis
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Justin n'a pas pris le maquis. Il s'est rendu lui, le garçon de café, avec Renée à l'époque en instance de divorce, gare de l'Est et il est parti. Et après trois jours de train, il est arrivé dans le camp d'Hennigsdorf. Et là bas, sous la neige, rien ne ressemble à la propagande. Entre les poux et les punaises de lit, le travail est harassant. 10 heures par jours, 6 jours sur 7. On se blesse pour pouvoir être mis au repos. Justin perdra un oeil de cette manière. On tabasse aussi ceux qui sortent du rang. Beaucoup sont morts dans ces camps, de pneumonie, du typhus ou de méningite. Il y a eu aussi les bombardements.

Je n'étais pas volontaire
Justin va s'en sortir, le plus simplement du monde. Lors d'une permission, grâce à des faux papiers obtenus par son copain Pouillot, Justin va prendre le train jusqu'à Paris et se cacher, jusqu'à la libération. Mais on peut être libre des ses mouvements, on ne se libère pas aussi simplement de son passé. Et c'est tout le propos du livre de Julien Frey et de Nadar. Longtemps, les STO ont été considérés comme des collabos. Difficile à encaisser. Cette histoire de Justin appartient au grand-père de l'épouse de Julien Frey. Le scénariste appose des mots simples sur un dessin noir et blanc léché, aux traits forts. Entre passé et présent, Nadar réussit aussi à faire vieillir ses personnages, Justin et Renée, jusqu'à la délivrance, en 5 planches superbes, épurées, où tout est regard. Justin est en voiture avec sa fille. Crescendo, la fille emmène le père vers des mots qu'il n'a jamais prononcé : "Je n'étais pas volontaire". L'oeil du STO paru chez Futuropolis.
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